Intervention de Axelle Lemaire

Réunion du 2 mai 2016 à 15h30
République numérique — Article additionnel avant l'article 40 AA

Axelle Lemaire, secrétaire d'État :

Je vous remercie, madame Garriaud-Maylam, d’avoir appelé mon attention sur cette question, car, grâce à vous, j’ai débroussaillé l’état du droit pour en comprendre les tenants et aboutissants.

Je vous confirme l’engagement du Gouvernement pour accompagner l’essor de la langue et de la culture françaises à l’étranger, qui suppose, bien entendu, la disponibilité des livres numériques pour les acheteurs situés à l’étranger. Cette disponibilité, importante d’un point de vue commercial pour les éditeurs français, l’est aussi du point de vue culturel pour le rayonnement de la francophonie, les acheteurs dont il est question n’étant pas seulement français, mais également francophones ; elle est essentielle aussi pour les familles qui souhaitent accéder à des contenus littéraires en français depuis l’étranger, notamment pour leurs enfants.

À la suite des premières questions posées au Gouvernement sur ce sujet, un groupe de travail a été mis en place au sein du ministère de la culture, destiné à identifier les freins à une meilleure diffusion des livres français à l’étranger.

Par ailleurs, le Bureau international de l’édition française a établi à la fin de 2015 un rapport, que je vous invite à consulter, dont il ressort que les obstacles à la disponibilité des livres en français sont peu liés à la question des droits d’auteur, dans la mesure où la plupart des éditeurs français disposent de droits d’exploitation mondiaux ; voilà donc une difficulté qui ne se pose pas. Ce rapport fait apparaître que les axes d’amélioration concernent surtout les pratiques commerciales des opérateurs de vente ou de revente, des intermédiaires que sont les plateformes numériques : du fait de leurs systèmes d’information, ceux-ci ont parfois des difficultés à gérer des transactions à distance de livres électroniques réalisées depuis l’étranger au moyen de cartes bancaires étrangères, parce qu’ils sont tenus de collecter la TVA sur le territoire français. À la vérité, les difficultés sont donc surtout d’ordre technique et opérationnel, liées à la collecte de la TVA.

Il semble que rien dans la législation actuelle ne limite la vente de livres numériques depuis l’étranger à l’étranger. Il n’y a donc pas de contrariété entre le droit français et la directive européenne applicable dans ce domaine. Au reste, vous expliquez vous-même, dans l’objet de votre amendement, que les freins sont d’ordre commercial. C’est aussi ce que je constate : il existe aujourd’hui plusieurs start-up qui, au moyen des outils numériques, vendent des livres numériques français à l’étranger, par exemple, Feedbooks.

Madame la sénatrice, vous proposez de modifier l’article 3 de la loi du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique, afin que celle-ci soit rendue applicable à l’étranger. Cette opération reviendrait à appliquer le prix unique du livre à des acheteurs situés à l’étranger, donc à donner à une législation franco-française une application mondiale. Vous comprendrez que la territorialité de la loi française s’y oppose, d’autant qu’il ne s’agit pas d’une disposition d’ordre public. De fait, l’acheteur situé à l’étranger comme la plateforme, qui, elle aussi, peut être domiciliée à l’étranger ou de nationalité étrangère, n’ont pas forcément de liens directs avec le territoire national.

À ce stade, je suggère que le Gouvernement poursuive son engagement résolu à Bruxelles en ce qui concerne la directive relative au droit d’auteur, en vue de lever les obstacles qui continuent de se manifester sous la forme du geoblocking. Je suis convaincue que cette action, inscrite à l’agenda prioritaire de la Commission européenne, permettra de débloquer les freins que vous déplorez.

En outre, je continuerai, avec la ministre de la culture, à accompagner les éditeurs, car il s’agit principalement, je crois, de leur apporter une aide opérationnelle pour leur permettre d’accepter des transactions financières réalisées depuis l’étranger. Madame Garriaud-Maylam, je m’engage auprès de vous à poursuivre ce travail de concert avec ma collègue.

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