Intervention de Bernard Cazeneuve

Réunion du 30 novembre 2015 à 14h10
Loi de finances pour 2016 — Compte d'affectation spéciale : contrôle de la circulation et du stationnement routiers

Bernard Cazeneuve, ministre :

Je le dis à M. le rapporteur, dont les chiffres sont exacts, mais ne tiennent pas compte de la période 2009–2012, or il est toujours bon d’embrasser la totalité des périodes que l’on veut traiter afin d’en donner une photographie la plus précise possible. Je le dis également à la sénatrice qui s’est exprimée tout à l’heure sur les moyens hors T2 de la police et de la gendarmerie. Je le dis enfin à tous les sénateurs qui veulent avoir la garantie que nous donnerons aux services les moyens de fonctionner correctement.

J’entrerai maintenant dans le détail de ces chiffres, de façon extrêmement fine, afin que chacun puisse disposer de l’ensemble des informations utiles avant le vote.

Dans le cadre du plan antiterroriste décidé en janvier, les effectifs des forces concourant à la sécurité ont été renforcés à hauteur de 538 nouveaux postes dès 2015, qui seront tous pourvus d’ici à la fin de l’année. Ces 538 nouveaux postes correspondent à la part, pour l’année 2015, des 1 401 postes que je viens d’évoquer et qui ont vocation à être pourvus dans la période 2015–2017.

Le plan antiterroriste sera poursuivi en 2016, avec le recrutement de 445 renforts supplémentaires dans les services antiterroristes, dont 390 dans la police nationale et 55 dans la gendarmerie nationale.

Au-delà de la lutte antiterroriste, le projet de loi de finances pour 2016 prévoit également de couvrir des besoins plus structurels des forces de sécurité. Ce sont ainsi 287 effectifs supplémentaires qui vous sont proposés pour renforcer les unités de terrain, au service de la sécurisation générale de notre pays.

Par ailleurs, je veux le rappeler au Sénat, le Gouvernement a soumis à l’Assemblée nationale un amendement, voté en première lecture, visant à doter les forces mobiles et la police aux frontières de 900 effectifs supplémentaires pour faire face à la crise migratoire à laquelle le pays est confronté.

Au total, avant l’examen de l’amendement qui vous est proposé, ce sont 1 632 effectifs supplémentaires qui sont prévus en 2016, dont 1 078 ETP pour la police et 554 ETP pour la gendarmerie.

Au vu de la menace et pour atteindre notre objectif de destruction de cette menace, le Président de la République a demandé un renfort supplémentaire de 5 000 effectifs afin de lutter contre le terrorisme, de sécuriser les frontières et de renforcer encore la sécurisation générale de notre pays.

L’amendement qui vous est proposé tend à prévoir un renfort global de 3 150 effectifs supplémentaires dès 2016 pour les forces de sécurité.

La police nationale bénéficiera ainsi de 1 366 effectifs supplémentaires, qui permettront de renforcer à la fois la direction générale de la sécurité intérieure, à hauteur de 225 ETP sur deux ans, dont 113 dès 2016, et les autres services antiterroristes de la direction générale de la police nationale : la police judiciaire – elle se verra octroyer 160 renforts en deux ans –, la direction du renseignement de la préfecture de police – elle s’en verra attribuer 60 en deux ans –, le service central du renseignement territorial – il bénéficiera de 130 renforts en deux ans –, le service de protection des personnalités. La police aux frontières, la sécurité publique, les compagnies républicaines de sécurité et les compagnies d’intervention de la préfecture de police verront elles aussi leurs effectifs renforcés.

Le même renforcement est prévu pour 2017.

Au total, 625 effectifs supplémentaires auront été recrutés pour le renseignement pur en deux ans. Ces recrutements impliquent de modifier les modalités de recrutement et d’utiliser tous les leviers disponibles en matière de gestion des ressources humaines, qu’il s’agisse de la durée de formation et de stage ou du recours aux contractuels notamment. À cet égard, le directeur général de la police nationale me fera des propositions avant la mi-décembre afin que nous puissions procéder aux recrutements dans les meilleurs délais.

Pour mémoire, je rappelle simplement – là aussi, c’est un signe – que les sorties d’écoles de gardiens de la paix, qui étaient de 488 en 2012, ont d’ores et déjà été portées à plus de 3 600 en 2015. Si je ne devais m’en tenir qu’aux recrutements dans les écoles en vue de pourvoir les postes au sein de nos forces de sécurité pour apporter la démonstration de la véracité des recrutements effectifs, ces chiffres en témoignent si besoin était.

Par ailleurs, 1 763 effectifs de la gendarmerie viendront renforcer les escadrons de gendarmes mobiles, mais également les unités dans l’ensemble du territoire. Les renforts de la gendarmerie seront intégralement recrutés dès 2016, car la gendarmerie a les capacités de procéder à ces embauches compte tenu de l’organisation des recrutements. Il y a en effet deux recrutements par an, celui de la fin de l’année ayant pu être ajusté dès après les attentats.

Les effectifs des démineurs de la sécurité civile seront renforcés de vingt et une recrues en 2016.

Le solde des créations de postes, de 252 effectifs en 2016 et de 213 effectifs en 2017, viendra renforcer les services centraux et les préfectures pour l’accomplissement de leurs missions concourant à la sécurité : la lutte contre la radicalisation, contre la fraude documentaire, contre les armes et l’éloignement des étrangers en situation irrégulière. Je réponds ainsi à l’une des préoccupations évoquées par Mme la sénatrice Nathalie Goulet.

Au total, si vous adoptez l’amendement du Gouvernement, pour synthétiser l’ensemble de ces données, les renforts des forces de sécurité atteindront, en 2016, un total de 4 761 effectifs. J’ai noté que cet amendement avait obtenu un soutien unanime en commission. Ce vote unanime est une démonstration de notre unité, qui fait la force de notre pays face aux terroristes, et j’en remercie l’ensemble des sénateurs.

Au-delà de la poursuite et de l’intensification du renforcement des effectifs engagé dès 2012, le budget pour 2016 prévoit également des mesures catégorielles ciblées, à la hauteur de la mobilisation exceptionnelle qui est demandée aux forces de sécurité.

Pour les forces mobiles de police et de gendarmerie, l’indemnité journalière d’absence temporaire, l’IJAT, est revalorisée, à compter du 1er juillet 2015 et jusqu’en 2017. L’IJAT allouée aux CRS, qui payent un très lourd tribut et fournissent des efforts considérables dans le cadre du plan Vigipirate, croît de 30 %. Cette indemnité, je veux le rappeler, n’avait pas été augmentée depuis treize ans.

Les sous-officiers de gendarmerie et les gardiens de la paix bénéficieront d’une revalorisation indiciaire.

Un grade à accès fonctionnel sera créé pour les commissaires de police.

Pour les personnels de la sécurité civile, le régime indemnitaire des techniciens de maintenance du groupement d’hélicoptères de Nîmes sera valorisé. C’est un sujet que vous aviez me semble-t-il évoqué, madame la sénatrice Catherine Troendlé.

En outre, le Gouvernement entend poursuivre la remise à niveau des moyens d’équipement, d’investissement et de fonctionnement des forces de sécurité. Cet effort est indispensable pour permettre aux effectifs recréés d’accomplir leurs missions, alors même que les moyens alloués aux forces de police et de gendarmerie ont diminué de 17 %, je le répète, dans la période 2007–2012.

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016, pour être là aussi tout à fait précis, un renforcement substantiel des moyens est d’ores et déjà prévu, avant le vote de l’amendement. Ainsi, les moyens matériels des forces de sécurité doivent croître de 9 % en autorisations d’engagement et de 1, 4 % en crédits de paiement. Je ne sais donc pas d’où provient le chiffre de 0, 98 % évoqué à plusieurs reprises.

Je veux préciser comment se déclineront ces moyens nouveaux, abondés par l’amendement, entre la police nationale et la gendarmerie.

Pour la seule police nationale, 40 millions d'euros seront à nouveau consacrés, comme en 2015, à l’acquisition de plus de 2 000 véhicules neufs.

Par ailleurs, la modernisation technologique sera poursuivie : 27, 2 millions d'euros seront consacrés en 2016 à l’unification des plateformes de réception des appels d’urgence, au renforcement des infrastructures et des applications fondamentales, comme la Plateforme d’harmonisation, d’analyse, de recoupement et d’orientation des signalements PHAROS ou encore le système de Circulation hiérarchisée des enregistrements opérationnels de la police sécurisés, CHEOPS, d’accès à différents fichiers, l’ensemble de ces infrastructures numériques n’ayant pas fait l’objet d’investissements depuis près de vingt ans.

De surcroît, le fonds interministériel de prévention de la délinquance recevra 17, 7 millions d'euros pour lutter contre la radicalisation, mettre en place des dispositifs de vidéoprotection des lieux de culte, contribuer à l’équipement des communes en terminaux portatifs de radiocommunication, en gilets pare-balles et en armement des polices municipales. Je souhaite en effet renforcer les moyens de protection et d’intervention des polices municipales.

La gendarmerie bénéficiera également de moyens renforcés. Le plan triennal de réhabilitation du parc domanial de la gendarmerie sera poursuivi à hauteur de 70 millions d'euros supplémentaires, permettant de réhabiliter 5 000 logements, après 3 400 réhabilitations effectuées en 2015. Le renouvellement du parc automobile des gendarmes sera aussi doté de 40 millions d'euros en 2016, pour l’acquisition de 2 000 véhicules neufs supplémentaires.

Je pourrais par ailleurs évoquer, comme je l’ai fait en commission, le programme NEOGEND, qui permettra de doter les gendarmes d’outils mobiles d’accès aux systèmes d’information et garantira la modernisation de la gendarmerie par l’accès à des outils numériques de toute première efficacité.

La sécurité civile, dont il a été question, bénéficiera également d’une hausse de 8, 3 millions d'euros de son budget par rapport à l’an dernier, notamment pour le maintien en conditions opérationnelles de la flotte d’avions, le renforcement de ses capacités d’intervention et de gestion de crises.

À cela, s’ajoutera le volet 2016 du plan antiterroriste décidé en janvier.

La police bénéficiera de 24, 7 millions d'euros de moyens supplémentaires pour l’équipement, la protection, la modernisation technologique des moyens informatiques, de vidéoprotection et électroniques.

La gendarmerie verra ses moyens antiterroristes renforcés à hauteur de 5, 2 millions d'euros, en particulier afin de poursuivre l’action de modernisation informatique des forces.

Dans le cadre du « pacte de sécurité » voulu par le Président de la République, l’amendement qui vous est soumis prévoit d’accompagner les créations d’effectifs de moyens nouveaux à hauteur de 220 millions d'euros de crédits d’équipement, d’investissement et de fonctionnement. En 2017, ces moyens d’équipement, d’investissement et de fonctionnement supplémentaires atteindront 210 millions d'euros pour la police, la gendarmerie et la sécurité civile.

En 2016, ces moyens, répartis en 116 millions d'euros au bénéfice de la police, 93 millions d'euros au bénéfice de la gendarmerie et 11 millions d'euros au service de la sécurité civile, permettront d’assurer les dépenses nécessaires au renforcement de l’appareil de formation, en procédant aux mutualisations et à l’optimisation des moyens immobiliers autant que possible. Ils permettront également de renforcer l’effort de renouvellement du parc automobile de la police et de la gendarmerie à hauteur de 1 000 véhicules supplémentaires par force. Dès 2016, les 6 000 véhicules évoqués tout à l'heure seront acquis : 3 000 dans la police nationale et 3 000 dans la gendarmerie.

L’ensemble de ces investissements est destiné, avec l’augmentation des moyens déjà prévue par le PLF 2016, à donner à nos forces de sécurité tous les moyens matériels nécessaires à leur action.

Pour conclure, madame la présidente, je voudrais rappeler un certain nombre d’éléments concernant notre action depuis le mois de janvier 2015, car j’entends régulièrement dire que tout n’a pas été fait de ce qui devait l’être, que du retard a été pris… Le débat parlementaire doit être l’occasion d’apporter les éléments d’information et de réponse à ces interpellations.

Pour mémoire, entre 2007 et 2012, 12 519 suppressions d’emplois sont intervenues dans la police et la gendarmerie. Depuis cette date, et avant même les mesures que vous allez, je l’espère, voter, nous avons d’ores et déjà créé 2 317 postes dans la gendarmerie, 2 444 dans la police, soit au total 4 761 postes recréés.

Ce résultat est atteint grâce à l’effort décidé en janvier dernier dans le cadre du plan antiterroriste, qui a prévu 1 404 recrutements supplémentaires sur trois ans.

Avec les plans de renforts décidés par cette majorité, nous parviendrons d’ici à 2017 à un renfort de 9 341 postes, dont 8 984 pour les forces de sécurité.

Sur le plan des moyens, le même effort historique est assuré. À la suite des attentats de janvier, 233 millions d’euros supplémentaires ont été alloués sur trois ans. En 2015, cet effort représente 97, 8 millions d’euros d’investissements et d’équipements supplémentaires. Ce plan s’ajoute au renfort de 432 postes décidé dès 2012 pour la DGSI, accompagné de 36 millions d’euros de moyens supplémentaires sur trois ans.

J’aimerais également souligner que les moyens juridiques ont été mis à la disposition des services. À cet égard, je tiens à adresser mes remerciements à Philippe Bas…

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