Intervention de Esther Benbassa

Réunion du 22 mars 2016 à 15h15
Questions d'actualité au gouvernement — Accord entre l'union européenne et la turquie concernant les migrants

Photo de Esther BenbassaEsther Benbassa :

Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes. Le 18 mars dernier, l’Union européenne a conclu avec la Turquie ce que d’aucuns qualifient d’« accord de la honte ».

Cet accord, dont l’applicabilité est douteuse, bafoue les principes essentiels de la convention de Genève et de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Pour sa part, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, l’OFPRA, a d’ores et déjà refusé d’y participer. Pour un Syrien refoulé de Grèce, un autre, resté dans un camp de réfugiés en Turquie et accepté officiellement en Europe, y entrera grâce à un corridor humanitaire.

En fait, l’Union européenne sous-traite sa crise migratoire à la Turquie, qui devient ainsi un « État sûr », alors que ce pays n’applique que très partiellement la convention de Genève et ne dispose pas de système de protection des réfugiés, ces derniers n’ayant aucune garantie de ne pas être refoulés vers un pays de persécution.

L’Union européenne accepte, en outre, de traiter avec un pays piétinant quotidiennement les droits humains et la liberté d’expression – le tout contre 6 milliards d’euros et une reprise des pourparlers pour son entrée dans l’Union européenne, entre autres ! Cette usine à gaz n’aurait qu’un but : en finir avec la « souffrance humaine ». Quel cynisme !

Comment la France s’est-elle prêtée à ce jeu, sachant que c’était, en fait, signer la fin de l’utopie européenne et réduire l’Europe à une simple machine bureaucratique et économique toute disposée à abdiquer la solidarité sous la pression du populisme et de la xénophobie ?

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