On se souvient également du drone venu se poser lors d’un meeting, à quelques mètres de la Chancelière allemande, Angela Merkel, en septembre 2013. Les services de sécurité n’étaient alors pas préparés à ce type d’incident.
Aujourd’hui, la menace « drone » est prise en compte lors de l’organisation d’événements à forte affluence, tels que la COP 21 l’an dernier ou l’Euro 2016 de football, qui s’ouvrira très bientôt.
Comment répondre à cette menace nouvelle ?
La défense du territoire face à la menace aérienne s’inscrit dans un cadre bien défini, celui de la posture permanente de sûreté aérienne, renforcée depuis les événements du 11 septembre 2001. Mais ce schéma est très largement inadapté à la menace que représentent les petits engins télépilotés accessibles au grand public, volant à basse altitude et, à ce jour, difficilement détectables et neutralisables, il faut bien l’avouer.
L’État doit donc, en premier lieu, adapter ses moyens de détection, d’identification et de neutralisation des drones. Une telle adaptation est prévue par la loi de programmation militaire actualisée de juillet 2015.
Des réponses technologiques ont été testées l’an dernier, lors d’une campagne menée avec une vingtaine d’industriels. Des solutions sont en cours de mise en œuvre, avec notamment l’acquisition d’un moyen de type radar passif. L’Agence nationale de la recherche a engagé un programme en ce sens. Des coopérations internationales sont développées afin d’instaurer une approche commune et des outils qui soient autant que possible interopérables au niveau européen.
Une réflexion est également en cours sur l’organisation du cadre de la neutralisation des drones, qui se doit d’être décentralisée compte tenu de la fugacité de la menace tout en permettant de prévenir les méprises et les dommages collatéraux, et en s’inscrivant en cohérence avec la chaîne de défense aérienne du territoire.
Outre ce volet technique et capacitaire, la prise en compte de la menace « drone » nécessite des adaptations juridiques.
La France compte aujourd’hui environ 200 000 drones de loisir, ainsi que 2 300 opérateurs professionnels de services, qui utilisent 4 200 drones. Cette filière professionnelle occupe la première place en Europe.
Le développement de cette filière professionnelle française a été favorisé par la mise en place d’une réglementation pionnière en 2012, modifiée en 2015. Évolutive, centrée sur les usages, elle permet des dérogations dans un but expérimental. Une des caractéristiques de notre réglementation par rapport aux exemples étrangers est de permettre les vols hors vue.
Les drones étant de moins en moins lourds et de plus en plus performants, la frontière entre drones de loisir et drones professionnels se trouve brouillée ; on parle d’une « uberisation » du secteur, qui rend plus complexe sa réglementation. Aussi est-il aujourd’hui nécessaire d’adjoindre un volet législatif à la réglementation existante afin d’améliorer l’information et la formation des télépilotes, de faciliter la détection, voire la neutralisation de drones potentiellement dangereux.
Avec mon collègue et ami Jacques Gautier, coauteur de cette proposition de loi, nous avons entendu plusieurs représentants professionnels du secteur des drones afin de vérifier que les principaux acteurs concernés adhéraient à l’idée d’un encadrement de l’usage des drones, pour plus de sécurité. Il en ressort que les professionnels sont plutôt favorables à un renforcement de la sécurité de l’usage des drones. Ils sont conscients qu’un accident grave risquerait de porter un coup d’arrêt au développement de cette filière et approuvent donc dans son principe la mise en place d’une réglementation équilibrée, afin d’accompagner l’essor du marché.
Dans ce contexte, les objectifs du texte que nous vous proposons sont les suivants : définir les drones à travers la notion de télépilote ; assurer une formation minimale des télépilotes ; définir le champ d’application de l’immatriculation de l’enregistrement des drones ; instituer une obligation de formation de l’utilisateur à la charge des fabricants ; introduire une obligation de signalement électronique et lumineux des drones, dont l’application pourrait être reportée de quelques mois, afin de permettre aux industriels de s’adapter, cette signalisation est nécessaire à la neutralisation du drone, à la mise en évidence rapide des intentions hostiles ou non de l’appareil ; renforcer les sanctions en cas de survols illicites.
Ces dispositions de la proposition de loi sont complémentaires : l’enregistrement des drones et la formation des pilotes pourraient être réalisés conjointement de façon très simple sur internet. Les seuils à fixer, pour la réalisation de ces formalités d’enregistrement et de formation, pourraient être identiques ; le seuil pour la signalisation électronique et lumineuse du drone pourrait, lui, être plus élevé.
En tout état de cause, le texte que nous vous proposons ne vise pas à apporter une réponse fermée et intangible à une question en constante évolution sur le plan technologique, mais à lancer un processus. Les améliorations que nous propose le rapporteur, M. Cyril Pellevat, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, sont toutes les bienvenues et vont dans le bon sens. Je pense par exemple à l’ajout de la mise en place d’un régime d’enregistrement en ligne couplé à un tutoriel de formation.
Quoi qu’il en soit, le cadre juridique de l’usage des drones devra comporter des mesures réglementaires évolutives en concertation avec l’ensemble des parties prenantes.
Chacun d’entre nous en a bien conscience ici : il est nécessaire aujourd’hui d’assurer la sécurité de l’usage des drones. À nous donc de trouver ensemble le bon équilibre.