Intervention de Christiane Demontès

Réunion du 31 janvier 2008 à 9h45
Service public de l'emploi — Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire

Photo de Christiane DemontèsChristiane Demontès :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous voici arrivés au terme des discussions sur le projet de loi relatif à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi, qui deviendra donc loi après le vote du Sénat puis, tout à l'heure, de l'Assemblée nationale.

Je veux d'abord redire que la discussion en urgence de ce projet de loi ne se justifiait pas et que le débat ayant eu lieu hier en commission mixte paritaire l'a démontré. Certaines modifications apportées au texte après son examen par nos collègues députés auraient mérité un débat et un examen approfondis, qu'une deuxième lecture tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale aurait permis.

Nous avons eu l'occasion d'aborder des points importants qui n'étaient pas dans la logique du projet de loi, mais qui auraient eu toute leur place dans un texte portant sur les politiques de l'emploi et de la formation et sur leur mise en oeuvre par le service public de l'emploi réformé. Vous avez abordé ces questions par le petit bout de la lorgnette. J'espère - mais je n'en suis pas tout à fait sûre - que vous n'avez pas ainsi créé une nouvelle complexité organisationnelle. Au moins est-il acté que nous avons un texte sur la réforme non pas du service public de l'emploi, mais de son organisation.

Ce n'est pas cette réforme qui répondra aux difficultés rencontrées par un grand nombre de nos concitoyens, notamment les allocataires de minima sociaux, de plus en plus nombreux dans certains de nos territoires, ainsi que les 600 salariés mosellans qui vont sans doute devoir changer d'emploi et en trouver un autre, alors que leur entreprise a dégagé près de 6, 5 milliards d'euros de bénéfices et que le directeur général et sa famille devraient percevoir à eux seuls environ 640 millions d'euros.

La situation économique et sociale de notre pays est inquiétante ; nos concitoyens sont préoccupés, ils ne sont pas satisfaits de leur Président de la République et de son gouvernement. Il n'est pas question pour nous de valider le fait que, si les choses vont mal, c'est à cause des chômeurs et des professionnels des différentes institutions qui les reçoivent et les accompagnent.

Venons-en donc à cette fusion entre l'ANPE et les ASSEDIC, pour laquelle nos débats ont permis d'obtenir quelques avancées.

Il en est ainsi de l'intitulé du projet de loi, qui reflète désormais plus précisément le contenu du texte : je le répète, il s'agit évidemment d'une réforme non pas du service public de l'emploi, mais bien de sa seule organisation.

Nous avons également levé les ambiguïtés qui pesaient sur la nature juridique de l'organisme issu de la fusion des ASSEDIC et de l'ANPE. Il s'agira bien d'une institution publique nationale, certains ayant même évoqué l'idée d'un établissement public administratif. Nous avons pu préciser le rôle de son conseil d'administration en matière d'attribution annuelle des dépenses.

Notre groupe a par ailleurs enregistré d'autres sujets de satisfaction. Je pense notamment à l'introduction, au sein du conseil d'administration, d'un représentant des collectivités territoriales. Je songe aussi à l'adoption d'un amendement de précision à l'article 3, qui, dans la logique de la création d'une quatrième section fongible dans le budget de la nouvelle l'institution, permet de spécifier la ventilation de la participation du régime d'assurance chômage au fonctionnement et à l'investissement de cette institution.

L'examen à l'Assemblée nationale et en commission mixte paritaire ont permis d'obtenir quelques nouvelles avancées ou rectifications. Il a ainsi été confirmé que les collectivités territoriales auront une place de titulaire et de suppléant au conseil d'administration. Bien que la disposition paraisse insuffisamment ambitieuse et peu cohérente avec les lois de décentralisation, y compris celle d'août 2004 qui confie aux régions la compétence en matière de formation professionnelle et de coordination du développement économique, la commission mixte paritaire a validé le principe d'une expérimentation par deux régions. Dans ce cadre, il s'agira, d'une part, de mieux articuler les politiques de l'emploi et de la formation professionnelle à l'échelon régional, et, d'autre part, d'établir dans les deux régions concernées une coprésidence du conseil régional de l'emploi par le président du conseil régional et le préfet de région.

La commission mixte paritaire a également supprimé la possibilité pour les maisons de l'emploi d'émettre un avis sur la convention annuelle conclue au niveau régional. Cela générait, de fait, une inégalité entre les territoires, dans la mesure où les maisons de l'emploi n'existent pas dans tous les territoires, même pas de France métropolitaine, et que les promesses sur la pérennisation de ces organismes, que vous avez réaffirmées à l'instant, madame la ministre, ne nous apparaissent pas comme des certitudes. En effet, je le rappelle, la commission d'habilitation, présidée par notre collègue député Jean-Paul Anciaux, ne s'est plus réunie depuis mars 2007, pour des raisons que je qualifierai de « mystérieuses ».

Les personnels des ASSEDIC restent régis par la convention collective qui leur est applicable jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle convention ou, à défaut, jusqu'à la date prévue par l'accord de méthode, et non jusqu'à une date fixée arbitrairement par le législateur, ce dont nous sommes satisfaits.

Néanmoins, certaines inquiétudes subsistent.

Ainsi, aucune précision n'a été apportée aux agents de l'UNEDIC et des ASSEDIC quant à leur devenir professionnel. Par ailleurs, près d'un quart des agents de l'ANPE sont actuellement en CDD et l'article 9 de la convention de l'Organisation internationale du travail, l'OIT, prévoit que les agents bénéficient de la stabilité de l'emploi « sous réserve des besoins de service ». Si l'on ajoute à cela les hypothèses qui laissent à penser ou, plutôt, qui permettent d'affirmer que le nombre d'agences pourra passer de 1 600 à 1 200, ce sont autant de raisons pour légitimer la question de la pérennisation de ces emplois, plus spécifiquement de ceux qui dépendent d'un contrat précaire.

Quant à la nature de l'activité professionnelle, elle est, elle aussi, source d'inquiétudes. En effet, la rédaction retenue ne garantit nullement l'indépendance des agents. Madame la ministre, vous nous l'aviez vous-même précisé, il sera utile que chaque agent comprenne les attentes de tous les usagers, demandeurs d'emploi et entreprises, et connaisse tous les métiers.

Mais quelles sont les modalités prévues pour parvenir à ce que cette révolution s'opère de la meilleure façon possible ? De quelle manière des agents travaillant aux ASSEDIC, notamment ceux qui sont chargés du recouvrement, deviendront, demain, des conseillers pour les entreprises ? Nous n'en savons rien, et les salariés non plus. Dans le même ordre d'idées, ces derniers s'interrogent également sur la mise en oeuvre et les finalités d'un outil informatique commun.

La négociation de la nouvelle convention collective, nous le savons tous, s'inscrit d'ores et déjà dans un cadre complexe, pour ne pas dire préoccupant. Madame la ministre, vous nous l'avez expliqué, compte tenu du fait que les agents de l'ANPE avaient un statut de droit public fixé par décret, le Gouvernement avait fait le choix, dans le respect des dispositions de la convention C88 de l'OIT, de prévoir une convention collective, cette dernière, une fois négociée, devant faire l'objet d'un agrément gouvernemental.

Si le respect de la convention C88 de l'OIT est un préalable essentiel, affirmer que le Gouvernement donnera son agrément ne saurait apaiser les inquiétudes des agents. Ceux-ci ne croient absolument pas que ce seront les atouts de la convention collective de l'UNEDIC conjugués à ceux du statut des agents de l'ANPE qui constitueront, in fine, la base de la future convention collective.

Le dernier motif de satisfaction est la suppression par l'Assemblée nationale, confirmée par la commission mixte paritaire, de l'article 8 ter relatif à la démission de fait du salarié ayant quitté son poste de travail, qui avait d'ailleurs été introduit au Sénat sur votre initiative personnelle, monsieur le président de la commission.

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