Intervention de Joëlle Garriaud-Maylam

Réunion du 2 mai 2016 à 15h30
République numérique — Article additionnel avant l'article 40 AA

Photo de Joëlle Garriaud-MaylamJoëlle Garriaud-Maylam :

Je remercie Mme la secrétaire d’État pour ses propos, qui prouvent qu’elle a compris l’enjeu de la disposition que je propose, mais je tiens à revenir sur les obstacles qui ont été évoqués.

Mon amendement vise la portabilité des services de contenu en ligne, en l’occurrence des livres numériques. Le fait est que la plupart des éditeurs refusent les achats réalisés depuis une adresse IP localisée à l’étranger ou ne permettent le paiement qu’avec une carte bancaire française.

Voilà des années que je soulève le problème au Sénat, par le biais tant de questions écrites et orales que d’amendements d’appel. Ainsi, comme Mme la rapporteur pour avis l’a rappelé, j’ai présenté en 2014 un amendement d’appel ayant le même objet que celui-ci, avant de le retirer. Aujourd’hui, je crois qu’il est temps d’aller au-delà des déclarations de bonnes intentions et de remplir vraiment notre rôle de législateur.

Mes chers collègues, il s’agit d’un sujet de très grande importance, non seulement pour les Français de l’étranger, mais aussi pour tous les francophones et francophiles du monde. Il faut tout de même rappeler que nombre de pays ne disposent pas de la moindre librairie française, même des pays francophones comme Madagascar ! Sans parler des pays anglophones, où l’on ne peut même pas avoir accès à un livre en français sur une plateforme numérique.

Cette situation, discriminatoire envers les Français de l’étranger, contrevient aux principes fondamentaux de notre droit, ainsi que du droit européen ; à cet égard, je rappelle que la directive européenne 2006/123/CE interdit, en son article 20, les discriminations fondées sur la nationalité ou sur le lieu de résidence au sein du marché intérieur européen. Elle est aussi aberrante par rapport à la notion d’exception culturelle française et totalement contradictoire avec nos ambitions en matière de développement de la francophonie : comment prétendre au marché de 700 millions de francophones à l’horizon de 2050 si nous ne sommes pas même capables d’offrir aux enfants francophones, ou qui souhaiteraient le devenir, la possibilité de lire des livres en français ?

Les arguments qui m’ont été opposés me semblent peu recevables. En particulier, on m’objecte que la demande de livres numériques en français serait faible sur les plateformes : comment en serait-il autrement, puisque, précisément, les Français et les francophones savent qu’ils ne peuvent pas acheter de livres en français par ce moyen ?

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