Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les événements dramatiques qui ont marqué cette année 2015 – je pense bien sûr aux attaques terroristes, mais aussi aux inondations ou encore au crash d’un avion de la compagnie Germanwings – ont démontré à quel point il est indispensable de disposer de forces de sécurité civile réactives et efficaces.
Je souhaite ainsi commencer cette présentation en rendant hommage aux forces de secours, dont la mobilisation exceptionnelle après les attentats du 13 novembre a été unanimement saluée.
Je me félicite, à ce titre, d’observer que le nombre de sapeurs-pompiers volontaires est enfin orienté à la hausse, après une décennie de baisse.
S’agissant maintenant du programme « Sécurité civile », les autorisations d’engagement et les crédits de paiement pour 2016 augmentent respectivement de 1, 9 % et 0, 8 %, avant prise en compte de l’amendement du Gouvernement.
Comme je l’ai dit en commission, ce budget me semble présenter certaines faiblesses, principalement en ce qui concerne le fonctionnement et l’investissement.
Pour ce qui est des dépenses de fonctionnement, on peut, par exemple, s’interroger sur le niveau des dotations prévues pour le retardant, les colonnes de renfort et le secours d’extrême urgence. Les crédits prévus diffèrent sensiblement des consommations réalisées au cours des derniers exercices, ce qui pourrait être le signe d’une sous-budgétisation.
Toutefois, ma principale inquiétude concerne les dépenses d’investissement. En effet, leur évolution est inférieure de 4 millions d’euros en crédits de paiement à ce qui était prévu dans la programmation annuelle, et ce avant même que l’Assemblée nationale vote, en deuxième délibération, une baisse de 5 millions d’euros des dépenses de fonctionnement et d’investissement du programme.
Après analyse, la moitié de cet écart traduit un report de certains projets d’investissement, du fait de la contrainte budgétaire. Or ces retards se traduiront à moyen terme par des surcoûts pour la sécurité civile.
Prenons l’exemple du projet de remplacement du réseau national d’alerte par le système d’alerte et d’information des populations. L’achèvement du premier volet, initialement prévu pour 2015, n’interviendra finalement qu’en 2019. Ce retard implique la souscription d’une prestation complémentaire d’assistance au déploiement, ainsi que d’autres surcoûts potentiels liés aux intérêts moratoires ou à l’augmentation de la TVA.
Aussi, je me félicite du fait que l’amendement visant à mettre en œuvre les annonces du Président de la République à la suite des attentats du 13 novembre prévoit près de 11 millions d’euros supplémentaires pour l’investissement et le fonctionnement. Nous aurons l’occasion d’y revenir dans quelques minutes.
S’agissant du titre 2, il existe une véritable volonté de maîtriser les dépenses de personnel.
Sur la période 2012–2016, la baisse cumulée des effectifs devrait ainsi atteindre 4 %. Si ces efforts sont bienvenus, il faut réaffirmer la nécessité de garantir l’adéquation entre les effectifs de la direction générale de la sécurité civile et le périmètre de ses missions.
En effet, des inquiétudes ont été exprimées lors des auditions concernant une « paupérisation » de l’administration centrale, qui ne parviendrait plus à assumer l’ensemble de ses missions. À titre d’illustration, les sapeurs-pompiers volontaires ne pouvaient toujours pas, en septembre 2015, bénéficier de l’accès à la formation professionnelle continue, car le manque de personnels de la direction générale n’a pas permis à celle-ci de formaliser à temps les documents nécessaires.
Dans ce contexte, je souhaite insister sur la nécessité, pour les forces de secours, de s’engager dans une nouvelle dynamique de mutualisation, afin de dégager des marges de manœuvre.
Deux sujets me semblent mériter, à ce titre, une attention particulière.
D’abord, la mutualisation des flottes d’hélicoptères de l’État. La situation actuelle est clairement sous-optimale : les appareils employés sont différents selon les forces ; chaque autorité d’emploi dispose de ses propres bases, règles de formation, centres de maintenance et outils de formation ; les implantations territoriales sont décidées par chaque ministère, ce qui se traduit par des doublons et des déséquilibres.
Si de premiers efforts de mutualisation ont été réalisés entre la sécurité civile et la gendarmerie, des obstacles culturels empêchent de tirer pleinement parti des possibilités techniques ouvertes.
Surtout, une rationalisation plus ambitieuse impliquerait nécessairement un traitement interministériel de ce dossier.
Le deuxième chantier que je souhaite évoquer concerne les centres de traitement des appels d’urgence. Il faut le dire, notre pays n’a plus les moyens de conserver 500 centres d’appels et 11 numéros d’urgence.
Je note d’ailleurs que de nombreux pays se sont déjà engagés avec succès dans cette voie, en dépit des obstacles techniques et culturels.
À titre d’illustration, la Finlande a réussi, entre 2009 et 2015, à diviser par trois son nombre de centres d’appels et à faire du 112 le numéro de téléphone unique en cas d’urgence. À population égale, la Finlande compte ainsi huit fois moins de centres d’appels que la France !
Je sais que le ministre de l’intérieur souhaite aller vers une plus grande mutualisation en la matière, mais deux inquiétudes subsistent à ce stade.
Premièrement, le ministère de la santé semble, pour le moment, faire « bande à part », en privilégiant la modernisation de son système d’information.
Deuxièmement, il faudra être particulièrement vigilant à ce que les regroupements de plateformes n’aboutissent pas à des transferts de charges pour les services départementaux d’incendie et de secours, ou SDIS, comme c’est malheureusement le cas en matière de transport sanitaire.
Là encore, une rationalisation ambitieuse impliquera nécessairement un traitement interministériel de ce dossier et, surtout, une forte volonté politique.