Intervention de Manuel Valls

Réunion du 17 mars 2016 à 15h00
Protection de la nation — Rappel au règlement, amendement 14

Manuel Valls, Premier ministre :

Après le vote qui interviendra tout à l'heure à la Haute Assemblée, il faudra rapprocher les points de vue. Ce que j’ai voulu dire, hier, c’est que, sur les quatre points qui ont été inclus dans cet amendement, le chemin vers l’Assemblée nationale sera, sinon impossible – j’espère que ce ne sera pas le cas –, du moins difficile.

Non, hier, je n’ai pas fait de provocation. J’ai tout simplement voulu dire ce que nous pensions, nous, des points de l’amendement adoptés par votre commission des lois, compte tenu du débat qui a eu lieu à l’Assemblée nationale.

Oui, les débats à l’Assemblée nationale ont été difficiles, et d'abord au sein de ma famille politique. Mais, parce qu’il ne pouvait en être autrement, je n’ai pas cessé de bâtir un compromis entre, d’une part, la majorité des députés de gauche, socialistes et radicaux, et, de l’autre, ceux de l’UDI et du groupe Les Républicains, pour rassembler une majorité des trois cinquièmes, non pas pour l’imposer au Sénat, mais pour avancer – sauf erreur de ma part, je sais qu’il n’y aura pas ici, et ce n’est pas le sens d’une réforme constitutionnelle à ce stade, de majorité des trois cinquièmes autour de la proposition de M. le rapporteur.

Hier, j’ai uniquement voulu mettre en garde contre le fait que le chemin serait long et difficile pour rapprocher les positions du Sénat et de l’Assemblée nationale, si vous votez l’amendement tel qu’il vous est proposé, ce qui, mesdames, messieurs les sénateurs, est votre droit le plus strict. Connaissant le fond des débats, je sais que ce ne sera pas chose aisée…

Je vais reprendre, avec des mots plus élégants, ce qu’a dit M. Malhuret. Le 16 novembre dernier, le Président de la République a pris une position. Le 23 décembre, le conseil des ministres, sur ma proposition, a adopté le texte initial. Le 31 décembre, le Président de la République, à l’occasion de ses vœux aux Français, a déclaré que, sur ce sujet, il appartenait aux parlementaires de prendre leurs responsabilités et de jouer leur rôle de constituant. C’est ce qu’a fait le Parlement ! Vous rappelez sans cesse la position initiale du Président de la République… Mais le Gouvernement et l’Assemblée nationale ont bâti un compromis, que le chef de l’État, comme vous pouvez l’imaginer, a suivi avec attention.

Après votre vote, si nous partageons la même idée de la Nation et si vous souhaitez considérer avec nous que la déchéance, loin d’être une réponse au terrorisme, vise à affirmer avec force cette conception de la Nation, il nous appartiendra d’avancer ensemble. De ce point de vue, le contenu de l’amendement n° 14 rend les choses complexes.

Je ne veux pas répéter ce que j’ai déjà eu l’occasion de dire hier, mais, pour que les choses soient bien claires, j’estime que la multiplication des navettes et l'enlisement du débat auront pour effet de ridiculiser le Parlement – pour l’heure, le débat ne peut se prolonger éternellement, puisque nous sommes contraints par des délais constitutionnels.

Or les Français ont bien compris qu’il fallait, premièrement, constitutionnaliser l’état d'urgence pour l’asseoir dans notre droit et, deuxièmement, inscrire dans la loi fondamentale la déchéance pour ceux qui déchirent le pacte national.

Tel est l’état d’esprit dans lequel le Gouvernement veut pouvoir avancer.

Nous aurions préféré que cet amendement comporte plus d’éléments permettant de rapprocher les points de vue. Ce n’est pas votre choix, mais je reste convaincu que, si vous en avez la volonté, nous pourrons avancer ensemble. En tout état de cause, c’est la méthode que, pour notre part, nous continuerons à suivre, en vue de parvenir à un accord.

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