N’oubliez pas non plus que le Gouvernement se mobilise également pour traiter conjoncturellement la crise : le plan de soutien à l’élevage représente 700 millions d’euros sur trois ans, complétés, à l’issue du Conseil des ministres extraordinaire réuni en septembre dernier, par 63 millions d’euros de crédits européens.
Je voudrais profiter de l’occasion qui m’est offerte pour faire le point sur les mesures engagées par le Gouvernement.
Le volet social représente au total, pour 2015, près de 190 millions d’euros, avec la possibilité d’opter en faveur de l’assiette des revenus de l’année n-1 pour le calcul des cotisations de l’année n – ce sujet sera abordé dans le débat –, la prise en charge partielle des cotisations des agriculteurs en difficulté par leur caisse de mutualité sociale agricole ou encore la baisse, pour l’ensemble des agriculteurs, de l’assiette minimale des cotisations, dont le niveau a été aligné sur celui des travailleurs indépendants – mesure très importante, qui profite en particulier aux plus petites exploitations.
Je mentionnerai aussi la création du fonds d’allégement des charges, qui permet la prise en charge partielle des intérêts d’emprunt pour les agriculteurs qui connaissent des difficultés de paiement – près de 30 000 dossiers ont déjà été traités, 110 millions d’euros versés.
Quant aux exonérations fiscales, relatives en particulier à la TFNB, la taxe sur le foncier non bâti, elles s’élèvent à 38 millions d’euros, pour près de 70 000 dossiers traités.
S’agissant des questions les plus difficiles, elles sont traitées dans le cadre des cellules départementales d’urgence, qui gèrent la mise en œuvre de l’« année blanche », totale ou partielle, c’est-à-dire du report de l’annuité d’emprunt en « fin de tableau », permettant d’éviter que le remboursement des emprunts bancaires ne pèse trop lourdement sur le budget des exploitations en difficulté. Près de 4 500 demandes ont été traitées, dont 3 000 demandes d’année blanche totale.
Tout cela témoigne de la situation de grande difficulté dans laquelle se trouvent effectivement nos exploitations agricoles. Comment en irait-il autrement, alors que la baisse des prix, en un an à un an et demi, a été de l’ordre de 25 % à 30 %, pesant d’autant sur les trésoreries des exploitations.
Je ne reviendrai pas sur les grands enjeux de moyen et de long terme, liés en particulier au développement de l’agroécologie et au renforcement de l’autonomie fourragère. Sur ce dossier, qui avance, je m’apprête à faire, dans les semaines à venir, des propositions.
Je voudrais maintenant anticiper un certain nombre de débats. Certaines propositions dont nous avons débattu ici même, et que vous aviez d’ailleurs adoptées, se verront traduites en termes législatifs dans le cadre de la loi Sapin II – je pense en particulier à l’interdiction des cessions de contrats laitiers à titre onéreux. Il s’agit d’un sujet important, qui fait d’ailleurs consensus. Il faudra prendre en compte cet élément dans la mise en place des contrats-cadres des organisations de producteurs laitiers, afin que ces dernières puissent, en la matière, jouer leur rôle. Ce sujet mérite en effet, comme les quotas laitiers en leur temps, d’être traité comme un enjeu territorial, à l’échelle de chaque bassin laitier.
J’ai également déjà évoqué la question du renforcement des sanctions pour les entreprises qui refusent de publier leurs comptes. C’est un vrai sujet ! Un certain nombre de grandes entreprises, dans le domaine de l’agroalimentaire, ne publiant pas leurs comptes, il est difficile de savoir si leurs affaires vont bien ou mal.
Pour les agriculteurs, la transparence est totale ; il me paraît donc légitime de revendiquer la même chose pour les entreprises de l’aval de la filière, en particulier pour la première et la deuxième transformations, et, s’agissant de la filière laitière, pour les grandes laiteries. Les sanctions financières s’élèvent aujourd’hui à 1 500 euros, c’est-à-dire, rapporté au chiffre d’affaires de ces grandes entreprises, à pratiquement rien !
Se pose enfin la question de la transparence des « contrats LME », du nom de la loi de modernisation de l’économie. Au cours du débat, nous examinerons des amendements relatifs aux contrats prévus par la LMA, la loi de modernisation de l’agriculture, c’est-à-dire aux contrats qui lient le producteur à la laiterie. Mais, ce que j’ai ici en vue, c’est bien la loi de modernisation de l’économie, qui organise le dialogue commercial entre les industriels et la grande distribution.
Nous travaillons sur une obligation de référence aux prix payés aux producteurs dans les contrats relatifs aux produits agricoles passés entre les transformateurs et les distributeurs. Aujourd’hui, les négociations entre industriels et grands distributeurs sont si difficiles qu’à chaque fois le ministre est saisi. C’est ce qui s’est produit dans le domaine du lait : nous sommes intervenus pour éviter la baisse des prix. Les conséquences pour les producteurs des négociations commerciales entre les industriels et la grande distribution ne sont jamais prises en compte dans les contrats issus de ces négociations. La LME doit donc être corrigée.
Vous voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, que les questions soulevées dans le cadre de l’examen de cette proposition de loi, à commencer par celle de la compétitivité, retiennent toute l’attention du Gouvernement, dont l’action tient compte des débats qui ont lieu au Sénat – ou ailleurs. L’effort budgétaire, en termes de baisses de cotisations, représentera en 2017 plus de 2 milliards d’euros : l’État n’avait jamais consenti un effort de ce niveau !
Nous faisions face à une réalité dont il fallait corriger les effets négatifs. C’est ce à quoi nous nous employons, et c’est à cela qu’ont servi à la fois les débats parlementaires et le dialogue que tiennent de manière régulière tant le Président de la République que le Premier ministre avec les organisations professionnelles agricoles.
Pour conclure, je tiens à remercier M. le rapporteur et M. le président de la commission des affaires économiques ainsi que tous les autres sénateurs qui ont contribué à ce débat.