Or je suis centriste jusqu’au plus profond de moi-même. Dès lors, monsieur le Premier ministre, ne l’espérez pas !
Quoi qu’il en soit, si vous voulez que nous participions à l’élaboration d’un consensus, c’est là encore à vous qu’il appartient d’en décider.
Alors, si nous voulons avancer, que faut-il faire figurer dans cette révision constitutionnelle ?
Il ne faut pas y mettre ce qui relève de la loi. Celle-ci doit se conformer à la Constitution, mais elle est faite pour s’adapter au temps. La Constitution, en revanche, sert à affirmer des valeurs permanentes de la République. Il s’agit donc, non pas d’introduire telle ou telle disposition pratique dans la Constitution, mais bien de fixer le cadre dans lequel le Parlement et le Gouvernement peuvent prendre les mesures exigées par les circonstances.
La question de l’inscription de l’état d’urgence dans la Constitution est en fin de compte assez simple. Je voudrais d’abord souligner que, depuis que l’état d’urgence a été mis en œuvre par le Président de la République et prorogé, à deux reprises, par le Parlement, un vrai contrôle en a été exercé par le Conseil d’État et, plus largement, par le juge administratif. Le Conseil d’État a affiné sa jurisprudence en matière de contrôle. En particulier, le juge des référés du Conseil d’État a montré qu’il allait jusqu’au bout du pouvoir que la loi lui donne : il a en effet reconnu, en quelque sorte, un droit à l’audience pour toutes les personnes affectées par des mesures spécifiques prises dans le cadre de l’état d’urgence.
Néanmoins, c’est le rôle de la Constitution d’organiser les relations entre les pouvoirs publics et de déterminer ce que fait le Parlement, le Gouvernement et comment cela fonctionne. Et c’est ce que le rapporteur propose d’inscrire dans la Constitution : on ne va pas évoquer les perquisitions, les assignations à résidence, on va parler des relations des pouvoirs publics entre eux. Tout cela doit se faire en respectant la compétence de l’autorité judiciaire. En un mot, réformer la Constitution, c’est accorder des garanties, veiller à ce que les libertés publiques, dans les temps de crise, soient respectées plus encore que d’habitude, et c’est notre réponse aux terroristes. Oui, on combat le terrorisme, mais avec les armes de la démocratie et pas n’importe comment. Tel est le sens profond, selon moi, de la révision constitutionnelle. Il s’agit non pas d’inscrire dans la Constitution la loi, ce qui n’aurait pas de sens, mais de déterminer nos valeurs, les règles dans le cadre desquelles on combattra le terrorisme.
Pour ce qui est de la nationalité, la question paraît plus complexe, mais je ne suis pas sûr que ce soit le cas, surtout si chacun va au bout de sa vérité.
Quels problèmes sont posés par la déchéance ou la perte de nationalité ? J’emploie ces deux termes, car, dans un certain nombre d’arrêts, le Conseil d’État a indiqué que les deux notions revenaient au même.