Intervention de Christophe Jacquinet

Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale — Réunion du 12 février 2013 : 1ère réunion
Audition de M. Christophe Jacquinet président du collège des directeurs généraux des agences régionales de santé ars directeur général de l'ars rhône-alpes

Christophe Jacquinet, président du collège des directeurs généraux des agences régionales de santé (ARS), directeur général de l'ARS Rhône-Alpes :

En tant que directeur général d'ARS, je reçois de très nombreuses demandes qui émanent à la fois des élus et des professionnels de santé. Un bon directeur général d'ARS doit être capable de trouver le bon dispositif pour écouter tous ces acteurs, même s'il ne peut pas répondre à toutes leurs demandes. Il doit aussi pouvoir donner aux élus des éléments qui leur permettent d'expliquer la politique de santé que nous menons, dans un contexte où les attentes adressées au système de santé sont très fortes et vont en s'amplifiant.

S'agissant des marges de manoeuvre financières au niveau régional, il existe entre les enveloppes sanitaire et médico-sociale une fongibilité asymétrique au profit du secteur médico-social et de la prévention. Cette fongibilité s'effectue sur des opérations de conversion spécifiques et ponctuelles à la demande d'un directeur général d'ARS. Il ne lui est pas possible de transférer une enveloppe globale d'un secteur à l'autre. Une réflexion émergente chez les directeurs généraux d'ARS propose que soient renforcées les possibilités de fongibilité en dehors du FIR et donc l'autonomie des ARS. Cela permettrait de faire de la fongibilité au profit par exemple du secteur médico-social, ou bien en direction des soins de premier recours, qui sont au coeur de la coordination des parcours de santé, ou encore pour la prévention et l'éducation thérapeutique, qui sont actuellement les parents pauvres de notre politique.

Le dialogue avec les professionnels de santé a beaucoup progressé avec la mise en place des dix unions régionales de professionnels de santé (URPS) prévues par la loi HPST. L'existence d'un système de représentation des professionnels de santé est un enjeu considérable : on compte en effet 16 000 professionnels de santé libéraux dans la région Rhône-Alpes, mais ce constat vaut pour l'ensemble des régions. Deux difficultés doivent être mentionnées : la représentation de l'ensemble des professionnels de santé sous forme de fédérations régionales, qui n'est pas encore mise en place ; la question de la gouvernance locale et nationale entre l'assurance maladie, qui gère la convention avec les professionnels de santé, l'Etat et les ARS. C'est le coeur de la future réflexion sur la stratégie nationale de santé. Alors que les ARH relevaient d'une logique hospitalo-centrée traditionnelle, les directeurs généraux ont dû adapter leurs compétences et celles de leurs agents pour prendre en compte les attentes des professionnels de santé libéraux. L'évolution de la collaboration entre professionnels de santé, qui doit être promue par les ARS, est aujourd'hui un enjeu majeur dans l'objectif d'améliorer les parcours de santé des patients.

Cela m'amène à la question de la désertification, puisque celle-ci concerne en particulier les professionnels de santé en médecine générale. Un très grand nombre des recommandations préconisées par le rapport d'information du Sénat consacré aux déserts médicaux sont proches de celles qui figurent dans le pacte territoire-santé qui a été engagé le 13 décembre dernier par la ministre des affaires sociales et de la santé. L'une des mesures préconisées, la généralisation de la régulation de l'installation des professionnels de santé, fait cependant débat et ne figure pas dans le pacte.

Je peux comprendre que la question de la liberté d'installation se pose, puisqu'il est très difficile de faire venir des jeunes médecins dans des territoires isolés. Je considère cependant à titre personnel que les conditions ne sont pas réunies pour négocier une régulation de l'installation en médecine générale. Nous sommes aujourd'hui engagés au niveau régional avec l'ensemble des acteurs, les conseils généraux et régionaux, l'assurance-maladie, les URPS, les conseils de l'ordre, pour développer les douze mesures du pacte territoire-santé. Nous voulons montrer que l'on peut organiser le système différemment, notamment dans la direction de la collaboration entre professionnels de santé.

Cette évolution est aujourd'hui une nécessité, puisque des rapports montrent que nous allons perdre, entre 2006 et 2020, près de 40 % du temps disponible en médecine générale rapporté à la population de plus de soixante-cinq ans. Cette perte de temps disponible est liée au développement des maladies chroniques et au vieillissement de la population, mais aussi au vieillissement des médecins eux-mêmes, à leur féminisation, à la réduction générale du temps de travail, à la diminution du nombre de médecins... Il en découlera un changement de modèle qui ne pourra se résoudre que par la modification de l'organisation entre professionnels de santé.

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