Je voudrais remercier l’ensemble des collègues qui suivent ce dossier du logement, ainsi que Mme la ministre, que nous accueillons avec plaisir dans notre hémicycle.
Le groupe socialiste et républicain approuve largement les conclusions défendues par notre rapporteur, Valérie Létard. Elle a balayé le champ des enjeux et nous partageons la position politique qu’elle propose d’adopter. Celle-ci consiste à soutenir le texte, tout en indiquant que le Sénat fera preuve d’une grande vigilance sur un certain nombre de points et d’exigences que nous souhaitons voir repris dans l’ordonnance.
Nous n’allons pas reprendre le vieux débat sur l’opportunité des ordonnances. Pour ma part, je n’ai jamais été favorable à ce genre de méthode.
Pour autant, nous avions déjà voté sur ce texte, à l’occasion de l’examen du projet de loi Rebsamen, mais la disposition en question avait été censurée par le Conseil constitutionnel, qui y a vu un cavalier législatif. Au point où nous en sommes, nous pensons que cette réforme doit être mise en œuvre, que les ordonnances doivent donc pouvoir être promulguées, et ceci dans le respect de nos préoccupations.
Je voudrais désormais rappeler les points auxquels notre groupe est particulièrement attaché.
Tout d’abord, permettez-moi de vous remercier, madame la ministre, car vous vous êtes engagée à nous transmettre les projets d’ordonnance – je connais votre sens du dialogue –, afin que nous puissions être proactifs, au service d’une rédaction qui conviendrait au plus grand nombre.
Pour le groupe socialiste et républicain, ce qu’on appelle le « 1 % logement », géré par les partenaires sociaux, est un pilier fondamental de notre politique du logement. Nous avons toujours été opposés aux bruits qui pouvaient frémir, à Bercy ou ailleurs, sur la transformation de cette ressource gérée paritairement par les partenaires sociaux en un prélèvement obligatoire géré par l’État.
Nous avons toujours été attentifs, tout en étant assez lucides sur le réalisme de cette revendication, à ce que le « 1 % logement » ne se substitue pas aux crédits budgétaires consacrés par l’État tant au financement de l’ANRU, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, qu’aux aides à la pierre.
Je rappelle ces positions, sachant toutefois que, chemin faisant, hélas, l’État s’est désengagé budgétairement de l’ANRU, et que l’aide à la pierre est régulièrement menacée – j’espère que ces menaces ne se concrétiseront pas à l’occasion du prochain budget. Madame la ministre, vous pouvez prévenir vos collègues des finances : notre mobilisation sera totale pour qu’un haut niveau d’engagement budgétaire soit garanti. Nous y tenons !
La présente réforme a pour objectif de consolider le système, de répondre aux critiques qui lui sont faites et de garantir sa gestion paritaire. C’est un pari : la collecte étant centralisée, il est évident que la captation de ses recettes au profit de certains opérateurs est facilitée.
Toutefois, cette centralisation rend le système plus optimal, plus efficace, et devrait permettre de conjurer les critiques portant sur les doublons, la concurrence inutile, le gaspillage. C’est dans cet esprit que nous soutenons ce projet de loi.
J’en viens à l’objectif principal : comme le dit Action logement, l’urgence est de construire et de rénover. Il n’est pas question de gaspiller les crédits dans cinquante mille directions différentes. De ce point de vue, et même si nous approuvons tout à fait le dispositif VISALE, je reste une ardente partisane de la garantie universelle des loyers, la GUL, que nous avions votée en adoptant la loi ALUR §mais nous n’allons pas reprendre le débat sur ce vaste sujet !
Je résume l’objectif : construire, rénover, répondre aux besoins de logement.
Le premier point sur lequel nous souhaitons insister, c’est l’égalité. Le « 1 % logement », en effet, est un prélèvement obligatoire : il a donc vocation à s’inscrire dans un cadre d’intérêt général, lequel doit être très clair ; il ne peut pas être dispensé au gré des envies des uns et des autres.
De ce point de vue, je félicite l’Assemblée nationale d’avoir donné corps à l’idée, qui était dans l’air, de créer une structure consultative réunissant le mouvement HLM et les élus locaux. Vous comprendrez, madame la ministre, que le Sénat soit très attentif à la présence des élus locaux dans ce comité consultatif.
La fidélité au principe d’égalité exige également que la distribution du « 1 % logement » ne privilégie pas certains opérateurs de la construction de logements au motif qu’ils feraient partie du réseau d’Action logement, ou qu’ils seraient une ESH, une entreprise sociale pour l’habitat, plutôt qu’un office ou une coopérative. Les engagements pris par Action logement me semblent aller dans le sens d’un tel souci de transparence et d’égalité de traitement des opérateurs.
Je m’interroge par ailleurs depuis toujours sur la légitimité même de la capitalisation de certains organismes ou sociétés au moyen de fonds provenant d’un prélèvement obligatoire. Si possibilité de capitalisation il y a – avec les conséquences que cela emporte en termes d’acquisition de pouvoir au sein de la structure concernée –, pourquoi ne serait-elle pas ouverte à tous les types d’opérateurs intervenant dans ce domaine ?
Quoi qu’il en soit, l’utilisation des ressources d’un prélèvement obligatoire pour capitaliser certaines structures et y acquérir du pouvoir me semble borderline, comme disent les jeunes, d’un point de vue constitutionnel, et cela même si ce sont les partenaires sociaux qui détiennent ledit pouvoir.
Je pense que nous atteignons là une limite ; surtout, je pense que ces fonds seraient mieux utilisés à financer directement l’action. J’ai pu comprendre, un temps, la logique présidant à cette situation : sans capitalisation, pas de fonds propres, donc pas d’action possible.