Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans les circonstances que connaît actuellement notre pays et que je connais moi-même, la question migratoire se pose avec une acuité encore plus forte.
Bien entendu, il ne faut pas confondre les questions de sécurité liées au terrorisme et les questions politiques, économiques et sociales liées à l’immigration. Pourtant, c’est vrai, elles se recoupent partiellement, car la perméabilité de nos frontières est une faille dans notre défense contre les nouvelles menaces qui se sont rappelées cruellement à nous lors des attentats du 13 novembre dernier.
Mais si la question migratoire dépasse largement cette problématique, il n’en reste pas moins que la tension qui s’exerce aujourd’hui sur le moral de la nation accroît encore plus l’urgence d’adapter notre politique de maîtrise et de contrôle des flux migratoires.
C’est donc avec détermination que j’aborde cette question, consciente de ses enjeux, en raison de mon parcours personnel.
Je tiens à le dire à cette tribune, étant moi-même issue d’une famille d’origine polonaise et arménienne, je sais la contribution que peuvent apporter à la France des étrangers qui viennent chez nous avec, dans le cœur, le respect de la République et la volonté de réussir leur vie.
Je sais l’espoir que peut représenter la France pour les candidats à l’émigration, partout dans le monde. Mais en tant que maire de Calais, je sais aussi les contraintes qu’une immigration incontrôlée, irrégulière, permise par l’affaiblissement des outils régaliens, peut faire peser, tout autant sur la population française que sur les clandestins, qui se retrouvent chez nous dans des situations humainement insupportables.
Monsieur le ministre, le budget que vous proposez est en augmentation, ce dont je ne peux que me réjouir. Mais cela sera-t-il suffisant pour assumer la situation inédite que nous vivons actuellement ? En effet, depuis trois ans, la crise migratoire a changé de dimension.
La situation à Calais en est la preuve la plus évidente. Alors que l’on y dénombrait 500 migrants environ voilà trois ans, nous avons dépassé les 6 000 migrants il y a quelques semaines, pour redescendre aujourd'hui à 4 500.
Face à cette situation exceptionnelle, les moyens mis en œuvre par l’État sont-ils suffisants ?
Nous ne pouvons nier les efforts accomplis par les services de l’État, notamment par le ministère de l’intérieur, et en particulier par vous-même, plus personnellement, monsieur le ministre. Je pense, par exemple, au travail réalisé par l’Office central pour la répression de l’immigration irrégulière et l’emploi d’étrangers sans titre contre les filières de passeurs qui exploitent la misère humaine.
Comme le souligne, dans son rapport, notre collègue François-Noël Buffet, sur les dix premiers mois de l’année 2014, huit filières d’acheminement vers le Royaume-Uni ont été démantelées. En 2015, pour la même période, ce sont près de vingt-six filières qui ont été démantelées, dont vingt-quatre sur l’initiative de la direction centrale de la police aux frontières.
Ce travail remarquable de nos fonctionnaires de police doit être salué, même si des réseaux, notamment organisés par certains ressortissants albanais, restent bien trop actifs et doivent encore être combattus.
Je n’oublie pas non plus, monsieur le ministre, les investissements consentis par l’État pour l’aménagement de la lande et du centre Jules-Ferry.
Mais force est de constater l’étendue de la problématique : les questions financières, notamment, restent entières, y compris pour la ville de Calais, qui est amenée à assumer un certain nombre de tâches liées au phénomène migratoire, même si la logique de convention qui lie notre collectivité locale et l’État a vocation à en compenser le coût.
De manière plus générale, je veux souligner l’importance de la réponse apportée au titre de la politique de l’asile, mais celle-ci ne peut faire oublier toutes les autres actions nécessaires pour lutter contre l’immigration irrégulière. En particulier, j’appelle de nouveau le Gouvernement à prendre en compte l’indispensable identification des migrants, spécialement ceux qui ne relèvent pas de l’asile.