Intervention de Hugues Portelli

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 30 mars 2016 à 9h30
Renforcer la liberté l'indépendance et le pluralisme des médias — Indépendance des rédactions - examen du rapport et du texte de la commission, amendement 18

Photo de Hugues PortelliHugues Portelli, rapporteur pour avis :

L'article que nous avons examiné est issu du projet de loi de juin 2013 relatif à la protection des sources des journalistes, qui modifiait la loi de 2010 relative à la protection du secret des sources des journalistes. La greffe est le fait du rapporteur de l'Assemblée nationale, Patrick Bloche. Devenu article 1er ter, il a été modifié en séance par un amendement du Gouvernement.

Notre commission s'est émue de la vitesse qui a présidé à ces opérations, au point que l'amendement du Gouvernement présente des incohérences rédactionnelles : il modifie tout ensemble la loi de 1881, le code pénal et le code de procédure pénale alors même que les dispositifs visés sont différents. C'est l'objet de l'un de mes amendements.

Les lois de 2010 et de 2013 avaient pour objet de mettre notre droit en conformité avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) ; mais le projet de loi de 2013 intègre aussi des préconisations de la Commission nationale consultative des droits de l'homme qui vont plus loin. Notre commission a voulu concilier le respect de la jurisprudence de la CEDH et les principes de respect de la vie privée, du secret de l'instruction et du secret de la défense nationale, principes tout aussi importants que celui du respect des sources du journaliste.

Mon amendement n° COM-18 restreint le champ des personnes bénéficiant de la protection du secret des sources. La jurisprudence de la Cour de cassation définit déjà très largement la profession de journaliste. Il n'est pas opportun d'étendre la protection aux collaborateurs extérieurs que sont les secrétaires, voire les livreurs.

Mon amendement n° COM-20 supprime la notion d'atteinte indirecte aux sources qui n'est retenue ni par la jurisprudence européenne, ni par la jurisprudence française et qui rendrait toute enquête impossible.

L'amendement n° COM-21 met en cohérence la rédaction de l'amendement du Gouvernement avec celle adoptée par l'Assemblée nationale : tantôt c'est la prévention, tantôt la répression qui est invoquée ; tantôt un crime et tantôt un délit.

L'amendement n° COM-22 rétablit le délit de recel du secret de l'enquête ou de l'instruction, dont le texte exemptait les journalistes lorsque la divulgation des éléments « constitue un but légitime dans une société démocratique ». Les juges du pénal s'opposent à ce qu'en le supprimant, on laisse la voie libre aux violations d'un secret qui est déjà peu respecté. De plus, la notion de « but légitime » relève d'une appréciation purement subjective. Ce n'est pas du droit et cela permettrait de violer le secret de l'instruction en toute tranquillité.

Enfin, en supprimant l'article 11 ter, notre amendement n° COM-24 veut rendre au travail législatif toute sa cohérence : il y a quelques mois, cette disposition a été votée à l'unanimité et il est quand même curieux de revenir sur cette décision. Mais il ne s'agit ici que d'un avis de la commission des lois : à vous maintenant de juger.

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