Je considère que les dispositions de l’article 24 ne répondent à aucune obligation découlant des normes européennes ou internationales, ni à un besoin réel. Elles ne seront pas de nature à résoudre les difficultés relatives aux enquêtes longues ; bien au contraire, elles risquent de les aggraver. Je crains qu’elles ne provoquent une désorganisation complète de la chaîne pénale, engendrant un ralentissement majeur de la réponse pénale.
Mes chers collègues, ouvrir la brèche du contradictoire au stade de l’enquête préliminaire, c’est prendre le risque qu’elle ne s’agrandisse à chaque réforme législative. Or, je pense que vous en conviendrez tous, une enquête n’est efficace que lorsqu’elle est secrète.
Je salue le remarquable travail accompli par M. le rapporteur. La formulation retenue à l’issue des débats en commission des lois est incontestablement meilleure que celle qui nous a été transmise par l’Assemblée nationale. Encore peut-on se demander ce que cet article vient faire dans un texte relatif à la criminalité organisée.
Pour autant, des imprécisions subsistent. Qu’advient-il lorsqu’une demande d’accès au dossier est formulée mais que l’enquête n’est pas terminée ? Le procureur ne semble avoir aucune obligation, alors même que c’est à ce stade que la personne mise en cause souhaite savoir si elle risque d’être inquiétée. Si le procureur a déjà pris la décision d’engager des poursuites par citation directe ou par convocation par officier de police judiciaire, il est largement illusoire de croire que les observations des parties le feront revenir sur cette décision. Alors, à quoi bon ?
Ensuite, lorsqu’une victime a porté plainte et qu’aucune suite n’a été donnée, c’est tout simplement parce que l’enquête est en cours, que l’auteur n’a pas été identifié ou autres motifs, bref parce qu’aucune réponse ne peut, en l’état, lui être apportée. Je rappelle que lorsque la procédure est classée sans suite, la victime est systématiquement avisée du motif de ce classement, et que lorsque l’affaire est renvoyée à l’audience, celle-ci ne peut se tenir que si la victime a été avisée. Alors, à quoi bon ?
Voilà ce qui justifie ma demande de suppression de l’article 24. Je crains qu’elle n’ait guère de succès, mais au moins aurai-je essayé.