Parmi nos propositions figurent aussi des dispositions répondant à la demande de stabilité des documents d'urbanisme.
Nous souhaitons à cet égard limiter l'effet perturbateur qu'exercent sur les PLU les obligations de mise en compatibilité. Le code de l'urbanisme prévoit de façon légitime une obligation de compatibilité des documents supérieurs aux PLU. Cette obligation est cependant un facteur d'alourdissement et de renchérissement considérable pour la gestion des PLU, car elle leur impose d'être modifiés ou révisés à intervalles rapprochés pour suivre l'évolution parfois rapide et désynchronisée des documents supérieurs.
Il faut donc donner aux élus de la prévisibilité sur le calendrier d'évolution d'un PLU. Pour cela, nous prévoyons d'instaurer un rendez-vous périodique triennal, où serait posée la question de sa mise en compatibilité éventuelle. Au lieu d'être dictée par les calendriers des documents supérieurs, la mise en compatibilité du PLU ne serait ainsi examinée qu'à l'occasion de ce rendez-vous. On déciderait alors s'il y a lieu d'introduire des changements nécessaires à la mise en compatibilité avec les documents supérieurs et on procéderait à tous les changements nécessaires dans une seule procédure, selon un calendrier connu à l'avance, au lieu de les introduire au fil de l'eau. Le premier avantage serait une cristallisation d'au moins trois ans des PLU.
Par ailleurs, les délais pour mettre le PLU en compatibilité seraient comptés à partir du moment où, suite au rendez-vous triennal prévu, la décision éventuelle d'engager une évolution du PLU serait prise par l'EPCI ou la commune. Le second avantage serait donc que la nouvelle procédure assouplirait le délai de mise en compatibilité, puisque l'on passerait d'un délai strict de trois ans maximum actuellement à un délai adapté à la situation de la collectivité, qui serait compris entre 3 et 6 ans.
Autre avantage souligné par le ministère du logement, qui est aujourd'hui très conscient du besoin de stabilité du droit, ce dispositif pourrait servir de socle facultatif pour la définition du calendrier d'entrée en vigueur des futures lois en matière d'urbanisme. Ces lois pourraient en effet prévoir que les PLU se mettent à jour des dispositions législatives nouvelles lors des rendez-vous triennaux.
Au-delà de cet axe structurant, qui est au coeur des compétences de notre commission, nous avons voulu répondre à trois sujets sensibles issus de la consultation : l'archéologie préventive, les architectes des bâtiments de France (ABF) et l'accessibilité.
Je passe sur l'archéologie et l'accessibilité, qui relèvent des commissions de la culture et des affaires sociales, mais je vais m'arrêter un instant sur les ABF.
La protection des abords des monuments historiques est le point essentiel qui cristallise les critiques issues de la consultation nationale. Nous ne pouvions pas ne rien faire, mais nous ne voulions pas tomber dans un populisme anti-ABF. Les griefs sont, à titre principal, au nombre de quatre : imprévisibilité des avis rendus, variabilité des décisions, sentiment d'inégalité des pétitionnaires et pointillisme.
Le groupe de travail a souhaité préserver le modèle français de protection des abords et prolonger la refonte de ce régime engagée par le projet de loi relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, qui a prévu que la protection des abords serait désormais applicable à des périmètres délimités par l'autorité administrative et remplaçant le fameux périmètre automatique de cinq cents mètres avec covisibilité. Le groupe s'est inscrit dans les pas de la commission de la culture.
Le coeur de notre proposition est de mieux associer l'ABF au PLU en contrepartie de deux choses : des prescriptions ex ante et une motivation renforcée de ses décisions. Quel est notre proposition ?
Les communes et EPCI se verraient offrir une faculté de demander à l'ABF ses prescriptions pour ce périmètre des abords. Avantage : établir un dialogue collectivité-ABF. L'ABF peut ne pas en proposer, mais doit expliquer pourquoi.
Si l'ABF propose des prescriptions, la commune aura la possibilité d'intégrer ou non ces prescriptions au PLU. Dans ce cas, l'ABF devra motiver ses décisions sur le fondement de ses propres prescriptions. Comme on le voit, ce dispositif ne réduit aucunement la compétence de l'ABF, qui continuerait à rendre des avis conformes sur les autorisations de travaux dans les abords des monuments. Au contraire, on renforce sa compétence, puisqu'il aura le droit de proposer des prescriptions. De même, les collectivités conservent leur liberté : liberté de demander des prescriptions à l'ABF et liberté de les intégrer ou non au document d'urbanisme. Simplement, ce dispositif crée les conditions d'un dialogue et permet à chaque acteur de définir et donc d'expliciter les règles qu'ils devront respecter.
Nous sommes conscients de proposer une évolution innovante et nous avons souhaité l'entourer de garanties. Cette évolution ne serait pas imposée et généralisée d'emblée, mais serait expérimentée pendant trois ans, à partir du volontariat des collectivités ou de leurs groupements. Le préfet recevrait les candidatures et serait amené à établir une priorité entre les dossiers. Avantage : Cet examen par l'État est une garantie visant à éviter l'engorgement des services des ABF qui est la principale crainte du ministère de la culture. Au plus tard six mois après la fin de l'expérimentation, et sur la base des remontées du terrain, le Gouvernement présenterait au Parlement un rapport d'évaluation proposant les suites à lui donner.
Seconde garantie : une période de six mois à compter de l'entrée en vigueur de la loi est prévue avant que puisse démarrer les expérimentations. Cela permet d'établir le dialogue entre les parties prenantes, étudier les premiers dossiers, et laisse le temps au pouvoir règlementaire pour organiser ses services à cet effet. Cela donne aussi du temps aux services territoriaux de l'architecture et du patrimoine, mais aussi aux préfets et aux représentants de l'État comme aux collectivités pour s'approprier le nouveau dispositif,
Nous attendons de cette réforme un meilleur dialogue donc une plus grande confiance entre les acteurs et davantage de fluidité et de transparence dans les décisions, gages essentiels de simplifications au quotidien. Nous pensons par ailleurs tenir là l'occasion de purger l'antagonisme élus-services du patrimoine.