Nous entamons ici un débat de principe.
Sur le fond, le Gouvernement souscrit évidemment pleinement à l’objectif d’apporter une réponse au bouleversement du partage de la valeur dans l’environnement numérique, qui s’opère aujourd'hui au détriment de ceux qui prennent le risque de la création, qu’il s’agisse des artistes plasticiens, des photographes, des agences de presse ou de bien d’autres créateurs encore.
Pour autant, faut-il adopter ici une disposition qui ne sera pas, on le sait, conforme à nos engagements communautaires ? Telle est la véritable question.
Sur le fond, nous devons aujourd'hui aborder une problématique urgente, celle de la responsabilité et du traitement juridique des plateformes que vous avez évoquées, monsieur Abate. Ces plateformes sont considérées par le droit communautaire comme de simples hébergeurs, sans responsabilité au regard de la rémunération de la reproduction des œuvres protégées par le droit d’auteur. Ce statut date et n’est plus conforme au rôle qu’elles jouent dans l’accès aux œuvres et la distribution de programmes, de photographies, d’informations. Et je n’évoque même pas la question de la fiscalité…
Nous avons ce débat pour chacun des secteurs professionnels concernés par l’action de ces hébergeurs ; récemment encore, lors du Festival de Cannes ou devant la Commission européenne, nous avons abordé la question de la responsabilité de ces plateformes dans le financement et la distribution de la création.
Grâce à des prises de position particulièrement dynamiques, la France, d’abord isolée, puis rejointe par d’autres pays, a obtenu de la Commission européenne le lancement, le 23 mars dernier, d’une consultation sur la place de ces plateformes dans la chaîne de valeur, qui devra permettre de réaffirmer notre objectif.
Vos collègues de l'Assemblée nationale viennent d’exprimer leur soutien à ce dernier en adoptant une proposition de résolution européenne sur la protection du droit d’auteur dans l’Union européenne. Ce texte préconise « un meilleur partage de la rémunération au sein de la chaîne de valeur culturelle, par une plus grande contribution des plateformes qui tirent un profit de la distribution des contenus en ligne ».
C’est pourquoi je vous propose, mesdames, messieurs les sénateurs, tout en partageant l’objectif qui le sous-tend, de supprimer l’article 10 quater, car son dispositif serait en réalité inopérant. Nous devons traiter ce problème au niveau où la norme est posée.