Intervention de André Trillard

Réunion du 12 juillet 2011 à 14h30
Accord avec les émirats arabes unis relatif à la coopération en matière de défense — Discussion et adoption définitive d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de André TrillardAndré Trillard :

Pour autant, je tiens à rappeler que ces accords de défense, signés le 26 mai 2009 à Abou Dabi, s’inscrivent également dans une logique plus large de renouvellement de partenariats de défense entre la France, le Moyen-Orient et l’Afrique. Pour preuve, le 1er mars dernier, nous avons voté des partenariats de défense avec quatre pays africains. Aussi, ces accords se substituent aux accords de coopération de 1995 signés avec la Fédération des Émirats arabes unis.

Depuis cette date, la France n’a cessé de renforcer des liens avec les Émirats arabes unis, et ce à plusieurs niveaux. Ces accords répondent donc à une longue et ancienne coopération, à la fois culturelle, économique et militaire.

Il s’agit, surtout, pour notre pays d’être présent dans une zone véritablement stratégique, tant pour la sécurité de l’Europe que pour la stabilité de tout le Moyen-Orient. Le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2008 a clairement identifié cette zone parmi les plus « critiques ». D’ailleurs, les Britanniques et les Américains l’ont compris et ont passé des accords de défense avec ces pays.

Alors, pour un pays membre du Conseil de sécurité de l’ONU, il n’est plus concevable de se satisfaire d’accords datant de plus de quinze ans et de se contenter d’une présence presque en dilettante dans l’une des zones les plus stratégiques de la planète, qui a connu de nombreux bouleversements.

Faut-il rappeler que le Golfe persique est en proie à de multiples et constantes instabilités ? Entre 1980 et aujourd’hui, la guerre Iran-Irak, le conflit au Koweït, en Irak, puis la nucléarisation de la région du fait de la course iranienne à l’atome militaire n’ont cessé de nous démontrer que la paix mondiale dépendait de cette zone.

À l’heure où la France est l’un des premiers contributeurs financiers et humains au sein des opérations de maintien de la paix, il n’est pas logique que seuls les Américains disposent d’une véritable base militaire dans la région.

Beaucoup d’entre nous s’émeuvent ici que notre pays n’ait pas les moyens géographiques de sa projection opérationnelle. Ces accords et l’implantation militaire française aux Émirats arabes unis représentent une formidable opportunité. Il s’agit d’être cohérent avec notre politique d’intervention à l’extérieur de nos frontières et, surtout, d’en améliorer les conditions.

Par ailleurs, à l’heure où la France est l’un des premiers acteurs de la lutte contre la piraterie internationale, notre présence aux abords du détroit d’Ormuz, où transite l’essentiel des approvisionnements en hydrocarbures, est plus que cohérente.

Le 22 décembre dernier, nous avons voté le projet de loi relatif à la lutte contre la piraterie et à l’exercice des pouvoirs de police de l’État en mer, afin de sécuriser les espaces maritimes où s’effectuent 90 % du transport mondial de marchandises. Si ce texte instaure un cadre juridique pour nos interventions contre les pirates, il demeure nécessaire de pouvoir bénéficier d’un point d’ancrage au sens propre du terme, en particulier à un moment où la protection des approvisionnements énergétiques participe à la préservation de nos intérêts vitaux. Je vous renvoie à l’excellent rapport de MM. Dulait et Boutant, qui ont pu constater que la base IMFEAU, l’implantation militaire française aux Émirats arabes unis, jouait un rôle essentiel dans l’opération Atalante.

Certains s’inquiètent de la spécificité de ces accords. Il est vrai que ceux-ci se distinguent par la force de l’engagement de la France en cas de menace ou d’agression contre l’un des Émirats arabes unis par un pays tiers. Ils sont pourtant à la mesure de nos relations avec ces États. De plus, je tiens à rappeler que ces pays participent à des opérations avec l’OTAN – je pense au Qatar en Libye – et que, à un moment où les cartes sont redistribuées dans tout le Moyen-Orient, ces partenariats bilatéraux ont une importance primordiale.

En outre, l’implantation d’une base militaire participe à notre dissuasion. Nous nous devons d’aider ces pays qui n’ont pas les moyens humains de leur défense face à une puissance militaire telle que l’Iran, forte de 70 millions d’habitants, à un moment où son soutien au Hamas et au Hezbollah inquiète la communauté internationale.

Enfin, mes chers collègues, que voulons-nous ? Nous avons développé une véritable politique économique et de coopération technique et culturelle avec ces pays. Non seulement nos champions industriels s’y sont implantés, mais notre présence participe également au rayonnement culturel et scientifique de la France.

Pour être intervenu à l’occasion de l’examen du projet de loi relatif à l’action extérieure de l’État, je sais combien la concurrence est rude pour la France, face aux États-Unis et à la Chine, si elle veut maintenir sa présence et son influence dans le monde.

Aux Émirats arabes unis, ce sont à proprement parler de véritables labels « France » que nous sommes parvenus à exporter. L’implantation de l’université Paris-Sorbonne à Abou Dabi et la prochaine ouverture du « Louvre Abou Dabi », sont des occasions uniques pour notre pays de mettre en place une véritable politique de smart power.

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