Intervention de Clotilde Valter

Réunion du 30 novembre 2015 à 14h10
Loi de finances pour 2016 — Immigration asile et intégration

Clotilde Valter :

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, la République est aujourd’hui confrontée à des défis majeurs. Au rang de ces défis, il y a la situation migratoire sans précédent que nous connaissons.

Le Gouvernement, en étroite coordination avec ses partenaires européens, a engagé d’importantes réformes au travers des lois sur le droit des étrangers au séjour et de réforme de l’asile. Le projet de loi de finances pour 2016 traduit ces engagements, et les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » reflètent la volonté du Gouvernement de répondre de façon durable à ce défi.

Par ailleurs, l’action du Gouvernement en matière d’immigration, d’asile et d’intégration fait partie intégrante de la réponse que le Président de la République entend apporter à la menace terroriste. C’est pourquoi je vous soumettrai un amendement de renforcement des moyens de la mission dans le cadre du pacte de sécurité.

Je commencerai par souligner l’effort important qui est consenti en termes d’effectifs.

Pour tenir compte des décisions prises par le Conseil européen en septembre en vue de relocaliser 160 000 personnes d’ici à 2017, Conseil au cours duquel la France s’est engagée à relocaliser 30 700 réfugiés, le Gouvernement propose un renfort de l’OFII, de l’OFPRA, des préfectures et de la Direction générale des étrangers en France de 266 agents en 2016. L’OFII et l’OFPRA bénéficieront respectivement de 126 et de 100 effectifs supplémentaires, les préfectures de 30 renforts et la DGEF de 10 renforts.

Dans le cadre de la mise en place des hotspots, la France entend pleinement contribuer au fonctionnement de ces centres d’accueil, tant en Italie qu’en Grèce, par la mise à disposition de 18 personnes pour le Bureau européen d’appui en matière d’asile et de 60 personnels pour FRONTEX. L’amendement qui vous sera proposé visera donc à créer 9 postes pour l’OFII et 15 postes pour l’OFPRA, afin de permettre à ces opérateurs de contribuer efficacement au fonctionnement de ces hotspots.

Pour que les effectifs supplémentaires puissent remplir leur mission, le projet de loi de finances pour 2016 renforce également les moyens en vue de la mise en œuvre de la réforme de l’asile dans le cadre de la loi du 29 juillet 2015, laquelle prévoit la réduction des délais de traitement des demandes ainsi qu’un dispositif national d’accueil et une répartition équilibrée des demandeurs d’asile sur le territoire. L’équilibre de ce dispositif repose sur la poursuite des créations massives de places d’hébergement de demandeurs d’asile. Au total, ce seront 23 100 places d’hébergement des demandeurs d’asile qui seront créées d’ici à la fin de l’année 2017.

En vue de la mise en œuvre de cette réforme, les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » sont accrus de 7, 8 % en crédits de paiement et de 9, 62 % en autorisations d’engagement. En plus de ces crédits déjà inscrits au budget, le Gouvernement proposera, au travers de l’amendement qui vous sera soumis, de renforcer les crédits nécessaires à l’ensemble des acteurs pour traiter l’afflux de demandes d’asile et apporter une aide aux communes qui s’engagent dans la démarche de relocalisation.

Tout en assumant la plénitude de ses compétences, l’État a décidé d’apporter un soutien exceptionnel aux communes, comme le ministre de l’intérieur a eu l’occasion de l’annoncer devant 700 maires le 12 septembre dernier. Ces aides sont les suivantes : un soutien exceptionnel de 1 000 euros accordé aux communes volontaires par place d’hébergement ou de logement créée, à hauteur de 15 millions d’euros au total ; des primes complémentaires dans le cadre des dispositifs d’amélioration de l’habitat et de garantie de loyer, à hauteur de 1 000 euros par logement. S’y ajoute un fonds de soutien à l’investissement local, doté de 50 millions d’euros, pour contribuer à la réalisation de logements et d’équipements publics, à la main des préfets de région.

Par ailleurs, le projet de loi de finances pour 2016 prévoit de renforcer très significativement le budget de l’intégration, avec une hausse de 20 % des crédits du programme « Intégration et accès à la nationalité française » et une augmentation de 40 % de la subvention pour charge de service public de l’OFII, notamment pour renforcer l’apprentissage de la langue française.

Enfin, dans le cadre du pacte de sécurité voulu par le Président de la République, l’amendement qui vous sera soumis prévoit l’ouverture de 13, 8 millions d’euros supplémentaires destinés à renforcer les outils nécessaires au contrôle des frontières, notamment les systèmes d’information, les équipements, le contrôle des visas, et à acquérir cent bornes Eurodac supplémentaires pour améliorer l’équipement des centres de rétention et des points de passage aux frontières.

Ces moyens supplémentaires contribueront directement à la sécurisation des frontières et à la lutte contre la menace terroriste. Face à cette menace, nous devons garantir aux services chargés de la politique de l’immigration, de l’asile et de l’intégration tous les moyens nécessaires non seulement à notre protection, mais aussi à la préservation de notre politique d’asile et de notre capacité d’intégration, lesquelles sont, plus que jamais, essentielles à l’affirmation des valeurs de la République.

Après ce préalable, je souhaiterais répondre aux questions précises soulevées par certains orateurs.

Je voudrais dire à Mme Bouchart que, comme chacun le sait, le ministre de l’intérieur est très attentif à la situation à Calais, où des moyens importants ont été déployés : multiplication des maraudes et des patrouilles, nombre d’interpellations record en octobre et novembre avec près de cinquante procédures par jour, hausse des reconduites à la frontière et déploiement de dix-huit unités de forces mobiles. Bernard Cazeneuve s’est engagé à poursuivre cet effort de surveillance, de multiplication des maraudes et des contrôles aux frontières. Nous avons là un dispositif complet, auquel le ministre de l’intérieur prête une attention permanente.

À Roger Karoutchi, je souhaiterais rappeler que l’OFPRA bénéficie de 100 renforts aux termes du projet de loi de finances pour 2016 et l’OFII de 126 renforts. L’amendement du Gouvernement porte ces renforts à 115 pour l’OFPRA et à 135 pour l’OFII. Monsieur le rapporteur spécial, votre préoccupation est bien prise en compte ; ces renforts permettront notamment d’armer les hotspots en Italie et en Grèce, comme je l’ai déjà indiqué.

À Mme Goulet, qui a posé une question très précise sur les moyens d’identification des demandeurs d’asile lors du franchissement des frontières extérieures, je signale que la prise des empreintes est effectuée dans Eurodac et que l’État de première entrée a l’obligation d’effectuer un criblage par rapport à plusieurs fichiers de police internationaux. Pour la relocalisation, l’identification est l’une des missions des hotspots. Les forces de sécurité des pays concernés y procèdent avec l’aide de FRONTEX. Enfin, lors de l’enregistrement de la demande d’asile en France, il y a une prise d’empreintes et un criblage du fichier des personnes recherchées.

Mme Benbassa a soulevé la question de la rétention des personnes se déclarant syriennes ou irakiennes. La préfecture du Pas-de-Calais a pour pratique de ne pas prendre de mesure d’éloignement contre les personnes dont la nationalité syrienne est établie. Toutefois, dans un nombre significatif de cas, cette nationalité est seulement déclarée et non démontrée. Elle repose sur des documents, hélas ! fréquemment falsifiés. Dans ces cas, le placement en rétention se justifie pour vérifier la nationalité alléguée et établir, le cas échéant, la véritable nationalité à des fins de réadmission.

Je voudrais aussi rappeler que la France a la durée de rétention la plus brève en Europe, que les conditions de placement en rétention sont soumises au contrôle du juge et que les personnes placées en rétention peuvent effectuer une demande d’asile.

Enfin, je tiens à dire à Mme Gonthier-Maurin que nous consolidons le contrat d’intégration avec un parcours d’intégration dans la durée pouvant aller jusqu’à cinq ans, un relèvement du niveau de langue, un renforcement de l’OFII pour faire un diagnostic social de l’étranger et une incitation forte à l’intégration avec la délivrance d’une carte pluriannuelle.

Mesdames, messieurs les sénateurs, j’espère avoir répondu à toutes vos préoccupations.

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