Nous ne sommes pas dans l’émotion : un réel travail a été fait.
Nous devons aussi tirer les conséquences d’une justice engorgée, et je salue les mesures de simplification qui sont contenues dans le texte que nous allons aborder tout à l’heure.
Enfin, il faut bien évidemment donner aux enquêteurs et aux magistrats de nouveaux moyens d’investigation et de poursuite. Ce qui était valable précédemment ne l’est plus forcément aujourd'hui.
Certains diront que le projet de loi a été alourdi ; d’autres, qu’il a été enrichi. Je préfère cette seconde approche, notamment pour tout ce qui concerne les mesures de prévention en matière de contrôle administratif et de lutte contre le financement du terrorisme.
Vous l’aurez compris, nous ne contestons pas la nécessité de telles réformes, car nous sommes aussi conscients du fait que nous ne pourrons pas rester éternellement sous le régime de l’état d’urgence. Bien sûr, on peut déplorer que certaines dispositions de ce régime puissent être, au moins dans leur esprit, retrouvées dans le texte qui sera, je l’espère, voté. Mais il faut accompagner la nécessaire sortie de l’état d’urgence, et je crois sincèrement que ce texte, qui, je le répète, vient dans la ligne de celui que nous avions déjà étudié, nous permettra de sortir de cette situation exceptionnelle.
Le Gouvernement n’a pas souhaité se saisir, comme il aurait pu le faire, du texte déjà adopté par le Sénat. Dont acte ! Cela n’empêchera pas notre assemblée d’apporter sa contribution, tant à travers les travaux de la commission des lois qu’au travers de nos débats.
Je précise que nous sommes favorables à un certain nombre de mesures telles que les perquisitions de nuit, les dispositions relatives à la fouille des bagages ou encore la procédure de retenue en cas de suspicions sérieuses. Quant aux mesures relatives au financement du terrorisme, elles sont primordiales. L’une des clés de la prévention et de la répression du terrorisme est le contrôle et l’entrave des moyens financiers dont disposent les organisations pour attirer et maintenir en leur sein des combattants et organiser leurs actions criminelles. Nous approuvons à ce titre les mesures qui concernent les compétences de TRACFIN ou celles qui visent à lutter contre le trafic d’armes. Je sais bien que ces dispositions peuvent paraître technocratiques et un peu éloignées des grandes valeurs que nous défendons, mais elles sont nécessaires. Il faut entrer dans le détail, car nous sommes en matière de procédure pénale et de procédure douanière.
La commission des lois a réalisé depuis plusieurs semaines un important travail. Son texte complète le projet de loi en intégrant plusieurs des dispositions qui figuraient dans la proposition de loi de Philippe Bas et Michel Mercier. Je vois en particulier un apport considérable dans le fait que soit prévue une circonstance aggravante permettant de criminaliser certains délits d’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste et de faciliter la saisie des correspondances stockées, et j’espère que le Sénat retiendra ces dispositions.
Il en va de même pour le placement en retenue administrative, une mesure qui a déjà fait couler beaucoup d’encre, mais je pense que le travail de Michel Mercier a permis d’assortir le dispositif de plusieurs garanties et que nous arrivons à un équilibre judicieux.
Les dispositions relatives à l’usage des armes par les forces de l’ordre, que l’article 19 prévoit de réformer, peuvent paraître secondaires. Elles sont au contraire importantes, et je salue la rédaction adoptée par notre commission.
Enfin, nous avons renforcé une mesure indispensable à mes yeux : le contrôle administratif des personnes de retour de théâtres d’opérations terroristes. La commission a allongé, à juste titre, la durée de l’assignation à résidence pour la porter de un à deux mois.
S’agissant du renforcement du caractère contradictoire des enquêtes, je dirai simplement que nous revenons d’assez loin, car les débats tels qu’ils s’étaient engagés à l’Assemblée nationale ne nous permettaient pas d’être très optimistes à ce sujet. Le texte initialement voté par les députés en commission était en effet, selon les termes mêmes du Gouvernement, « totalement inapplicable et sur le fond profondément injustifié ». Nous proposons un texte réaliste qui doit permettre l’ouverture d’une « fenêtre » de contradictoire pour les enquêtes préliminaires les plus longues sans remettre en cause leur efficacité.
La critique souvent justifiée, et peut-être l’est-elle aussi en l’espèce, sur le fait que le Gouvernement ait engagé la procédure accélérée a été avancée. Moi aussi, je regrette le recours à cette procédure, sauf que nous travaillons tout de même depuis un moment sur le sujet ! J’ai donc la faiblesse de penser que nous avons à peu près cerné les problèmes. En revanche, messieurs les ministres, je m’inquiète davantage de la capacité du Gouvernement à présenter des amendements en cours d’examen du texte. C’est toujours un indice inquiétant, et j’espère que vous nous rassurerez…
Quoi qu’il en soit, l’important travail fait par Michel Mercier et Philippe Bas ainsi que par tous ceux qui les ont accompagnés dans leurs travaux me rassure. C'est la raison pour laquelle, avec mon groupe, je voterai en faveur du projet de loi.