Intervention de Catherine Deroche

Réunion du 28 avril 2016 à 15h00
République numérique — Article 43, amendement 57

Photo de Catherine DerocheCatherine Deroche :

Si vous me le permettez, madame la présidente, je défendrai en même temps cet amendement et l’amendement n° 57 rectifié ter.

L’article 43 a pour objet de développer et de généraliser l’accès des personnes sourdes et malentendantes aux services téléphoniques, ce dont on ne peut que se féliciter.

Sa rédaction initiale prévoyait une répartition de la charge de l’accessibilité entre trois types d’acteurs : les services publics, les entreprises et les opérateurs de télécommunications. À la suite de ses travaux, l’Assemblée nationale avait étendu le champ de cette obligation d’accessibilité à l’ensemble des acteurs économiques du secteur privé en abandonnant toute considération relative au chiffre d’affaires ou à la taille de l’acteur économique concerné.

Il apparaît en effet que les entreprises de petite taille peuvent trouver à s’abonner annuellement à des services de traduction ou de transcription simultanée de la parole pour des sommes relativement modiques, de l’ordre de 70 euros par an.

Le texte issu des travaux de la commission des lois du Sénat refond le dispositif voté par l’Assemblée nationale en instaurant une réponse unique en matière d’accès aux services téléphoniques, par la création d’un centre relais téléphonique universel national.

À nos yeux, une telle solution pourrait contrevenir au principe de libre concurrence garanti par les traités de l’Union européenne, alors qu’un secteur économique innovant se développe et permet déjà d’offrir aux professionnels une accessibilité à un coût réduit. Par ailleurs, la jurisprudence constante de la Cour de justice de l’Union européenne interdit le financement par des opérateurs de communications électroniques d’activités qui ne relèvent pas de la stricte mise en œuvre des autorisations générales.

Il est vrai que, par son amendement n° 614 rectifié, qui fait l’objet d’un sous-amendement de la commission, le Gouvernement propose d’en revenir à la rédaction initiale du projet de loi et à répartir la charge de l’accessibilité. Néanmoins, cet amendement du Gouvernement, même ainsi sous-amendé, présente un certain nombre de faiblesses : il revient tout d’abord sur la généralisation de l’obligation d’accessibilité à l’ensemble des acteurs économiques en réintroduisant un critère de chiffre d’affaires et en limitant l’obligation professionnelle des entreprises disposant déjà d’un numéro de service clients ; il enserre encore l’accessibilité des personnes sourdes pour leurs besoins interpersonnels dans un cadre contraint, puisqu’il est fait mention d’un « usage raisonnable », ce qui heurte le principe même de non-discrimination ; enfin, il institue un groupement interprofessionnel dont la composition comme les missions exactes restent encore imprécises.

C’est la raison pour laquelle nous présentons ces deux amendements, dont le dispositif permet, sans création de charges nouvelles, de respecter l’esprit de la loi de 2005, de réaffirmer l’obligation intransférable d’accessibilité dont la charge doit être équitablement partagée entre État, collectivités, entreprises ou associations relevant des secteurs public et privé et acteurs de la filière professionnelle de transcription et de traduction simultanée de la parole, qui sont, dans nos amendements, substitués aux opérateurs de communications électroniques, de soutenir le développement d’une offre concurrentielle garante de la qualité de service par la filière existante tout en sécurisant un secteur économique innovant, de sécuriser un secteur économique français en plein développement et de permettre, ce faisant, le développement harmonieux d’une accessibilité complète pour les publics concernés, tant pour la prise de rendez-vous par téléphone que lors d’un rendez-vous, et d’adapter les délais d’entrée en vigueur des dispositions.

Les différences entre l’amendement n° 56 rectifié ter et l’amendement n° 57 rectifié ter portent sur le seul III de l’article 43 : le premier prévoit de charger la seule filière des professionnels de la transcription et de la traduction simultanée de la parole d’offrir aux personnes sourdes un accès direct pour leurs besoins interpersonnels pour un prix n’excédant pas le tiers du montant mensuel de la prestation de compensation du handicap ; le second, quant à lui, prévoit la création par le groupement interprofessionnel d’un centre relais téléphonique pour permettre aux publics concernés l’accès au service téléphonique, également pour leurs besoins interpersonnels.

Dans un cas comme dans l’autre, l’accès au service pour les besoins interpersonnels de la personne handicapée n’est pas limité, contrairement à ce que prévoit l’amendement du Gouvernement, même sous-amendé.

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