À mes débuts, toutes les grandes communes étaient câblées ; j'ai donc commencé par les zones semi-rurales, signant ma première convention avec Châteaurenard, puis Beaucaire et Plan-d'Orgon. Puis, comprenant que je devais rechercher la densité, je suis allé à l'échelon départemental, câblant le Rhône puis l'Hérault. À l'époque, personne ne voulait y engager de l'argent public, à l'exception de quelques-uns dont le sénateur René Trégouët qui, dès les années 1990, a vu l'avenir de la fibre.
Vous voyez par conséquent que les territoires ont été ma raison d'être ; mais ils sont aussi mon avenir. Nous avons récemment annoncé notre objectif d'équiper 22 millions de foyers de la fibre à l'horizon 2022 - donc bien au-delà des grandes villes. Les quatre millions de foyers restants sont en milieu très rural. Nous ne pouvons atteindre seuls cet objectif, c'est pourquoi je suis le premier partisan des RIP : dès les années 2000, j'ai câblé toute l'Alsace avec l'aide de certaines collectivités. Il est vrai que nous avons été moins actifs sur les RIP au cours des trois dernières années ; mais je n'ai racheté SFR qu'il y a un an et demi... Nous serons présents sur les prochains appels à candidature, et nous y serons pour gagner.
La différence entre fibre optique et câble n'a pas d'importance à mes yeux ; ce qui compte, c'est le débit. Nous avons atteint 10 Gigabits sur nos câbles lors d'un test. C'est parce que nos concurrents ne bénéficient pas d'un réseau câblé comme le nôtre qu'ils déploient la fibre optique.
En rachetant Portugal Telecom, j'ai repris une structure équivalente au Centre national d'étude des télécommunications (CNET), regroupant 800 ingénieurs. Moi-même ingénieur de formation, j'ai délaissé les laboratoires il y a plus de vingt ans, lorsque j'ai compris que je ne serais pas prix Nobel...Mais j'emploie toujours des personnes pour y travailler et anticiper l'avenir. Avec Michel Combes, j'ai mis en place des centres de compétences dans les différents pays en fonction des spécialités ; le plus important est celui du Portugal. La compétence n'est plus notre apanage, elle est aujourd'hui mondiale. Les Chinois fabriquent désormais des mobiles qui marchent mieux que les nôtres.
Ces clients insatisfaits de 2015 auxquels vous faites référence, Madame Estrosi Sassone, je les ai récupérés le 30 novembre 2014. J'ai alors trouvé une qualité de service déplorable avec de nombreuses coupures, un réseau sous-investi. Le taux de couverture en 4G était de 33 %, contre 60 à 70 % chez les concurrents. Nous nous sommes retroussés les manches ; lorsque l'on travaille, on n'a pas le temps de faire de grands discours... Et pourtant, depuis le rachat, les plaintes des autorités françaises redoublent ! Nous avons porté la couverture en 4G à 55 %. L'année prochaine, nous serons numéro un. Un client insatisfait est un client qui nous quitte et, avant de toucher le portefeuille, cela blesse l'amour-propre. . .
Nous serons candidats à tous les appels d'offres des RIP. Je reconnais que nous ne sommes pas très actifs sur certains projets : nous préférons être propriétaires de nos infrastructures. Un locataire, pour refaire sa cuisine, doit demander l'autorisation de son propriétaire qui recourra à des prestataires - Monsieur Lasserre, vous avez évoqué les bureaux d'étude - alors qu'avec sa propre vision, il aurait pu faire mieux pour moins cher. Nous avons porté les investissements de SFR de 1,4 milliard à près de 2,3 milliards d'euros ; sans compter qu'avec la même somme, nous faisons deux fois plus...