Intervention de Michel Mercier

Réunion du 31 mars 2016 à 10h30
Lutte contre le crime organisé et le terrorisme — Article 24

Photo de Michel MercierMichel Mercier, rapporteur :

Je trouve l’amendement présenté par M. Reichardt très intéressant et assez fondé en droit. Toutefois, il me semble en légère contradiction avec son amendement précédent, qui visait à introduire du contradictoire avant le placement en détention provisoire…

Encore une fois, nous vivons une période de changement de notre procédure pénale. On est arrivé à la fin d’un cycle et il faut reconstruire. Cependant, comme on n’est pas prêt à tout reconstruire, eu égard à l’actualité, au temps parlementaire, au temps gouvernemental, au temps électoral, on essaye de poser quelques pansements ici ou là…

Le contradictoire, cela est vrai, doit s’apprécier sur la totalité du procès, qui commence à l’enquête et finit à l’audience. Les garanties ne sont pas les mêmes, pour les personnes concernées par l’action publique, au cours des différentes séquences que sont l’enquête, l’éventuelle instruction et l’audience.

Au stade de l’enquête, le fait que l’autorité judiciaire mène celle-ci, sous l’autorité du procureur de la République et, de plus en plus souvent, du juge des libertés et de la détention, constitue la garantie essentielle : c’est l’article 66 de la Constitution. Il faut garder à l’enquête son efficacité.

Le contradictoire joue pleinement au stade de l’audience, les droits de la défense primant alors.

Cependant, les députés ont délibéré, et nous devons en tenir compte : l’article 24 a été récrit à l’Assemblée nationale à la demande du Gouvernement, en partie au moins. Nous avons essayé, en commission des lois, de mieux encadrer ce principe du contradictoire, de façon à ne pas nuire à l’efficacité de l’enquête : si tout est ouvert, il n’y a plus d’enquête.

Pour autant, certaines enquêtes peuvent être très longues, pour diverses raisons, au premier rang desquelles l’engorgement du parquet.

Nous avons donc d’abord décidé de porter de six mois à un an le point de départ pour le contradictoire. Nous avons ensuite limité le champ des actes susceptibles d’ouvrir le contradictoire aux seules mesures de garde à vue et d’audition libre. S’il ne s’est plus rien passé pendant un an après une garde de vue ou une audition, il est tout de même normal de permettre aux parties concernées de demander au procureur où en est le dossier.

Nous avons en outre veillé à ce que ce soit le procureur qui décide de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité pendant le mois au cours duquel la personne peut formuler des observations.

Nous avons enfin supprimé les dispositions en vertu desquelles la personne ayant déjà fait l’objet d’une garde à vue ou d’une audition libre peut consulter le dossier avant de faire l’objet d’une nouvelle audition ou d’une nouvelle garde à vue.

Nous avons donc accepté, en commission, l’introduction d’une dose de contradictoire dans l’enquête, parce qu’il s’écoule parfois trop de temps entre les premiers actes et le moment où une suite est donnée, tout en veillant à conserver l’efficacité de l’enquête. C’est une solution de compromis. Je vous invite, monsieur Reichardt, à retirer votre amendement.

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