Nous touchons ici à un article très sensible, qui mérite à mes yeux beaucoup de sérieux et une attention particulière.
Je voudrais d’abord mettre en garde contre la tentation de faire des caricatures : il n’y a pas ici, d’un côté, ceux qui sont contre les abeilles et, de l’autre, ceux qui sont pour ces insectes. Nous sommes tous sensibilisés, bien évidemment, à l’importance et à la valeur des pollinisateurs.
À vrai dire, je me place sur la même ligne que celle qui a été défendue par Nicole Bonnefoy : je défends un mécanisme essentiellement fondé sur une approche scientifique et qui s’en remet, par conséquent, à l’ANSES, seule institution capable à mes yeux de rendre des expertises pertinentes à ce sujet.
Je suis sensible au sous-amendement que vient de défendre Joël Labbé. On pourrait en effet élargir le champ des experts scientifiques impliqués dans ce processus, non pas selon moi à l’ITAB, mais bien à l’INRA et, peut-être, à l’Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture, l’IRSTEA. Ces instituts peuvent en effet apporter une vision un peu plus large que l’approche chimique de l’ANSES.
Néanmoins, l’alinéa 6 de l’amendement de Nicole Bonnefoy me semble quelque peu paradoxal. En effet, puisque nous nous reposons sur l’expertise des instituts de recherche, que ce soit l’ANSES ou, peut-être, l’INRA et l’INSTEA, nous devons leur faire confiance. Dès lors que ces agences nous déclarent qu’elles évaluent régulièrement les solutions de rechange aux néonicotinoïdes et qu’elles sont à l’affût des nouvelles méthodes et des nouvelles molécules qui sont mises sur le marché, c’est donc bien à elles, à ce moment-là, d’indiquer que l’interdiction est devenue nécessaire.
Le fait d’imposer dès aujourd’hui une date butoir non seulement n’a aucun sens, mais n’est en outre pas solide au regard du droit européen.
Nous sommes donc prêts à considérer l’adoption de l’amendement de Mme Bonnefoy à condition que soit adopté ce sous-amendement, ce qui nous permettrait de laisser l’ANSES et la science au centre de la décision.
En effet, si nous devions décider aujourd’hui, mes chers collègues, de l’intérêt d’enlever une molécule du marché ou de l’y laisser, alors faisons 500 millions d’économies par an et fermons l’ANSES ! Nous prendrons dans ce cas nous-mêmes toutes les décisions d’autorisation pour les molécules, pour l’agriculture ou pour nos médicaments, puisque, à en croire certains, c’est à peu près la même chose !