Intervention de Axelle Lemaire

Réunion du 27 avril 2016 à 14h30
République numérique — Articles additionnels après l'article 12

Axelle Lemaire, secrétaire d'État :

Je partage l’avis du rapporteur, tout en défendant, peut-être, une position plus nuancée.

S’il s’agit bien de lutter contre la « mal-inscription », voire contre la non-inscription sur les listes électorales, l’objectif est tout à fait compréhensible et le Gouvernement le partage. Effectivement, beaucoup de nos concitoyens ne savent simplement pas sur quelle liste électorale ils sont inscrits et, de surcroît, l’information est très difficile à obtenir.

Dès lors, pourquoi exprimer des réserves ?

Les raisons sont tout d’abord d’ordre juridique.

Les dispositions relatives à la communication des listes électorales subordonnent cette communication des listes à tout candidat, parti politique et électeur à une condition expresse, qui, pour l’électeur, est la suivante : ne pas en faire un usage commercial. Cet ensemble juridique vise à s’assurer que les listes électorales sont bien utilisées exclusivement dans un but électoral.

Or cet amendement rendrait possibles une réutilisation et une exploitation des listes de façon beaucoup plus ouverte, sans vérification de l’identité et de la qualité de l’utilisateur, ni même de la finalité de l’usage des données. C’est là ouvrir une brèche dangereuse.

Par ailleurs, la mesure proposée dérogerait au principe d’anonymisation des bases de données administratives avant leur publication. C’est possible juridiquement, mais cela poserait de sérieuses questions quant au respect de la vie privée.

Je ne m’étendrai pas sur les difficultés pratiques engendrées par l’adoption d’un tel amendement, mais sachez, mesdames, messieurs les sénateurs, qu’aujourd'hui, un quart des communes n’utilisent pas encore de logiciels de communication dématérialisée des listes électorales aux préfectures et conservent ces listes sous des formats multiples, qu’ils soient numériques ou analogiques.

Il faut distinguer, me semble-t-il, la question de la publication des listes électorales en open data de celle de l’accès individuel à ces listes. Je pense, par exemple, au téléservice mis en place par la ville de Paris et permettant d’obtenir, en ligne, une information plus restreinte sur les inscrits.

Il est vrai que mon expérience d’élue représentant les Français de l’étranger, en plus dans une circonscription comprenant la ville de Londres, où la mobilité géographique est extrêmement forte du fait d’un marché de l’immobilier très tendu, me pousse à voir, dans cette mesure, une avancée très utile pour nos concitoyens. Mais celle-ci n’est pas exclue, puisque le ministère de l’intérieur y réfléchit, notamment dans le cadre de la création d’un répertoire électoral unique.

Je forme le souhait, ici, que cette réflexion soit poursuivie, notamment dans le cadre de l’examen des propositions de loi déposées par les députés Élisabeth Pochon et Jean-Luc Warsmann – j’ai déjà eu l’occasion de les mentionner –, dont l’objet est la rénovation des modalités d’inscription sur les listes électorales.

Nous sommes là au cœur du sujet que vous soulevez, madame Bouchoux. Je crois donc que la discussion pourra se poursuivre.

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