Intervention de Michel Mercier

Réunion du 29 mars 2016 à 14h30
Lutte contre le crime organisé et le terrorisme — Article 18

Photo de Michel MercierMichel Mercier, rapporteur :

Ce point est important, puisqu’il constitue l’une des garanties fortes accordées par le projet de loi aux personnes placées en retenue.

Nous sommes en présence de deux propositions. La première, qui a été défendue par Mme Duchêne, prévoit que l’officier de police judiciaire informe, pour le compte de la personne retenue, son employeur et toute personne de son choix. Un verrou est posé : la personne retenue ne pourra en aucun cas passer l’appel elle-même et devra toujours passer par l’officier de police judiciaire.

La seconde proposition, défendue par M. Mézard, prévoit que la personne placée en retenue pourra appeler une personne de son choix et qu’elle aura, de toute façon, également le droit d’être assistée d’un avocat.

Je veux rappeler la position prise par la commission des lois, ce qui me permettra d’expliquer les raisons pour lesquelles j’émets un avis défavorable sur les deux amendements.

Pour la commission, il faut naturellement que la personne placée en retenue puisse avertir la personne de son choix et son employeur. En revanche, il faut faire attention et se prémunir contre le risque que la personne placée en retenue n’utilise, en appelant un complice potentiel pour lui annoncer qu’elle est placée en retenue, un code qui mettrait à ce dernier la puce à l’oreille. Et le fait que cette personne soit appelée par un officier de police judiciaire ne change rien à l’affaire !

Imaginons qu’un officier de police judiciaire appelle, par exemple, M. Collombat – il sera sans doute très souvent sollicité ! §Plus sérieusement, l’appel à une personne choisie par la personne placée en retenue, s’il émane d’un officier de police judiciaire, sera aussi une alerte si la personne retenue est un terroriste potentiel.

Quel est donc le dispositif retenu par la commission ?

Examinons tout d’abord le cas où la retenue ne démontre pas une grande dangerosité de la personne en cause. Celle-ci pourra alors elle-même appeler son employeur ; cela est préférable à un appel effectué par l’officier de police judiciaire, qui pourrait conduire à la perte de l’emploi en question, conséquence somme toute indésirable. La personne retenue pourra également, si elle le veut, appeler un membre de sa famille.

J’en viens désormais à l’autre possibilité, devançant ainsi l’argument que m’opposera à n’en pas douter M. Mézard. Si donc les vérifications administratives effectuées par l’officier de police judiciaire démontrent que la personne retenue est potentiellement dangereuse, un délai de deux heures est institué pendant lequel l’officier de police judiciaire peut et doit consulter le procureur de la République. Au vu des éléments fournis par l’officier et des explications présentées par la personne retenue, le procureur peut défendre à cette dernière d’avertir son employeur ou la personne de son choix.

J’estime donc que le système que nous avons mis en place non seulement préserve les droits de la personne retenue, mais évite aussi toute déclaration de complicité et toute possibilité d’éveiller les soupçons de complices, tout cela sous le contrôle du procureur de la République.

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