Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans un rapport de 2014 intitulé Tourisme et développement durable en France, le Conseil économique, social et environnemental, le CESE, affirmait que la très grande diversité de richesses en France contribuait à faire de notre pays la première destination au monde pour les touristes, avec 84, 7 millions d’arrivées en 2013. Son poids économique représente 7, 3 % de notre PI, avec plus de 230 000 entreprises travaillant dans ce secteur, pour un effectif salarié de plus de 1 million d’emplois en équivalent temps plein. C’est dire à quel point le tourisme connaît aujourd’hui un essor continu dans la croissance mondiale, jusqu’à se substituer parfois aux secteurs d’activités traditionnels et à prendre la place de moteur de l’économie.
C’est le cas dans certaines économies ultramarines où le secteur touristique représente un levier important de croissance et une source déterminante d’activité. Dans mon territoire, à Saint-Martin, il mobilise près de 30 % des effectifs salariés déclarés. Pour autant, ce secteur décisif est confronté au dynamisme croissant des destinations concurrentes, par exemple Cuba ou la République dominicaine.
Alors que le secteur touristique est en léger recul dans nos territoires, il progresse dans les îles alentour, principalement du fait de nombreux avantages de compétitivité.
L’exemple de Saint-Martin est symptomatique de ce phénomène : l’absence d’infrastructures portuaires et aéroportuaires adaptées à l’accueil des touristes limite les capacités d’accueil des visiteurs dans la partie française de Saint-Martin, au profit de la partie néerlandaise. Je citerai un seul chiffre : nous accueillons quelques dizaines de milliers de visiteurs seulement, contre 2 millions pour les seuls croisiéristes.
Ce déficit d’infrastructures, s’il n’explique pas à lui seul notre faible compétitivité, en est cependant un facteur aggravant. Dans les territoires français, s’y ajoutent des charges d’exploitation plus élevées dues au coût du travail, à une législation complexe et contraignante pour les investisseurs potentiels ou encore, dans notre région, à une parité de change euro-dollar souvent défavorable.
Dans ce contexte économique difficile, les pouvoirs publics ont pour rôle – voire, de mon point de vue, pour obligation – d’assurer un environnement propice au développement touristique de leur territoire. Cette mission peut se décliner sous plusieurs formes. En matière d’aménagement du territoire, il s’agit d’abord de mettre en œuvre des politiques d’infrastructures et de transports en phase avec nos ambitions en matière de tourisme. Il est également du rôle des pouvoirs locaux de s’assurer que le système normatif soit favorable aux investissements privés.
Ces missions fondamentales des collectivités participent à l’attractivité du territoire et constituent ainsi une condition préalable à la définition d’une politique touristique performante.
Depuis notre accession au statut de collectivité d’outre-mer, en 2007, la collectivité territoriale de Saint-Martin est pleinement compétente en la matière. Nos interventions s’organisent autour d’une volonté de soutien aux entreprises et d’orientation du tourisme de demain, notamment au travers du document de planification stratégique du tourisme de Saint-Martin, élaboré par la direction de la stratégie et mis en œuvre par l’office du tourisme.
L’action de la collectivité se décline donc sous plusieurs formes.
La promotion du patrimoine et de l’offre touristique est assurée internationalement sur l’ensemble des salons spécialisés, avec une présence permanente à Paris et à New York, et souvent en collaboration avec des acteurs privés locaux, tels que les associations des hôteliers, des restaurateurs, des chauffeurs de taxi ou les acteurs du nautisme.
La mise en place d’un module « tourisme » dans les collèges et lycées est une démarche novatrice visant à impliquer les enseignants dans la promotion du tourisme local. Nous avons mis en place et organisé, en partenariat avec l’éducation nationale, une formation intitulée « Enseigner le tourisme à Saint-Martin ». Au vu de l’enthousiasme manifesté par les enseignants de l’île, l’initiative mériterait, monsieur le ministre, d’être reproduite dans d’autres territoires.
En matière de fiscalité, la collectivité de Saint-Martin a déployé de multiples avantages destinés à inciter à l’investissement productif dans le secteur du tourisme. Des dispositifs de défiscalisation et d’exonération de charges ont également été instaurés au niveau national.
De même, au niveau local, des aides à la rénovation et à la mise aux normes pour les petites structures et les guest houses ont été introduites. La collectivité s’est également attachée à personnaliser sa communication à l’égard des investisseurs, notamment au travers de la brochure « Investir à Saint-Martin ». La recherche de solutions fiscales innovantes vise à ne pas reproduire les erreurs des politiques de défiscalisation amorcées dans les années quatre-vingt, qui ont mené à une privatisation de la quasi-totalité du parc hôtelier et ont rendu difficile l’accès à certaines plages.
En outre, l’action publique en matière sociale constitue, bien qu’indirectement, un levier des politiques de soutien au secteur touristique. Je le rappelle, nos outre-mer doivent régulièrement faire face à divers défis liés au coût de la vie, aux aléas climatiques, à l’insécurité ou encore à des épidémies telles que le chikungunya, le virus zika ou la dengue. Ces défis sociaux ont une incidence forte sur le dynamisme touristique et appellent à une réactivité immédiate de l’État et des collectivités.
Malgré toutes les difficultés énumérées, les chiffres montrent que le secteur touristique a connu une embellie importante en 2015. Pour autant, de nouvelles initiatives des pouvoirs locaux sont toujours souhaitables, en particulier pour l’amélioration du réseau routier, du cadre de vie ou de la desserte.
Plus encore, il est de notre responsabilité d’orienter notre politique touristique vers des activités de niche qui augmenteraient notre compétitivité.