Intervention de Alain Richard

Réunion du 31 mars 2016 à 15h00
Lutte contre le crime organisé et le terrorisme — Article additionnel après l'article 27 octies

Photo de Alain RichardAlain Richard :

Je me joins au rapporteur pour dire que le Gouvernement a bien fait de prendre cette initiative. Le schéma qu’il propose pour remplacer le dispositif figurant dans la législation, mais qui est inapplicable, a sa justification. Toutefois, à mon avis, il existe au moins un obstacle ou une incertitude.

Permettez-moi de revenir sur l’article 52-2 que le Gouvernement propose d’introduire dans le code de procédure pénale pour charger le collège de l’instruction de procéder à un certain nombre de mesures à la place du juge. Il est indiqué que le collège de l’instruction est saisi soit sur l’initiative du juge d’instruction en charge de la procédure, soit sur requête du procureur, soit sur demande d’une partie. Or cette dernière demande n’est filtrée par personne. Est-ce cohérent ?

Autant, en bonne administration de la justice, il est parfaitement défendable que le juge déjà saisi considère que la complexité de l’affaire ou la charge induite justifie un collège, de même que le procureur de la République, dans sa mission de conduite de la procédure. Néanmoins, revient-il à une partie, éventuellement contre l’avis des autres, d’avoir la possibilité de choisir son juge ? Cela conduirait à créer un désordre, et je ne vois pas l’intérêt de cette possibilité en termes d’administration de la justice ni d’équité. Voilà un premier point qui mériterait au moins d’être approfondi.

À mon sens, la meilleure solution consisterait à demander à une autre instance, la chambre de l’instruction, de prendre la décision.

Le second point concerne le redéploiement fonctionnel massif que cela représente pour la ressource humaine très spécifique et précieuse que sont les juges d’instruction. Là aussi, deux solutions peuvent être envisagées.

Soit on procède à une simple concentration géographique : tous les juges d’instruction seraient affectés à des collèges, avec, pour conséquence, une réduction massive du nombre de tribunaux de grande instance dotés d’un juge d’instruction. Néanmoins, on organiserait alors une carte judiciaire à deux vitesses, monsieur le garde des sceaux. Je crains que vous ne concurrenciez alors la célébrité acquise par l’une de vos prédécesseurs en matière de carte judiciaire…

Soit le juge d’instruction a une affectation compatible avec sa participation à un collège d’instruction. En effet, la participation d’un juge à un collège d’instruction n’est pas forcément une fonction à temps plein ou une fonction définitive. On pourrait très bien envisager un collège de collègues établis dans un autre ressort, à l’intérieur évidemment de la même cour d’appel.

Ces sujets méritent au moins une réflexion approfondie et ne se prêtent pas à l’adoption d’un dispositif complet dès aujourd'hui.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion