Intervention de Éric Bocquet

Réunion du 27 avril 2016 à 14h30
Projet de programme de stabilité

Photo de Éric BocquetÉric Bocquet :

Même si la France ne connaît plus, pour le moment, la stagnation économique qu’elle a connue des années 2008 à 2012, son taux de croissance ne s’est élevé qu’à 1, 2 % en 2015. Ce taux est largement insuffisant pour améliorer durablement et profondément une situation de l’emploi dégradée de longue date par la recherche épuisante de l’allégement du coût du travail et l’extension de la précarité.

À la fin de l’année 2015, la dette des pays de la zone euro atteignait 93, 7 % du produit intérieur brut. Quoi qu’on puisse dire de la comparaison toujours hasardeuse entre un stock – la dette – et un flux – la production mesurée par le PIB –, ce n’est pas là la meilleure preuve de l’efficacité des choix budgétaires d’austérité imposés aux États et aux peuples européens.

Quant aux réformes structurelles prétendument inévitables, elles ne font que remettre en cause les droits sociaux collectifs et développer plus encore la précarité.

Le Royaume-Uni compterait-il moins de chômeurs que la France ? Regardons-y de plus près. Avec des contrats de travail de zéro heure, c’est somme toute assez facile ! Nous ne voulons pas importer en France le modèle néolibéral ainsi imposé aux salariés de ce pays.

Je dispose de peu de temps dans ce débat, mais comment ne pas relever que l’atonie de l’activité économique en Europe se produit alors même que plusieurs conditions sont réunies pour qu’il en soit tout autrement ?

La parité de l’euro vis-à-vis du dollar se dégrade, rendant a priori moins coûteuses les exportations de l’Union européenne et plus cher l’achat des produits des États-Unis.

Le niveau des prix du pétrole et de la plupart des matières premières a connu une baisse assez spectaculaire. Ce mouvement met d’ailleurs directement en cause certains pays émergents disposant d’une importante production de ces biens, comme en attestent aujourd’hui les tensions au sein du groupe des BRICS ou des pays de l’OPEP, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole.

Enfin, les taux d’intérêt sont très bas en valeur nominale. Il est même probable qu’une entreprise en développement ou un État connaissant un minimum de croissance puisse se retrouver avec un taux réel négatif.

La Banque centrale européenne, qui poursuit sa démarche de création monétaire avec le quantitative easing, ou assouplissement quantitatif, a fixé son taux directeur à zéro.

Malgré ces éléments favorables a priori – je vous renvoie au contexte des années soixante-dix ou quatre-vingt pour mesurer la différence –, les économies européennes demeurent relativement peu actives, et seuls les pays ayant connu les « plongeons » les plus spectaculaires entre 2008 et 2010 ont des taux de croissance élevés.

Pour le groupe CRC, il ne fait aucun doute que ce sont les politiques d’austérité systématiquement déclinées dans tous les États de l’Union qui sont essentiellement à l’origine de ces difficultés, l’austérité bridant la demande qui fait tant défaut aujourd’hui. Les économistes s’accordent sur ce point.

L’amélioration apparente des comptes publics observée en France en 2015 s’explique par la chute de l’investissement public, notamment des collectivités locales, comme cela est régulièrement rappelé lors de nos débats dans cette assemblée.

Alors même qu’il nous faut relever les défis de la transition énergétique, de la mise à niveau de nos infrastructures et de nos équipements, de la réalisation de projets structurants, les élus locaux ont passé l’année à rechercher des économies de fonctionnement, à repousser le lancement de certains investissements pourtant nécessaires et à envisager de se regrouper en communes nouvelles pour « limiter la casse », au moins temporairement.

Redonner aux collectivités locales les moyens dont elles ont été privées par le pacte de stabilité et de croissance est selon nous l’une des priorités du temps, ne serait-ce que pour réenclencher un cycle vertueux de dépenses publiques, créatrices d’emplois elles aussi.

Il convient également de s’interroger sur la pertinence des choix opérés.

Quand on constate que 17 milliards d’euros annuels de CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, ont abouti in fine à la création de 82 500 emplois, …

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