L’argument de la vie privée me semble tout de même important, madame Bouchoux. Mais je vais y revenir.
Il est suggéré, ici, que toutes les ressources soient communiquées à l’administration fiscale, non pas uniquement les revenus.
Si je décide de mettre à la vente un objet – prenons l’exemple d’une poussette, revendue à 15 euros - et si je le revends moins cher que je ne l’ai acheté, en l’absence de gain par rapport au prix d’achat, je n’ai perçu aucune recette exigeant une déclaration à l’administration fiscale. Mais la différence ne sera absolument pas perçue puisque toutes les ressources tirées de l’utilisation de plateformes, indépendamment de l’objet des transactions, de leur volume et des gains réels qui en ont été tirés, donc sans distinction entre celles qui doivent être fiscalisées et celles qui n’ont pas à l’être, feront l’objet d’une déclaration.
Pour ce qui est du risque d’atteinte à la vie privée, un débat est ouvert aujourd’hui notamment par certaines organisations syndicales, sur le fait que la mise en œuvre de l’imposition à la source portera atteinte au respect des données personnelles des employés, alors même que les employeurs ont déjà une obligation de transmission d’informations à l’administration fiscale.
Si nous avons ce débat sur le type d’informations à transmettre pour calculer l’impôt sur le revenu – un cadre tout de même très régulé et éprouvé –, imaginez, mesdames, messieurs les sénateurs, quelle forme il prendrait s’agissant d’un dispositif concernant toutes les formes de transactions effectuées sur toutes les plateformes, indépendamment de la perception éventuelle d’une commission, du caractère fiscalisé ou pas des revenus, quel que soit le secteur d’activité, etc. Cela me paraît irréalisable, ou dangereux.
Pour répondre à votre interrogation, monsieur Sido, je n’ai pas encore vérifié s’il existait une définition juridique du terme « utilisateur ». J’espère être en mesure de vous répondre très rapidement. Mais j’espère aussi, compte tenu de l’importance de ce débat, au fond, que ce seul point n’emportera pas votre décision finale quant au vote de l’amendement.
Vous avez raison de poser la question : y a-t-il une différence entre un utilisateur, un consommateur, un usager de plateforme ? Tout dépend vraiment de la conception que l’on a de l’économie numérique.
Certains sont des consommateurs, mais pas tous ; il y a des vendeurs, des contrats de commerce, des contrats de consommation ; deux particuliers peuvent être impliqués… C’est donc volontairement que nous n’avons pas utilisé le terme « consommateur », car il emporte des conséquences juridiques différentes.
Nous n’avons pas non plus utilisé le terme « usager ». Celui-ci, tout comme le terme « administré », me satisfait lorsqu’il est employé dans le contexte des services publics. Parler d’« usagers » des plateformes me paraît erroné, la problématique étant différente.
En revanche, le terme « utilisateur » convient bien à l’économie collaborative, d’autant plus qu’il est attaché à la notion de collecte de données. Il est effectivement employé dans le domaine de l’économie de la donnée, lorsque l’on juge important que les utilisateurs aient la libre disposition de leurs données personnelles et de leurs données d’usage.
Ce qui compte en matière d’économie numérique, ce sont effectivement les usages. Cette notion d’utilisateur me paraît donc adéquate ici.