On fait comme si l'on avait affaire à un seul sujet, alors qu'il y en a deux. Mme la présidente considère que quand une proposition de loi socialiste adoptée à l'Assemblée nationale poursuit son parcours législatif, fût-ce dans le cadre de l'ordre du jour réservé au groupe socialiste, la majorité doit être chargée du rapport. Elle argue que le texte, qui n'émane pas du groupe socialiste du Sénat, a reçu, à l'Assemblée nationale, le soutien de l'exécutif, ce qui justifie son souhait d'user des prérogatives de l'opposition au Gouvernement, qui se trouve être, au Sénat, majoritaire.
Depuis que je suis membre de la commission de la culture, il en a toujours été autrement. À une exception près, qu'elle s'est empressée de m'opposer. Il est vrai que Mme Bariza Khiari avait tenu à rapporter la proposition de loi sur la vente à distance des livres, adopté par l'Assemblée nationale, sur initiative de l'opposition. Je n'avais alors pas trouvé cela judicieux, craignant, en d'autres circonstances, un retour de bâton. Car en l'espèce, par un gentlemen's agreement, la droite l'avait accepté pour renforcer, par une adoption consensuelle, ce texte déposé à son initiative, en lui donnant au Sénat, l'imprimatur de la gauche. Et voilà que l'on fait de cette exception un argument de jurisprudence. Les groupes minoritaires, qui n'ont déjà plus que très peu de marge de manoeuvre, presque tous les textes étant d'initiative gouvernementale, ne pouvaient plus compter que sur leur « niche » pour tenter de faire passer certains textes. Et on veut leur enlever cette dernière liberté, en s'assurant que les textes ainsi inscrits seront détricotés !
Jamais, à la commission de la culture, nous n'avons enlevé à un groupe la faculté de rapporter un texte émanant de ses rangs.