Je remercie mes collègues pour les observations et les précisions apportées à ce débat. Effectivement, il y a deux grands sujets : la territorialisation des données pays par pays et leur publicité au-delà de l'administration fiscale. Je m'interroge sur la possibilité de publicité de ces données au nom de la transparence ; ont-elles une utilité avérée pour le grand public ? Je voudrais reprendre l'interrogation d'André Gattolin sur la compétitivité, qui est un sujet important. Lors de nos auditions, nous avons eu l'exemple d'une entreprise industrielle du secteur de l'automobile opérant sur quatre produits. Si elle décidait de s'implanter dans un pays d'Europe centrale avec un seul produit en adoptant une position offensive, l'obligation de déclaration conduirait à dévoiler son taux de marge. De fait, elle serait obligée de l'abaisser dans l'ensemble des pays dans lesquels elle est présente, ce qui aurait un impact fortement négatif sur son équilibre économique. Ceci montre l'attention particulière que nous devons avoir pour avancer au même rythme que les autres.
S'agissant des seuils retenus par la proposition de loi, ils diffèrent largement de ceux retenus par l'OCDE. Le projet de l'OCDE concerne les entreprises réalisant un chiffre d'affaires supérieur à 750 millions d'euros, soit 200 groupes en France. Si nous adoptions la proposition, le seuil serait ramené à 40 millions d'euros de chiffre d'affaires et concernerait 5 000 entreprises supplémentaires, de taille plus modeste, et représenterait 5,2 millions de salariés.
Enfin, je souhaite rappeler que le souci qui semblait apparent pour les responsables des entreprises n'est pas tant l'optimisation fiscale que le souci de ne pas payer deux fois l'impôt. On a eu au moins deux exemples d'entreprises soumises à la double imposition : l'une en Pologne et en France, l'autre en Chine, concernant une grande entreprise industrielle française, qui se fait régulièrement taxer dans des provinces chinoises malgré un certain nombre d'accords. Ce débat est mené sur la scène internationale depuis au moins 2008. Les institutions internationales ont donné une impulsion, Richard Yung l'a souligné. L'Europe est en pointe et la France elle-même l'est dans le débat européen.
La territorialisation de la source de profit est un sujet connexe. On nous a indiqué que l'Europe est une zone de recherche et que certains grands pays contestent parfois qu'un produit français à l'origine, reproduit par exemple en Chine, soit le même que le produit européen et, partant, qu'aucune royaltie ne doive être versée. Lorsqu'il s'agit de biscuits fabriqués en Chine sous un autre nom, l'autorité chinoise dit que l'on n'a pas à reverser les royalties. Lorsqu'il s'agit de sac à main ou de parfum, ça devient encore plus problématique. Cette proposition de loi constitue aussi l'occasion d'évoquer cette réflexion et d'aborder ce sujet d'inquiétude pour nos entreprises.