Intervention de Bernard Cazeneuve

Réunion du 29 mars 2016 à 14h30
Lutte contre le crime organisé et le terrorisme — Article 18, amendement 156

Bernard Cazeneuve, ministre :

Le Gouvernement est défavorable à l’exclusion des mineurs de la mesure de retenue, et ce pour plusieurs raisons.

D’abord, des mineurs sont effectivement impliqués dans des activités à caractère terroriste. Mesdames, messieurs les sénateurs, je vais vous donner des chiffres précis : 400 mineurs ont été signalés pour radicalisation et contact avec des groupes à caractère terroriste et 76 mineurs sont impliqués dans les combats en Irak et en Syrie. Le sujet que nous traitons est non pas futur, mais actuel.

Ensuite, se pose la question de savoir si le mineur impliqué dans des activités terroristes doit être considéré par l’État, la justice ou le ministère de l’intérieur comme un majeur. L’implication d’un mineur dans une activité à caractère terroriste ne fait pas de lui un majeur. Il demeure bien mineur.

Cela étant, la vulnérabilité particulière d’un certain nombre de mineurs à la propagande sectaire de Daech justifie qu’on les mette sous protection le plus vite possible, car cette propagande sectaire peut les conduire aux pires exactions et à l’avenir le plus funeste. C’est la raison pour laquelle nous avons souhaité que cette retenue s’applique aux mineurs, mais selon des dispositions différentes de celles qui prévalent pour les majeurs.

Pour les mineurs, l’autorisation du procureur de la République doit être expresse, à la différence du dispositif arrêté pour les majeurs. Pourquoi une telle autorisation ? Tout simplement parce que le mineur qui est entre les mains d’une organisation sectaire, voire de parents qui ont pu le conduire sur le théâtre des opérations, a besoin d’une mise sous protection. Cette retenue est par conséquent nécessaire pour déclencher les mesures de protection du mineur, lorsqu’il est confronté à une telle situation.

Je ne suis donc pas favorable à l’amendement n° 156 de Mme Benbassa, parce que son adoption nous priverait de la possibilité de protéger un mineur rapidement et efficacement, dès lors qu’il s’est trouvé engagé dans des opérations à caractère terroriste, soit parce qu’il a été victime d’un endoctrinement sectaire, soit parce que ses parents l’ont obligé à se rendre sur le théâtre des opérations.

Dans le même temps, je partage tout à fait le sentiment que la mesure qui s’applique aux mineurs ne peut pas être la même que celle qui s’applique aux majeurs. C’est la raison pour laquelle, dans l’esprit que je viens d’indiquer, nous proposons une autorisation expresse du procureur de la République.

Pour toutes ces raisons, qui tiennent à notre volonté de protéger ces mineurs, je ne suis pas favorable à l’amendement tendant à supprimer complètement la retenue pour les mineurs. Il en est de même pour les amendements n° 124 et 125, car, s’ils étaient adoptés, ces mineurs se retrouveraient exposés, sans que l’État puisse les protéger.

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