a d'abord dressé un panorama d'ensemble des réformes des retraites menées depuis 1999, date à laquelle il avait présenté un rapport sur les retraites au Premier ministre de l'époque, Lionel Jospin. En 1999 en effet, la France était en retard sur les autres pays ; depuis, la situation s'est beaucoup améliorée.
Trois séries d'éléments favorables sont intervenus même s'il reste encore un certain nombre de problèmes à régler. Tout d'abord, la loi Fillon de 2003 a mis en place une réforme bien construite, intelligente et puissante. Elle a énoncé un principe robuste et subtil selon lequel il doit y avoir une proportionnalité entre la durée d'assurance nécessaire pour obtenir une retraite à taux plein et l'espérance de vie moyenne de la population au moment du départ en retraite. C'est ainsi qu'a été fixé l'objectif d'une durée de cotisation de quarante et un ans en 2012, durée qui devra encore augmenter au cours des années suivantes. Dans le rapport de 1999, une durée de cotisation de quarante-deux années et demie avait de la même façon été envisagée à l'horizon 2020 ; il ne s'agissait alors pas de chercher à équilibrer les régimes mais simplement de tenir compte du recul de l'âge moyen d'entrée en activité. Celui-ci est d'environ vingt-deux ans et demi aujourd'hui ; il rend légitime un âge moyen de soixante-cinq ans pour le départ en retraite. Le principe posé par la loi Fillon a donc permis de placer les régimes de retraite sur une bonne trajectoire.
Le deuxième élément favorable est le rapprochement intervenu entre les régimes des secteurs public et privé, grâce à la loi de 2003 et à la réforme des régimes spéciaux de 2008. La réforme Balladur de 1993 avait considérablement accru les écarts ; au cours des dernières années, on a, à l'inverse, cherché à réduire la principale différence, à savoir la durée de cotisation, ce qui est une très bonne chose.
Enfin, le caractère absurde des nombreux barèmes, mis en exergue dans le rapport de 1999, a été corrigé avec la création de la surcote et la modification des décotes. Désormais, les barèmes sont quasiment alignés sur le principe de la neutralité actuarielle à la marge, ce qui permet une vraie liberté de choix pour les individus.
Au total, s'il y a donc eu une véritable évolution des régimes de retraite depuis 1999, la question est de savoir pourquoi on souhaite faire une nouvelle réforme en 2010. En effet, la loi Fillon a prévu un dispositif très perfectionné de rendez-vous d'ici 2020, horizon final de la loi, en 2008, 2012 et 2016. Le rendez-vous de 2008 s'est certes révélé décevant mais il a au moins parfaitement confirmé la trajectoire définie en 2003. L'anticipation de deux ans du rendez-vous suivant, de 2012, s'explique sans doute par la très forte dégradation des équilibres financiers des régimes de retraite. Or, cette dégradation est entièrement due au jeu des stabilisateurs automatiques puisque aucune décision n'est venue aggraver les dépenses ; seule la baisse des assiettes a entraîné une chute des recettes. Le Gouvernement souhaite donc, par un effet d'annonce, commencer à redresser les comptes, même si l'essentiel des décisions ne pourra avoir qu'un effet à long terme sur l'amélioration des comptes publics.
A la demande du Sénat, le conseil d'orientation des retraites (Cor) a réalisé un travail très remarquable et complet sur le système des comptes notionnels. Ce système était connu depuis plusieurs années, en particulier depuis les lois suédoises de 1994 et 1998 et la loi italienne de 1995, mais il n'avait jamais encore été aussi bien analysé. Ses avantages sont certains : il offre plus de transparence, une meilleure visibilité, il est plus facile à comprendre, il « endogénéise » le facteur de l'espérance de vie et établit un lien direct entre la période travaillée et le montant de la retraite. Il a toutefois un défaut majeur, celui d'être très éloigné du système actuel et donc de rendre obligatoire, s'il était choisi, la programmation d'une longue période de transition. En outre, une telle réforme systémique ne résoudrait en rien le problème de l'équilibrage financier des comptes, ce qui est pourtant le principal problème aujourd'hui.
En 1999 déjà, il avait été estimé trop difficile de mener de front les deux réformes ; il avait donc été préconisé de commencer par un rééquilibrage des comptes, ce qu'a fait la loi Fillon, puis d'envisager, le cas échéant, une réforme de plus grande envergure, à caractère structurel. La question se pose pratiquement dans les mêmes termes aujourd'hui ; la mise en place d'une réforme telle que celle des comptes notionnels nécessiterait le déploiement d'une énergie considérable.