Intervention de Nicole Bricq

Commission des affaires sociales — Réunion du 1er juin 2016 à 9h00
Instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

M. Lemoyne se demande s'il s'agit d'une réforme structurelle ou d'un DDOS : c'est une réforme structurelle, assurément, car ce texte concerne les conditions de travail, c'est à dire la vie concrète des salariés. Toutes les grandes lois du travail ces trente dernières années ont été le fait de la gauche : les lois Auroux de 1982 et les lois de 1998 et 2000.

Nos rapporteurs ont consacré beaucoup de temps au contexte mais parlons du texte. La question primordiale est de savoir quelle place donner à la négociation d'entreprise. Ce projet de loi concerne les rapports sociaux au sein de l'entreprise, selon la taille de celle-ci. La logique est aussi de renforcer par des droits nouveaux les moyens des représentants des salariés, afin de créer un rapport de force plus favorable aux salariés.

En outre, ce texte prépare le marché du travail aux mutations sociétales et technologiques qui auront un impact sur toutes les entreprises. Nous assistons en effet à la montée de l'individualisation, de l'autonomisation au sein de l'entreprise et à de nouvelles formes de travail. Le télétravail et les plateformes prennent une importance considérable, or leurs salariés sont mal traités. Ces évolutions modifient les rapports sociaux dans l'entreprise, qu'il s'agisse des mutations technologiques ou de la mondialisation. Nous devons aider les individus à affronter dans de bonnes conditions ces évolutions. Ce sera chose faite grâce au compte personnel d'activité, « sac à dos » dont disposeront les salariés, mais aussi les indépendants, ou ceux qui veulent le devenir - et passer d'un statut à l'autre constitue une mutation profonde. Ce CPA prend en compte le parcours professionnel et le parcours de vie de chacun - ce que vous contestez lorsque vous voulez supprimer le compte d'engagement citoyen. Il s'agit bien d'une innovation sociale majeure.

Ce texte traite aussi des conditions de vie au travail. Le burn out est de plus en plus fréquent. Il faut construire une médecine du travail qui corresponde aux évolutions actuelles. Le groupe socialiste regrette que cette question ne fasse pas l'objet d'une grande loi mais soit traitée de façon parcellaire au fil des textes, et ce depuis des années.

Ce texte traite aussi de la jeunesse. Là encore, une grande loi aurait été nécessaire. Le droit à la formation, avant même de s'engager dans la vie active, est néanmoins une avancée considérable. Oui, il s'agit bien de réforme structurelle ! Nos rapporteurs veulent traiter ce texte comme un DDOS. Le président Retailleau a dit hier que le Sénat voulait « tendre la main au Gouvernement ». Mais j'ai lu la proposition de loi de M. Chatillon, qui n'est pas signée par les rapporteurs - habileté ? - et j'ai aussi étudié les amendements de nos trois collègues au projet de loi. Ils remettent en cause la durée légale du travail et divers acquis sociaux. Le travail de démolition se poursuit ; les amendements des rapporteurs ou des groupes de la majorité ne s'inscrivent pas dans la logique du texte. Vous dites que vous voulez en revenir à la version initiale du texte, mais s'agit-il du texte adopté par le conseil des ministres ou du texte qui nous arrive avec les 760 amendements présentés par les députés socialistes, acceptés par le Gouvernement, et dont vous ne tenez pas compte ? Vous avez le droit d'être habiles mais la ficelle est un peu grosse : c'est une véritable corde de marin ! Ce n'est pas ainsi que vous arriverez à bon port. Vous refusez d'aller de l'avant dans le monde actuel.

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