Intervention de Barbara Pompili

Réunion du 10 mai 2016 à 21h30
Reconquête de la biodiversité de la nature et des paysages — Discussion en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Barbara Pompili, secrétaire d'État :

Vous avez évoqué le développement économique et la préservation de l’environnement. La question sociale me semble aussi un aspect important. Quelqu’un l’a souligné, on oppose souvent les questions écologiques et les questions économiques. Mais le monde de l’entreprise l’a aujourd'hui compris : écologie et économie riment ensemble. Quand on veut développer l’écologie, en général, on crée du développement économique et de l’emploi, souvent non délocalisable et à forte valeur ajoutée. Bref, les perspectives de développement économique sont très intéressantes.

Vous avez aussi souligné que l’agriculture est trop souvent prise comme bouc émissaire, notamment au sujet de la surmortalité des abeilles. Je suis fermement opposée aux caricatures. Vous avez raison, ne jetons pas l’opprobre sur telle ou telle profession, qui serait responsable de tous les problèmes du monde. Les agriculteurs peuvent, dans de nombreux cas, être des alliés de la biodiversité. Beaucoup sont très sensibilisés à cette question et travaillent à sa protection. Dans certains endroits, le fait qu’il n’y ait plus d’agriculture a même fait perdre de la biodiversité. Je l’ai vu récemment sur l’île d’Ouessant, mais ce phénomène se rencontre bien sûr également sur le continent.

Sortons des caricatures, reconnaissons, ce que nul n’ignore, que le système agricole a été un choix politique, fait à la fin de la guerre 39-45 et qu’il correspond à une époque. Il s’agissait d’une période où il fallait reconstruire, nourrir des populations dans des situations de disettes, voire de famines. C’était le temps des restrictions. Cette période est absolument révolue. Souvenons-nous également qu’à cette époque les enjeux environnementaux et la préservation de la biodiversité n’étaient pas réellement pris en compte. L’état des connaissances était bien moindre.

Aujourd'hui la prise de conscience a monté en puissance, car nous ne partons pas de zéro. Nous sommes tous conscients du fait que c’est notre société qui a entraîné les agriculteurs dans un système dont nous apercevons les limites et sur lequel nous devons travailler ensemble pour qu’il bouge. Voilà pourquoi je ne rejetterai pas la responsabilité de tout cela sur les agriculteurs. C’est la société dans son ensemble qui a choisi un mode de développement, ce qui n’est pas du tout la même chose !

Mme Chantal Jouanno a parlé des deux visions de la biodiversité : d’un côté, nous faisons partie d’un tout ; de l’autre, prédomine une vision anthropocentriste. Vous avez évoqué, madame la sénatrice, les tardigrades. Je vous avoue que je ne connaissais pas cette espèce. J’ai donc grâce à vous découvert cet animal extraordinaire. Je vous quitterai ce soir encore plus riche.

Je suis d’accord avec vous : on ne peut pas élaborer une loi sur la biodiversité si on n’est pas capable de se mettre d’accord sur des principes de base. La suppression de l’objectif d’absence de perte nette et de l’objectif de non-régression entraîne une confusion sur les ambitions de cette loi. C’est un signal réellement négatif. J’espère que l’on réussira très rapidement, puisque ce point sera examiné dans quelques instants, à résoudre cette difficulté.

Vous avez dit que les débats qui ont lieu ici même n’étaient pas des débats droite-gauche, que c’était un peu plus compliqué et que sur certains points les discussions dépassaient les clivages politiques. Je suis d’accord avec vous. Même nous, au Gouvernement, nous avons eu des débats parfois très durs, notamment sur la question des néonicotinoïdes. Il n’aura échappé à personne que les points de vue du ministère de l’environnement et du ministère de l’agriculture divergeaient. Le ministère de l’agriculture abordait cette question sous l’angle des agriculteurs, qui devront gérer une potentielle interdiction. Le ministère de l’environnement partait, lui, du point de vue de la protection des pollinisateurs et de la préservation de l’avenir.

Je suis très fière de vous annoncer que, sur ce point, nous sommes parvenus à nous entendre. C’est pourquoi je suis optimiste pour la suite des travaux au Sénat. Si le ministère de l’agriculture et le ministère de l’environnement ont réussi à trouver un point d’accord et de compromis sur la question des néonicotinoïdes, tout est possible !

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