Intervention de Nathalie Goulet

Réunion du 12 mai 2016 à 10h30
Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures — Adoption définitive d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Nathalie GouletNathalie Goulet :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, assister au baptême d’une nouvelle institution en matière de développement est tout de même assez original : c’est une grande chance que nous avons là ! Je tiens à vous dire à ce propos, monsieur le secrétaire d’État, que l’ensemble de mon groupe soutient la ratification de cet accord.

Aide-toi, le ciel t’aidera ! Dans la culture chinoise, on évoquerait plutôt Sun Wukong se délivrant de la montagne qui l’emprisonne. La Chine, n’étant pas parvenue à faire du FMI ce qu’elle voulait, a choisi de créer une institution qui a été présentée comme une véritable concurrente du Fonds, mais qu’il faudra bien, à un moment ou à un autre, rendre compatible avec lui.

M. le rapporteur a très bien expliqué les raisons politiques, économiques et stratégiques de cette initiative. Par ailleurs, on sait à quel point le développement représente aujourd’hui une absolue nécessité pour permettre d’endiguer à la fois les disparités régionales et la montée des extrémismes. On ne peut donc qu’être extrêmement content et ambitieux pour ce nouvel établissement.

Cela étant, la composition de ses cinquante-sept membres fondateurs est révélatrice : on y trouve aussi bien l’Arabie Saoudite et l’Iran qu’Israël, ce qui prouve que la Chine a pu rassembler autour de ce projet des pays dont les politiques sont en apparence diamétralement opposées. À la lumière de cette liste, on voit bien que l’AIIB est ambitieuse.

Cette nouvelle banque devra néanmoins répondre à un certain nombre de questions sur des marchés financiers disparates.

On peut d’abord s’interroger quant à sa coopération avec les institutions qui lui sont similaires. L’Agence française de développement a déjà été évoquée ; on peut aussi mentionner la Banque islamique de développement. De fait, un vaste ensemble de coopérations va devoir se mettre en place.

Parmi les membres de cette banque, on trouve le premier pays musulman du monde, l’Indonésie. Des produits financiers islamiques, qui sont recherchés et font la gloire de la City, seront-ils proposés ? Même s’ils n’existent pas encore, il s’agit de produits d’appel extrêmement importants, qu’il faudra rendre compatibles avec d’autres produits financiers.

Quelle politique stratégique sera conduite par cette banque ? Il va falloir attendre pour le savoir. Comme dans tout établissement, c’est l’aspect stratégique qui sera le plus important ; la gouvernance ne le sera pas moins, comme l’a souligné Jean-Pierre Raffarin.

Dans cette banque, la France jouera un rôle extrêmement important, avec 3, 44 % de suffrages. C’est modeste, mais concret.

La pratique de la chaise tournante pour les pays européens est bonne. C’est une pratique qu’il faudra probablement améliorer et réitérer dans un certain nombre d’institutions. Monsieur le secrétaire d’État, vous savez que je milite pour un siège d’observateur de l’Union européenne au sein de l’Organisation de la coopération islamique. Il pourrait prendre cette forme. S’agissant d’ailleurs de nombreuses organisations régionales, qui sont extrêmement importantes, ce serait aussi une bonne solution.

Ces interrogations demeurent, mais, aujourd’hui, le principe vaut plus que les modalités. C’est pourquoi l’ensemble du groupe UDI-UC soutient ce projet de loi de ratification, même s’il émet une attente importante, notamment en matière d’investissement et de stratégie.

Nos préoccupations ont en effet trait aux investissements chinois urbi et orbi, en particulier en matière de terres agricoles. Il faudra donc que ces 3, 44 % soient mis au service non seulement du contrôle, mais aussi de l’influence sur la stratégie générale qui sera développée à travers ces investissements et par cet établissement auquel nous souhaitons bon vent.

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