Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, dans sa postface aux Conquérants, André Malraux écrit, à propos de la « création réelle d’une culture démocratique », qu’« il s’agit d’ouvrir le domaine de la culture à tous ceux qui veulent l’atteindre. »
Notre politique culturelle doit encore et toujours mettre fin à l’inégalité d’accès à la culture qui demeure aujourd’hui. Elle doit nécessairement promouvoir la création et la production, mais également se réengager pour soutenir les structures intermédiaires, l’éducation populaire, l’enseignement supérieur artistique, le milieu associatif culturel et les amateurs. Ce sont ces acteurs de la culture qui construisent les ponts entre la culture « savante » et les autres cultures dans nos territoires.
Donner un cadre législatif à la politique de labellisation menée par le ministère de la culture et de la communication permet de soutenir des réseaux, comme les centres culturels de rencontre, qui, depuis quarante ans, mettent en œuvre dans les territoires ruraux une politique transversale de développement à partir de la culture. Ces initiatives locales, qui fédèrent l’engagement d’artistes, de centres d’arts visuels, d’associations, de structures itinérantes, doivent être reconnues à l’échelon national afin que les partenariats se développent et redonnent vie aux territoires ruraux, de la même manière que les pratiques amateurs sont une chance inouïe pour dynamiser nos territoires. Ainsi, l’article 11 A du projet de loi, tel qu’il est actuellement rédigé, constitue une avancée majeure en termes de sécurisation de la pratique amateur.
L’implication du système audiovisuel public pour familiariser une part importante de la population aux arts et à la culture doit être plus grande. Alors que la collectivité publique finance largement les chaînes de télévision et de radiodiffusion publiques et permet l’utilisation des fréquences hertziennes, on assiste à un recul inquiétant de la diversité musicale, notamment aux heures de grande écoute, et des émissions traitant du monde de la culture. Face à la domination des critères d’audience, le débat engagé va nous permettre, je l’espère, de trouver un équilibre salutaire pour promouvoir la diversité musicale et la chanson francophone à la radio.
Enfin, les techniques de l’information et de la communication d’aujourd’hui permettent aux individus d’avoir accès légalement à un réservoir toujours plus riche de contenus culturels, qu’il faut accompagner. Il est intéressant à ce titre d’encourager le développement des services radiophoniques diffusés sur internet en leur appliquant le régime de la licence légale afin d’étendre les catalogues auxquels ont accès ces webradios.
Sur les questions relatives à l’archéologie, des oppositions demeurent néanmoins. Comme en première lecture, la commission est revenue sur l’ensemble des mesures visant à confier la maîtrise d’ouvrage scientifique sur les opérations archéologiques à l’État. Selon notre rapporteur, il s’agit de lutter contre une « reconcentration » qui ne dit pas son nom entre les mains de l’INRAP. Nous pensons, à l’inverse, que l’opérateur historique a un rôle de premier plan à jouer, notamment parce qu’on ne fait pas de la recherche archéologique comme on fait le commerce de n’importe quelle marchandise. Je le répète, l’archéologie n’est pas un simple bien commercial : c’est un bien commun à notre histoire et à notre patrimoine.
Dans ce domaine, nous sommes donc soucieux de préserver la qualité scientifique des fouilles, ce qui passe notamment par un contrôle rigoureux des opérateurs privés soumis à l’agrément. Il faut en effet veiller au respect de certaines exigences et faire en sorte que le renouvellement de l’agrément de ces opérateurs en dépende afin que ceux-ci puissent pleinement, mais dans le respect de certaines règles, participer aux opérations d’archéologie préventive.
Nous proposerons donc un amendement visant à renforcer les conditions d’obtention et de renouvellement de l’agrément pour les opérateurs privés, suivant ainsi l’une des recommandations du livre blanc de l’archéologie préventive.
Par ailleurs, afin de ne pas fausser la concurrence entre les différents acteurs du secteur, nous déposerons également un amendement visant à exclure du dispositif du crédit impôt recherche les contrats de fouilles archéologiques qui ne répondent pas à la logique du dispositif.
Nous sommes satisfaits des rapprochements opérés entre l’Assemblée nationale et le Sénat, en particulier sur la disposition clé du projet de loi portant sur la réforme des espaces protégés. Les craintes des collectivités territoriales concernant la gestion de ces espaces ont été entendues par Mme la ministre, ce dont notre groupe ne peut que se réjouir.
Il est par ailleurs positif que le rôle accru de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture ait été confirmé.
Quelques interrogations subsistent toutefois, en particulier sur le nom. Si nos deux chambres semblent s’accorder sur l’appellation « sites patrimoniaux remarquables », cette dénomination n’en suscite pas moins des réticences, en particulier de la part des grands sites inscrits dans le code de l’environnement. J’ai ainsi été alertée par le grand site Sainte-Victoire, près d’Aix-en-Provence, lequel redoute une confusion avec les sites classés. Je ne doute pas que nous aurons un débat sur ce sujet en séance.
Sur l’architecture, je souscris à la rédaction adoptée par notre commission concernant le projet architectural, paysager et environnemental à l’article 26 quater. En revanche, je suis favorable au maintien du seuil dérogatoire tel que l’a évoqué Mme la ministre à l’Assemblée nationale.
Vous l’aurez compris, nombre des mesures de ce projet de loi recueillent notre assentiment. Nous resterons toutefois attentifs à quelques dispositions qui font encore débat.