Intervention de Leila Aïchi

Réunion du 17 mai 2016 à 14h30
Usage des drones civils — Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Leila AïchiLeila Aïchi :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi qui nous occupe aujourd’hui porte sur un thème particulièrement d’actualité : l’innovation technologique et la révolution numérique.

En effet, le secteur des drones à destination des professionnels civils, mais aussi des particuliers, connaît une expansion fulgurante. La filière professionnelle compte environ 2 300 opérateurs déclarés pour 4 200 drones, et le nombre de drones de loisir est quant à lui estimé à environ 200 000 en France : leur usage croissant et de plus en plus diversifié appelle une réglementation adaptée et préventive afin de limiter les risques d’incidents. Les auteurs de cette proposition de loi, ainsi que M. le rapporteur, ont notamment rappelé les survols récents de sites sensibles ainsi que les collisions évitées de justesse aux abords des aéroports.

L’enjeu de la multiplication des possibilités technologiques pose nécessairement la question d’une démocratisation sereine de ces nouveaux potentiels. Tel est précisément l’objet de cette proposition de loi : comment accompagner le développement des drones ? Comment les maîtriser ? Comment ne pas être dépassé ?

En ce sens, nous souscrivons à la démarche qui a été celle de la commission : mettre en avant le besoin d’informer les usagers et privilégier une approche préventive pour tous les opérateurs sans distinction, les professionnels non militaires comme les particuliers.

En effet, devant l’évolution rapide de la réglementation, avec notamment deux nouveaux décrets en décembre 2015, les dispositions en vigueur sont souvent mal connues des usagers. Selon le rapport, « depuis 2014, le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale a recensé 86 survols de sites sensibles […], pour la plupart liés à une mauvaise connaissance de la réglementation ».

Il apparaît donc important d’accompagner les usagers. À cet égard, nous pensons qu’il s’agit là d’une réponse équilibrée, ce qui n’était pas le cas de la loi relative au renforcement de la protection des installations civiles abritant des matières nucléaires mentionnée dans l’exposé des motifs, votée en mai dernier, et dont le groupe écologiste avait largement dénoncé la surenchère répressive.

S’agissant du présent texte, l’enregistrement en ligne ou l’immatriculation des appareils, l’obligation de formation et d’information pour les usagers, le signalement lumineux ou encore la mise en place d’un dispositif de limitation de performances des drones vont, selon nous, dans la bonne direction.

La proposition de loi renvoyant largement au règlement, il sera tout de même important que le Parlement reste vigilant et prenne toute sa part dans l’évolution de la législation.

Cependant, les dispositions qu’elle prévoit nous paraissent être des remparts efficaces pour tenter de limiter les accidents, l’utilisation de drones à des fins délictuelles ou encore la captation indue d’informations.

En effet, au-delà de l’atteinte à la sécurité des sites sensibles, directement visée à l’article 5 et qui nous préoccupe bien évidemment tous, l’amendement d’Yves Pozzo di Borgo nous rappelle qu’il y va aussi du respect de la vie privée d’autrui. En cela, nous saluons l’adoption de cet amendement par la commission. À cet égard, il nous semble nécessaire de rappeler l’interdiction de divulgation et d’exploitation des enregistrements d’images ou de scènes portant atteinte à la vie privée d’autrui dès lors qu’elles sont prises sans le consentement des personnes concernées.

Dans la mesure où l’usage des drones civils va nécessairement augmenter dans les prochaines années, dans la sphère privée, mais aussi dans la sphère professionnelle, le respect de la vie privée doit être un impératif inébranlable, et ce d’autant plus que les drones seront amenés, comme le rappelle l’exposé des motifs, à remplir des usages de plus en plus diversifiés : audiovisuel, surveillance, sécurité, livraison, etc.

Les enjeux liés à l’usage de drones sont donc multiples et relèvent à la fois de considérations technologiques, juridiques, sécuritaires et surtout éthiques. Comme vous le soulignez, monsieur le rapporteur, ce texte ne constitue qu’une partie de la réponse. L’automatisation poussée à l’extrême appelle nécessairement une réponse globale et multidimensionnelle.

Au-delà de l’adaptation du corpus juridique, il est important de renforcer les moyens capacitaires de détection au travers de la recherche scientifique et du développement. Il s’agit là de l’une des recommandations du rapport du Gouvernement d’octobre 2015 sur l’essor des drones aériens civils en France.

Plus encore, si ce renforcement réglementaire et capacitaire doit être réalisé au niveau national, il doit surtout être entrepris au niveau européen. Nous devons ainsi encourager à l’échelle européenne une harmonisation encore trop peu développée. Il est donc important d’accompagner un mouvement européen.

Le besoin de souplesse en matière de législation que vous mettez en avant, monsieur le rapporteur, doit également contribuer à une meilleure adaptabilité avec les futures normes européennes dans ce domaine.

Le groupe écologiste reconnaît donc l’utilité de cette proposition de loi, notamment dans sa dimension préventive et d’accompagnement des usagers. C’est pourquoi nous voterons en faveur de ce texte.

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