Le salarié qui cesse de travailler doit acquitter pendant un an l'impôt dû sur ses revenus d'activité passée. Le retraité continue, la première année de sa retraite, à payer le même impôt que lorsqu'il était encore en activité. Le travailleur indépendant qui voit ses revenus diminuer - notamment dans l'agriculture - ne voit son impôt corrigé en conséquence, que trop tardivement.
Ces situations sont loin d'être marginales : chaque année, environ 30 % des foyers fiscaux connaissent une baisse de leurs revenus d'une année sur l'autre, cette baisse étant supérieure à 30 % de leur revenu pour environ 10 % d'entre eux. Pour tous ces contribuables, la réforme apportera une amélioration considérable.
Ces exemples sont loin d'être exhaustifs. Dans tous ces cas, le contribuable peut rencontrer des difficultés de trésorerie. Il peut être amené, s'il veut les anticiper, à constituer une épargne de précaution, ce qui n'est guère compatible avec le soutien de la consommation et de l'activité. Et il ne sait pas à l'avance si elle suffira. Lorsque ces situations ne sont pas douloureuses, elles sont pour le moins inconfortables.
Ce décalage d'un an est d'autant plus pénalisant qu'il concerne des personnes aux revenus modestes ou moyens, ou qui connaissent des ruptures ou mobilités professionnelles. Faire coïncider le moment où l'on perçoit son revenu et celui où l'on acquitte ses impôts est, pour ces personnes-là, un progrès réel.
Un impôt payé sur les revenus en cours accompagnera et facilitera aussi les transitions professionnelles. Dans une société où la linéarité des parcours personnels comme professionnels n'est plus la norme, l'impôt sera ainsi mieux adapté.
Un impôt moderne, c'est aussi un impôt simple pour tout le monde.
Nous proposons que, pour la très grande majorité des contribuables, dont le revenu est principalement constitué de traitements et salaires, l'impôt soit prélevé par l'employeur. Pour le salarié, ce ne sera qu'une ligne de plus sur la fiche de paye, et c'est donc très simple : il n'aura aucune démarche de paiement de l'impôt à faire, jusqu'à la déclaration de ses revenus. Pour l'employeur, dont le coeur de métier n'est certes pas de collecter des prélèvements obligatoires - mais qui en collecte déjà un certain nombre - nous veillerons à ce que le système soit aussi le plus simple possible.
L'administration fiscale transmettra un taux à chaque employeur, en s'appuyant sur la déclaration sociale nominative (DSN) qui sera pleinement déployée d'ici l'été 2017. Ce chantier a été engagé bien avant le prélèvement à la source et permettra, par un document unique dématérialisé, d'acquitter l'ensemble des cotisations sociales, et désormais, l'impôt sur le revenu.
J'ai entendu, de la part de certaines organisations professionnelles que nous rencontrons avec Christian Eckert, des questions sur la charge que représenterait le prélèvement par l'employeur. Nous sommes en train d'achever une évaluation de cette charge, mais les premiers retours du terrain montrent qu'elle sera modérée voire quasiment inexistante.
L'administration fiscale restera l'unique interlocuteur des salariés pour leurs questions concernant les impôts. Ces derniers n'auront pas à transmettre d'information sur leur situation familiale, et encore moins sur leurs autres revenus, à leur employeur. C'est à la fois un gage de simplicité pour l'employeur et de confidentialité pour le salarié. La confidentialité des informations de chacun sera préservée. Au demeurant, plus de 90 % des contribuables ont un taux moyen d'imposition compris entre 0 % et 10 % et un même taux d'imposition peut traduire des situations tellement différentes que le connaître ne suffira pas à donner une information intéressante.
Par ailleurs, nous avons prévu que chaque membre d'un couple puisse être prélevé sur la base de taux différents en cas d'écart de revenus important entre eux. Cela évitera que celui, ou trop souvent celle, qui gagne moins, ne soit prélevé à un taux qui traduit en partie la situation de son conjoint.
Enfin, chaque année, les revenus continueront à être déclarés par les foyers fiscaux. Avec la télé-déclaration et la déclaration pré-remplie, dont vous avez voté le renforcement dans la loi de finances pour 2016, il s'agit désormais d'un simple « clic ». Nous avons d'ailleurs amélioré cette année le service rendu aux contribuables qui déclarent leurs revenus sur internet puisqu'ils bénéficieront d'un nouveau document, l'avis de situation déclarative à l'impôt sur le revenu (ASDIR), qui justifiera de leur situation d'imposition dès la déclaration en ligne.
Vous le voyez, le passage au prélèvement à la source ne changera pas l'impôt tel que nous le connaissons, mais il nous fournira un système plus simple et plus moderne, plus réactif aux évolutions que chacun peut connaître, au bénéfice de tous les contribuables.