Intervention de Jacques Rapoport

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 30 mars 2016 à 9h00
Audition de M. Guillaume Pepy président-directeur général de sncf mobilités et de M. Jacques Rapoport président-directeur général de sncf réseau

Jacques Rapoport, président-directeur général de SNCF :

Je vous remercie de nous donner cette opportunité d'échanger avec la représentation nationale. Le fait que nous parlions de moins en moins de la réforme ferroviaire d'août 2014 est positif, car cela signifie qu'elle est mise en oeuvre comme prévu. Les institutions ont été mises en place et fonctionnent ; le système ferroviaire a retrouvé une cohésion humaine, après dix-huit ans de « guerre des tranchées » ; entre le gestionnaire du réseau et l'opérateur historique, les fonctions essentielles sont assurées en toute indépendance ; nous avons dépassé les objectifs de productivité sur lesquels nous nous étions engagés ; nous progressons enfin sur la gestion du foncier et de l'immobilier, autrefois source d'insatisfactions, comme en témoigne la série de protocoles signés en Ile-de-France.

Deux grands sujets restent à traiter. Le premier, beaucoup plus préoccupant que la situation financière, est l'état dégradé de notre réseau. Mon successeur n'aura pas la tâche facile, car SNCF Réseau est le dépositaire d'un patrimoine national en danger. Je ne parle pas ici des lignes à grande vitesse ou des ouvertures de ligne, mais des 20 000 à 25 000 kilomètres qui n'ont pas bénéficié des investissements requis depuis 25 à 30 ans, sur notre réseau de 30 000 kilomètres. Si l'on peut comprendre que des dépenses de renouvellement aient été reportées sur cinq ou dix ans, de tels reports ne devraient pas avoir lieu sur une période de trente ans. L'infrastructure ferroviaire n'est pas strictement arithmétique et logique : à partir d'un certain âge, la prévisibilité des investissements décroît, et la science de l'ingénieur n'est pas illimitée. L'âge moyen des voies est de 33 ans, soit le double de ce qui est observé en Allemagne. Il s'agit d'un réel risque et la seule priorité que nous devons avoir est celle de la préservation de ce patrimoine. Dans ce contexte, le débat sur la dépréciation d'actifs présente peu d'intérêt au regard de la valeur totale de notre réseau, qui avoisine les mille milliards d'euros.

Beaucoup de sujets entrent en compte dans la négociation du contrat de performance avec l'État, mais c'est la trajectoire de renouvellement qui me semble la plus importante. Il est possible d'augmenter les dépenses de renouvellement sans augmenter la dépense publique, à condition de reporter un certain nombre de projets de développement - dont je ne remets pas ici en cause l'utilité ou la pertinence, mais le caractère prioritaire. La priorité, pour les dix à quinze ans à venir, doit être la remise à niveau de la partie la plus circulée du réseau, qui est possible malgré la contrainte financière.

La situation financière résulte d'une stagnation des recettes et d'une augmentation des dépenses. Les péages ont augmenté de 5% par an pendant des années, sans que SNCF Réseau puisse en bénéficier puisque les gains en résultant ont été affectés aux nouveaux projets pour compenser la diminution des subventions. Aujourd'hui, le TGV paie 800 millions d'euros de péages de plus qu'il y a dix ans, et pour les régions, cet écart se chiffre à 200 millions d'euros. On ne peut aller au-delà, et ces recettes vont peut-être même diminuer, car l'Arafer, qui possède un pouvoir de décision dans ce domaine, estime que ces péages sont trop élevés par rapport à ce qu'exige le droit européen. Quant aux charges, elles augmentent non pour des raisons de productivité insuffisante, mais parce qu'il faut désormais assumer des dépenses importantes de remise à niveau.

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