Il y a quelques années, en 2010, quand la majorité à laquelle j’appartenais envisageait la déchéance de nationalité, on entendait des cris d’orfraie. Remettre en cause l’appartenance à notre nation d’individus ayant pris les armes contre les dépositaires de l’autorité publique constituait une atteinte intolérable aux principes constitutifs de la Nation, une entorse à la tradition républicaine… Que n’avons-nous entendu de la part de ceux qui, aujourd’hui, professent le contraire !
Au nom de la République, justement, on admet que la nationalité peut être retirée, selon cet article 2, « pour un crime ou un délit constituant une atteinte grave à la vie de la Nation ». Nous pourrions donc dire que nous étions prophétiques : cette fois-ci, c’est une majorité d’orientation différente qui admet, dans la norme fondamentale, cette déchéance de nationalité. Comment ne pas s’en réjouir ?
J’approuve cette volonté de faciliter la tâche du législateur en lui donnant cet appui le plus solide qu’est la Constitution. Au demeurant, il s’agit d’étendre le domaine reconnu au législateur par l’article 34, dont nous précisons simplement un alinéa. À cet égard, je rends hommage à la plasticité de la Constitution de la Ve République, qui est capable de s’adapter à un contexte de crise. Tout ce qui permet à notre pays de se séparer de ceux qui l’assassinent va dans le bon sens.
Je voterai donc l’article 2 du projet de loi constitutionnelle, sous réserve de l’adoption de l’amendement n° 14 déposé par Philippe Bas, au nom de la commission des lois. Je saisis d’ailleurs l’occasion de saluer le travail tant de la commission que de son rapporteur.
La sagesse sénatoriale permet d’apporter d’indispensables précisions pour éviter certaines absurdités : la déchéance de nationalité ne doit pas résulter d’un délit ni aboutir à la création d’apatrides ; elle doit être la conséquence logique des actes de ceux qui ont gravement attenté à l’unité nationale. Ils ne peuvent plus se prévaloir du beau nom de Français.
Toute bonne idée ne doit pas être évaluée en fonction de son appartenance partisane. Il y a, d’un côté, ce qui aide la France à se défendre et, de l’autre, ce qui ne l’aide pas !