Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 6 mai 2010 à 21h30
Loi de finances rectificative pour 2010 — Adoption définitive d'un projet de loi

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

Même si les marchés se calment, gardons-nous de croire qu’une fois l’incendie éteint, la braise ne se rallumera pas. Le drame, aujourd’hui, c’est la crise de confiance générale. Plus grave encore, il n’y a plus de confiance entre les États au sein de la zone euro. Une lettre commune du Président de la République et de la Chancelière au Président de l’Europe ne suffira pas à la retrouver.

Qu’ont fait les dirigeants ces dernières années ? Une course folle : une course à l’avantage compétitif, une course à la baisse de la fiscalité, surtout pour le capital, une course à la compression salariale au sein même de l’Union européenne.

De tels choix sont politiques. Il en faut de nouveaux pour que l’Europe survive et, bien sûr, en son sein, la zone euro.

Pour élaborer de nouvelles règles pour le pacte de stabilité, comme pour définir des normes budgétaires, il y aura du monde, mais pour dégager des solutions politiques, réclamées par la gouvernance économique, l’harmonisation fiscale et, enfin, un budget européen qui donne à l’Europe la capacité propre d’emprunter, il faudra plus que le talent de hauts fonctionnaires : il nous faudra des dirigeants à la hauteur !

Le jugement de la gestion de crise ne peut qu’être sévère. Nous avons vu des gouvernants divisés, hésitants et quelquefois hypocrites. La réalité, nous la connaissons : l’Europe est malade de ses déficits publics, certes, mais aussi de son chômage et de sa très faible croissance. Au moment où se dessine un couple G 2, États-Unis et Chine, il est temps de se ressaisir.

Madame la ministre, en commission vous nous avez rappelé que le traité de Lisbonne institutionnalise l’Eurogroupe. Il nous donnerait donc la liberté d’aller de l’avant. J’ai d’ailleurs déjà entendu cet argument dans mon camp.

Les socialistes réclament depuis des années, sans trouver d’écho, cette gouvernance économique, dont tout le monde se fait aujourd’hui le chantre.

Il est plus nécessaire que jamais de construire cette gouvernance, au lieu de se servir de la crise pour régler à la hussarde tel ou tel problème domestique – je veux parler, bien sûr, des retraites et du gel des dépenses annoncé par le Premier ministre, sans qu’il veuille bien sûr regarder du côté des recettes, mais nous y reviendrons.

Je conclurai sur une note un peu plus positive. En 1974, dans la tourmente monétaire qui suivait la crise ouverte en 1973, le Secrétaire d’État américain Henry Kissinger avait eu cette formule méchante : « L’Europe, quel numéro de téléphone ? ». Les faits ne lui ont pas donné tout à fait raison. Peut-être n’y avait-il personne au téléphone, mais il y avait quelqu’un dans l’avion : en 1976, les accords de la Jamaïque étaient signés, et, en 1979, le Système monétaire européen était en place.

Aujourd’hui, c’est l’euro, son successeur, qui est dans la tourmente, et c’est l’Europe et les Européens qui souffrent.

Nous, socialistes, souhaitons que l’Europe soit pilotée et remise à l’endroit, sur de bonnes bases, celles de la croissance et de la justice.

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