Intervention de Jean-Jacques Filleul

Réunion du 17 mai 2016 à 14h30
Usage des drones civils — Suite de la discussion et adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Jean-Jacques FilleulJean-Jacques Filleul :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à saluer la qualité du rapport de M. Pellevat.

Nous examinons aujourd’hui un texte utile, chacun s’accordant sur l’utilité qu’il y a à combler le vide juridique qui règne avec ce texte consensuel visant à encadrer l’utilisation des drones civils.

Les drones sont des aéronefs, parfois utilisés manuellement, plus souvent télécommandés à distance, ou autonomes. Ils peuvent emporter des charges à distance. Auparavant essentiellement utilisés à des fins militaires, ils ont bénéficié de progrès technologiques importants : leur développement dans le domaine civil est en plein essor.

Les drones étant désormais de taille beaucoup plus réduite, leur coût a fortement diminué. Cette évolution a permis d’imaginer un nombre important d’applications, ce qui ouvre une croissance potentielle considérable dans des secteurs variés et innovants.

La capacité du drone à embarquer une charge utile, telle que caméras, capteurs ou instruments de mesure, le rend capable de réaliser des missions variées. La capture de données permet une multitude d’applications dans des domaines allant de l’agriculture aux ouvrages d’art, en passant par le bâtiment et les travaux publics, la police, l’industrie ou l’audiovisuel. Elle permet également de réaliser des missions de surveillance et des opérations de transport. Livraisons, cartographie, aide à l’agriculture ou à la lutte contre les incendies, l’usage des drones civils s’est ainsi fortement démocratisé dans de multiples secteurs industriels ou commerciaux.

Toutefois, ces nouvelles utilisations posent également de nombreux problèmes de sécurité, notamment au regard de leur introduction dans l’espace aérien. En effet, les usages n’étant plus uniquement professionnels, les particuliers peuvent également utiliser les drones, sous certaines conditions, pour des loisirs et de la prise de vue aérienne.

C’est le développement des drones de loisir de petite taille qui a bouleversé le marché, autrefois réservé à un public expert. Souvenons-nous que, en 2014 et en 2015, des drones non identifiés ont survolé dans notre pays plusieurs sites sensibles abritant des activités nucléaires, provoquant l’inquiétude des autorités.

En tant que leader en matière de drones civils, la France a été l’un des premiers pays à réglementer dès 2012 leur activité, essentiellement professionnelle. Néanmoins, le cadre juridique en la matière étant actuellement quasi inexistant, il est devenu impératif d’accompagner ce secteur économico-industriel en pleine croissance.

En ce qui concerne la sécurité, la réglementation s’est récemment durcie après des incidents causés par les aéronefs pilotés à distance. Le risque est encore plus élevé aux alentours des aéroports, lorsque les avions se trouvent dans la délicate phase de décollage ou d’atterrissage. Plus grave, la plupart des drones sont indétectables par les radars et peuvent provoquer des interférences sur les fréquences radio.

Le secteur aérien prend donc cette situation très au sérieux, d’autant que des drones de plus en plus grands et lourds sont désormais disponibles. Le risque est encore plus fort pour les avions de loisir, plus légers, qui volent plus bas. On comprend que la probabilité de croiser la route d’un drone inquiète.

Beaucoup d’incidents impliquent des drones, et tous ne sont pas répertoriés, raison de plus pour identifier une situation que cette proposition de loi tend à réglementer.

Selon un arrêté publié en décembre 2015, les drones ont, sauf dérogation, l’interdiction de survoler certaines zones, telles que les agglomérations, ainsi que les foules et, de manière générale, toute personne n’ayant pas été prévenue de la présence d’un drone. Certains sites sont également interdits de survol : les centrales nucléaires, les terrains militaires, les monuments historiques, les réserves naturelles, les parcs nationaux et, bien évidemment, les aéroports et aérodromes.

J’apporterai tout de même une précision : pour pouvoir voler en zone urbaine, il faut avoir suivi une formation spéciale et demander une autorisation à la préfecture.

En outre, un drone ne peut pas voler la nuit, même équipé de signaux lumineux, ni dépasser une altitude de 150 mètres.

Quant au pilote, il doit toujours être capable de suivre son appareil à l’œil nu, à moins d’être accompagné par une personne pour l’y aider. Enfin, la législation est très stricte en ce qui concerne les photos et vidéos que peuvent prendre les drones – une personne ne peut être filmée sans son autorisation explicite –, y compris pour certains bâtiments et monuments.

Cette proposition de loi tend à reprendre les conclusions du rapport du Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale.

Les drones participent assurément de la révolution numérique. Leurs usages étant multiples, il convient donc de compléter notre cadre réglementaire par des dispositions législatives définissant la notion de télépilote, imposant une formation aux pilotes de loisir et obligeant les constructeurs à installer des dispositifs de signalement électronique et lumineux.

Par ailleurs, la commission a introduit à l’article 2 un régime d’enregistrement en ligne des drones. Elle a prévu la détention d’un titre de télépilote, exigible pour certaines activités exécutées hors vue.

À l’article 3, la commission a étendu l’obligation d’inclure une notice d’information sur l’usage des drones.

Enfin, à l’article 4, elle a introduit l’obligation d’emporter un dispositif de limitation de performances sur les drones dépassant une certaine masse circulant sans personne à bord.

Avec ce texte, nous comblons un vide juridique. C’est une première étape. Néanmoins, face à une technologie encore très évolutive, la législation devra s’adapter régulièrement. Les questions de sécurité, de préservation des libertés publiques et d’assurance pousseront notre pays à renforcer l’arsenal législatif.

La France, leader pour les drones civils, peut s’enorgueillir d’avoir construit un secteur industriel d’avenir, à évolution ultrarapide. De plus en plus de pays dans le monde utilisent ces nouveaux aéronefs. Dans ces conditions, il paraît décisif que notre pays, à travers une législation nationale mieux précisée, exporte aussi une législation utile pour tous les utilisateurs des drones à travers le monde. Aussi, le groupe socialiste votera en faveur de ce texte.

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