Je dois d'emblée souligner la limite des informations que je pourrai vous apporter puisqu'elles datent d'il y a un an et n'intègrent donc pas les changements qui ont pu avoir lieu depuis. La commission que je préside avait d'ailleurs recommandé que l'actualisation des données disponibles ne soit pas strictement limitée à la périodicité de trois ans imposée par la loi. Mais il est vrai qu'une actualisation au fil de l'eau mobiliserait beaucoup de moyens pour réunir les experts pendant trois mois, ce que l'administration n'est pas toujours à même de faire.
Il faut également souligner que l'évaluation conduite par la commission est extrêmement empirique. La fourchette d'évaluation de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles est approximative. Mais la méthode adoptée, celle de la fraction attribuable de risque, s'avère être la seule possible. Nous sommes très dépendants des études épidémiologiques pathologie par pathologie et s'il n'en existe pas, nous ne pouvons évaluer le coût de la sous-déclaration et nous ne le prenons pas en compte.
Heureusement, les pathologies ayant fait l'objet de telles études sont de loin les plus coûteuses pour la sécurité sociale, notamment le cancer et les troubles musculo-squelettiques (TMS). Néanmoins nous manquons cruellement de données dans certains domaines comme les risques psycho-sociaux. Leur coût potentiel est énorme mais nous n'avons pas les moyens de l'établir.
Vous avez souligné l'opposition des organisations patronales aux travaux de la commission. Celle-ci m'a semblé néanmoins moins marquée en 2011 qu'auparavant. Par le passé, le Medef a pu écrire que puisqu'il n'y avait pas de chiffre certain de la sous-déclaration, il fallait considérer qu'il n'y avait pas de coût. Je pense qu'il ne le ferait plus aujourd'hui. Les critiques techniques formulées en 2008 par le Medef et la CGPME quant à la méthode suivie par la commission s'étaient d'ailleurs révélées peu fondées, car elles avaient déjà été prises en compte lors du travail des experts.
Reste la critique du concept de fraction attribuable lui-même. Celle-ci peut être fondée mais il n'existe pas de meilleure solution pour évaluer la sous-déclaration.
Je pense que les critiques ont été moins violentes en 2011 en partie à cause de la faible évolution de la fourchette d'évaluation. Il n'y a pas eu, comme en 2008, de changement de champ de l'assiette d'évaluation car les progrès de l'épidémiologie ont été faibles. En 2008, nous avions pu inclure l'évaluation des maladies pneumologiques, ce qui avait entraîné une hausse importante du coût estimé.
Il convient également de noter que le Parlement, sur proposition du Gouvernement, a fait effectuer un saut au montant du transfert à la branche maladie après 2008. Avant cette date le transfert à charge de la branche AT-MP était inférieur au bas de la fourchette établie par la commission. Depuis il se situe au milieu de celle-ci.