s'est déclaré défavorable à la proposition de fusionner les lois de finances et de financement de la sécurité sociale, en raison de la différence de logique à l'oeuvre dans le champ de la protection sociale et dans celui des finances publiques. L'existence de textes législatifs distincts ne fait pas obstacle, à son sens, à un suivi global de l'évolution des prélèvements obligatoires et de leur destination, ni à une gestion commune de la dette publique. Le report des déficits sur les générations futures est une très mauvaise solution. Il est nécessaire que les représentants de la nation arbitrent les objectifs de dépenses de la sécurité sociale et déterminent les moyens de respecter l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) ainsi que les conditions du respect de cet objectif.
Selon lui, les lois de financement de la sécurité sociale, dont le contenu a déjà été amélioré avec l'adoption de la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, doivent faire l'objet de modifications complémentaires. Le périmètre des comptes sociaux ne doit pas se limiter aux comptes de la sécurité sociale mais être étendu à l'ensemble des dépenses engagées pour la prise en charge de chaque risque couvert. Il a cité à cet égard l'exemple de la santé, secteur au sein duquel devraient être prises en compte les dépenses remboursées par l'assurance maladie, celles couvertes par les assureurs complémentaires, enfin celles restant à la charge des ménages. En restreignant la loi de financement de la sécurité sociale aux dépenses des régimes obligatoires d'assurance maladie, le législateur ne dispose que d'une vision partielle des dépenses du secteur.
Poursuivant sa réflexion, il a avancé l'idée d'une loi-cadre pluriannuelle destinée à fixer les évolutions des finances publiques et sociales. Un tel dispositif serait susceptible de prévenir l'intervention du comité d'alerte, d'une part, et de donner à tous les acteurs une meilleure visibilité sur les évolutions du secteur social, d'autre part. Il permettrait la prise en compte des évolutions à venir dans le champ de la protection sociale comme, par exemple, la prise en charge de la dépendance. Cet exercice pluriannuel permettrait en outre de retracer l'effort financier que la nation consacre à la prise en charge des risques sociaux ainsi que la répartition des fonds affectés à chacun de ces risques.
Abordant la question de la maîtrise des dépenses, M. Daniel Lenoir a estimé que la réforme de l'assurance maladie réalisée en 2004 se solde par un échec. En effet, la Cnam n'est pas en mesure, pour des raisons structurelles, de maîtriser l'évolution des dépenses de santé. Une réflexion sur la répartition des rôles entre les différents intervenants est indispensable afin de définir le rôle et le périmètre d'intervention des régimes obligatoires et des régimes complémentaires.
Cette absence de prise en compte de l'intégralité des dépenses de santé constitue un frein à la politique de maîtrise des dépenses de santé et conduit à des reports de charges constants du régime obligatoire vers les assureurs complémentaires et les assurés.
Cette pratique devenue courante, ainsi que l'illustrent les nouveaux transferts envisagés, sans concertation, dans le cadre du plan de redressement établi par la Cnam à la suite de la notification du comité d'alerte, ne constitue pas une politique satisfaisante. La question de la maîtrise des dépenses intéresse tout autant les régimes obligatoires que les régimes complémentaires. Pour compléter sa démonstration, M. Daniel Lenoir a souligné que la mise en oeuvre d'une nouvelle politique de prise en charge de la dépendance doit également constituer un espace de collaboration entre les régimes obligatoires et complémentaires.
Une telle collaboration trace les contours d'une nouvelle gouvernance du système de santé au sein de laquelle il conviendra de s'interroger sur la place et le rôle des partenaires sociaux. Les valeurs et le rôle de la sécurité sociale ont évolué depuis 1945. L'assurance maladie, pour ne prendre que cet exemple, est devenue un régime universel qui n'a plus vocation à relever uniquement d'une gestion paritaire.
Il a observé que rien ne s'oppose à ce que désormais la gestion de l'assurance maladie soit assurée par des organismes disposant d'une véritable autonomie de gestion, notamment en matière de détermination du périmètre de soins non remboursables. Selon lui, une telle agence, dotée d'un conseil de surveillance, obtiendrait des résultats supérieurs en matière de maîtrise des dépenses. Il a rappelé qu'avec la création de la Haute Autorité de santé les opérateurs de l'assurance maladie disposent d'un outil pour contribuer à l'évaluation de la valeur médicale des actes et prestations remboursables.
Il a insisté sur la nécessité de distinguer les biens et services qui doivent être pris en charge par la solidarité nationale de ceux qui relèvent de prises en charge non obligatoires mais peuvent être intégrés à une prise en charge solidaire assurée par les organismes complémentaires. Dans un tel schéma, l'offre commerciale des assureurs complémentaires doit pouvoir se diversifier tout en étant encadrée par les pouvoirs publics par le recours aux incitations fiscales.
Concernant le financement de la protection sociale, M. Daniel Lenoir a considéré que la fiscalisation des recettes de la sécurité sociale est un mouvement irréversible ainsi que l'illustre le débat sur le transfert des cotisations patronales vers une cotisation assise sur la valeur ajoutée. Cette évolution ne soulève aucune difficulté dans le cadre de l'assurance maladie qui est devenue une prestation universelle. La situation est différente dans la branche retraite dont le financement doit demeurer associé à l'activité professionnelle tandis que dans tous les cas la dimension contributive doit être préservée.
Dans ce contexte, les Français ne sont pas prioritairement intéressés par la distinction juridique existant entre une cotisation et une taxe mais bien par l'affectation des recettes aux différents risques couverts par la sécurité sociale. L'objectif des acteurs de la sécurité sociale doit être de rendre totalement transparentes les conditions de son financement et le coût de ses différentes prestations.