Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, cet amendement a pour objet de garantir la possibilité, pour tous les taxis et véhicules de tourisme avec chauffeur – les VTC –, d’adhérer à la plateforme de leur choix.
Vous le savez, et cette expérience est partagée par toutes les majorités, la question des taxis et de l’évolution du marché du transport de personnes est majeure, en particulier du fait de l’arrivée de nouveaux modèles économiques, notamment les VTC.
Chacun a en mémoire les événements récents, à la suite desquels le Premier ministre a nommé un parlementaire en mission. Celui-ci a réalisé un travail de médiation qui a permis d’élaborer une feuille de route autour de quatre objectifs : le contrôle du secteur ; la formation ; le fonds de garantie qui ouvre la possibilité de racheter des licences de taxi ; la régulation et la gouvernance.
L’amendement n° 602 vise à mettre en place l’une des mesures de cette feuille de route en matière de régulation économique : la fin des clauses d’exclusivité imposées par certaines plateformes de mise en relation.
L’enjeu est considérable. En ce qui concerne les taxis, la situation actuelle, qui découle de l’histoire et de la pratique, est celle d’un système de centrales quasi oligopolistique : ainsi, la presque totalité des taxis parisiens est affiliée à seulement deux plateformes.
Cette situation s’explique principalement par le fait que les contrats empêchent ces taxis d’adhérer à une autre plateforme. D’ailleurs, rien ne l’interdit et tout est régulier de ce point de vue.
Cela pose évidemment des difficultés sur le plan pratique. Les VTC et les taxis ont, pour partie, une activité en commun, concurrente : les taxis ont un monopole, celui de la maraude, mais pour le reste, notamment ce qui est lié aux plateformes, ils ont la même activité que les VTC.
Or, aujourd’hui, les plateformes de VTC sont plus réactives, notamment avec le développement d’algorithmes qui permettent de répondre plus rapidement ou avec la possibilité de faire appel à plusieurs d’entre elles pour rentabiliser l’activité. A contrario, les taxis sont, d’un certain point de vue, enfermés dans une relation avec leurs plateformes ; cette relation a sa logique, mais elle obéit aussi aux règles d’un autre âge, celui où il n’y avait pas, dans ce secteur, d’autres acteurs et concurrents.
En tout état de cause, il nous faut apporter des réponses à la crise actuelle des taxis.
J’ai donné un certain nombre de pistes, par exemple l’indemnisation, mais en ce qui concerne l’exclusivité, il est nécessaire d’apporter rapidement une réponse. Cela correspond d’ailleurs aux avis donnés par l’Autorité de la concurrence, le Conseil d’État et le Conseil constitutionnel, pour lesquels il n’existe pas d’obstacle juridique à ce qu’un taxi puisse avoir recours à plusieurs plateformes. Il s’agit non pas de créer une obligation, mais d’ouvrir une possibilité, afin de rétablir une forme d’égalité sur un marché qui obéit, aujourd’hui, à des règles nouvelles.
Au fond, cet amendement tend à prendre acte de la situation actuelle et à rétablir les conditions de la concurrence, sans rien enlever au modèle nouveau que constituent les VTC. Il vise à donner aux taxis une faculté et ne devrait, je pense, heurter personne sur le plan politique.
Il nous faut ensemble – le Gouvernement s’y emploie, dans un contexte, il est vrai, difficile – conjuguer l’ancien et le nouveau modèle, en garantissant les droits de chacun et sans léser personne.
Cette réponse, qui s’inscrit dans un ensemble plus vaste et dans une vision de moyen et long terme, est indispensable pour que les taxis, qui ont, en quelque sorte, subi l’arrivée d’un nouveau modèle, puissent retrouver un équilibre.
Si nous ne permettons pas à tous les acteurs du marché, aussi bien les taxis que les VTC, d’adhérer à la plateforme de leur choix ou d’avoir affaire à plusieurs plateformes, alors toutes les autres réformes n’auront aucun sens. Nous aurions en effet organisé une simple coexistence entre mondes ancien et nouveau, alors que nous voulons, plutôt, les rapprocher et permettre à chacun d’exercer son activité dans des conditions de libre concurrence.
Les événements que j’ai mentionnés sont récents. Il a ensuite fallu élaborer la feuille de route et je sais que, du point de vue des parlementaires, tout cela est un peu tardif.