Intervention de Jean-Jacques Bosc

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 8 juin 2016 : 1ère réunion
Projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2015 — Moyens de la justice - Auditions de Mme Dominique Lottin présidente de la conférence nationale des premiers présidents de cour d'appel M. Jean-Jacques Bosc membre de la conférence nationale des procureurs généraux M. Gilles Accomando président de la conférence nationale des présidents des tribunaux de grande instance et M. Thomas Pison vice-président de la conférence nationale des procureurs de la république

Jean-Jacques Bosc, présidente de la conférence nationale des procureurs généraux :

en remplacement de Mme Catherine Pignon, présidente de la conférence nationale des procureurs généraux. - La justice a reçu des moyens supplémentaires au titre des PLAT 1 et 2, même si nous sommes encore loin du compte et que notre budget reste très insuffisant.

Le manque d'argent freine la politique pénale, quand il rend plus difficile le recrutement d'experts, de traducteurs - c'est notre quotidien ; les impayés représentent, d'une année sur l'autre, le quart de nos moyens consacrés aux frais de justice. Cette pénurie peut aussi bloquer les procédures, quand l'expertise est indispensable ; c'est le cas de l'expertise psychiatrique, on l'a vu avec le mouvement de grève lancé par les psychiatres qui dénoncent les retards excessifs de paiement. Une bonne politique pénale demanderait une recherche plus importante d'ADN en cas de cambriolage, pour un croisement avec le fichier national ; or, avec les délais importants avec les laboratoires d'État, la limitation par le laboratoire de la gendarmerie nationale à un seul prélèvement d'ADN par scène de cambriolage, nous sommes contraints de nous adresser aux laboratoires privés, ce qui nous fait réserver la recherche d'ADN aux crimes et délits les plus graves. De même, quand les frais de justice sont plus importants que la valeur des biens concernés - je pense au vol de téléphones portables -, le parquet hésite à poursuivre, les procureurs donnent instruction à leurs substituts de prendre en compte cette donnée matérielle qui conditionne ainsi la politique pénale. Autre exemple, la mise en fourrière est si onéreuse que les forces de l'ordre sont loin de saisir systématiquement les véhicules des automobilistes commettant des délits routiers, alors que les textes prévoient cette saisie pour faire cesser le danger.

Des réformes pénales récentes accentuent ces charges, par exemple pour la traduction des pièces du dossier - le parquet va être dans l'impossibilité de traduire toutes les pièces, il n'en n'a tout simplement pas les moyens. Des considérations financières, encore, s'imposent eu égard à la réforme de la médecine légale.

La plateforme nationale d'interceptions judiciaires (PNIJ) devrait permettre d'importantes économies ; or, la police et de la gendarmerie rapportent que le service ne fonctionne pas, en particulier pour les écoutes téléphoniques : il est grand temps d'avancer sur cet outil.

Autre préconisation de la conférence des procureurs généraux : retirer du budget des frais de justice les dépenses qui n'en relèvent pas sur le fond, par exemple l'indemnisation des jurés d'assises, qui sont plutôt à classer parmi les dépenses de fonctionnement ; les frais postaux ont été ainsi déplacés, il faut continuer. D'une façon plus large, il faut parvenir à ce que le chef de cour gère la totalité du budget des frais de justice sur sa circonscription judiciaire, alors qu'une partie est aujourd'hui gérée directement par l'administration centrale ; une telle maîtrise autoriserait un pilotage bien plus fin des frais de justice.

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