Intervention de Hervé Maurey

Réunion du 10 mai 2016 à 14h30
Reconquête de la biodiversité de la nature et des paysages — Discussion en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Hervé MaureyHervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord de saluer une nouvelle fois le travail exceptionnel mené par Jérôme Bignon, ainsi que son engagement et son implication sur ce texte qui lui doit beaucoup.

Je voudrais aussi me féliciter de l’excellente collaboration de notre commission avec la commission des lois pour élaborer le dispositif qui vous est proposé sur la réparation du préjudice écologique.

Nous avions, en effet, introduit en première lecture dans ce projet de loi les dispositions de la proposition de loi adoptée il y a trois ans sur l’initiative de Bruno Retailleau. Nous étions convenus de la nécessité d’améliorer ce texte entre les deux lectures. Nous avons souhaité que ce travail soit effectué en collaboration étroite avec la commission des lois. C’est un bon exemple de travail en commun, et je remercie le président de la commission, Philippe Bas, et le rapporteur pour avis, Alain Anziani, que François Pillet représente aujourd’hui.

Je voudrais souligner les très substantiels apports du Sénat au texte que nous examinons aujourd’hui, madame la secrétaire d’État. En effet, entre le texte initial déposé par le Gouvernement il y a maintenant un peu plus de deux ans et le texte qui résulte de nos délibérations de première lecture et des deux examens successifs par la commission que je préside, on peut incontestablement relever une différence. Celle-ci tient à l’approche du Sénat, que l’on peut caractériser d’un triple point de vue.

Première différence d’approche, le Sénat, comme toujours lorsqu’il imprime sa marque sur les projets de loi, a vraiment pris en compte la réalité économique.

Cela signifie que, tout en étant convaincus de la nécessité de préserver notre exceptionnelle biodiversité, nous n’en avons pas moins écouté celles et ceux qui sont à son contact quotidiennement, que ce soient les agriculteurs, les chasseurs, les gestionnaires d’espaces naturels ou encore nos compatriotes ultramarins, tant la richesse de la biodiversité dans nos territoires d’outre-mer est grande.

Le texte que nous avons élaboré a donc un aspect pragmatique, ancré dans la réalité économique, qui manquait au texte de l’Assemblée nationale. Cela s’est traduit directement en première lecture dans l’équilibre trouvé pour la gouvernance de la biodiversité. Je pense au conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité et à celui de l’ONCFS, à propos desquels l’Assemblée nationale nous a en très grande partie suivis.

Dans un autre ordre d’idées, la suppression par la commission de la taxe sur l’huile de palme, que l’on soit pour ou contre cette mesure, s’est exclusivement appuyée sur un impératif économique, celui du respect des règles de l’Organisation mondiale du commerce, qui interdisent de mettre en place ce type de taxation discriminatoire.

Deuxième différence d’approche avec l’Assemblée nationale : le souci permanent de la simplification. Chaque fois que cela était possible, nous avons eu à cœur de simplifier, d’alléger ou de supprimer des dispositifs excessivement complexes ou procéduriers.

Je pense par exemple à la compensation écologique. Celle-ci répond à une finalité dont nous ne remettons à aucun moment en question le caractère indispensable. Toutefois, son succès et sa bonne mise en œuvre dépendent à l’évidence de la souplesse des outils et des procédures pour les acteurs de terrain.

Est-il utile d’instituer une procédure d’agrément, inévitablement lourde et coûteuse, pour ceux qui savent faire cette compensation et qui, de toute façon, sont soumis à des contrôles ?

Je prendrai un autre exemple, que l’on a déjà évoqué, à savoir le préjudice écologique. Notre choix n’est pas d’instituer une construction juridique ultra-élaborée intellectuellement, pour nous faire plaisir. Nous avons cherché à insérer cette nouvelle responsabilité dans le droit existant et dans les procédures que connaissent les juges, à savoir celles du droit de la responsabilité dans le code civil. C’est à cette condition que la notion de préjudice écologique sera acceptée et efficace. Le Sénat a, là encore, le souci de ceux qui auront à mettre en œuvre les règles et procédures que nous votons.

Enfin, troisième différence d’approche, la confiance aux acteurs de terrain. Par exemple, quand notre commission décide de nouveau, en deuxième lecture, de supprimer les zones de protection de la biodiversité, c’est qu’elle a de bonnes raisons de le faire ! Nous sommes allés en Alsace, sur le terrain du grand hamster, à la rencontre de tous ceux qui sont concernés par cette question. Nous avons vu que, grâce au dialogue et à la concertation, on peut trouver des solutions adaptées et pragmatiques, sans avoir à les imposer brutalement de Paris. Nous croyons en la nécessité de systématiser une telle approche, en faisant confiance aux acteurs.

Vous l’avez compris, madame la secrétaire d’État, nous souhaitons que le bon sens du Sénat, qui n’a jamais remis en cause l’ambition du projet de loi, soit présent dans le texte jusqu’à son vote final. Nous comptons d’ailleurs sur vous pour porter cette exigence auprès de nos collègues députés.

En effet, nous espérons, je le dis dès à présent, que la commission mixte paritaire sera en mesure d’adopter un texte. De notre côté, il n’y a nulle volonté électoraliste et politicienne.

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