Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’accord de Paris, signé le 22 avril dernier à New York, est un succès diplomatique pour la France et les instances onusiennes. Après plus de vingt ans de discussions et l’échec de Copenhague, 190 pays se sont engagés sur le long terme dans la lutte contre le dérèglement climatique.
Ce succès est le fruit d’un processus innovant, dont la France a pris l’initiative, reposant sur une logique d’engagement volontaire des pays et la mobilisation de la société civile. En donnant la parole aux territoires, aux collectivités, aux citoyens, l’accord a été nourri par toutes ces expériences. L’agenda des solutions a pris corps dans la COP 21 et démontré l’intérêt de la mobilisation conjointe des acteurs étatiques et non étatiques.
La réussite de la COP 21 était vitale. En témoigne la hausse du niveau des mers qui menace déjà de disparition certains États insulaires. Actuellement, plus de 600 millions de personnes vivent dans les zones littorales affectées et elles seront plus d’un milliard d’ici à 2060 : c’est demain ! L’ampleur et la gravité des phénomènes climatiques appelaient de façon urgente cette prise de conscience collective et la solidarité des États et des peuples. D’où l’importance de la dimension universelle de l’accord de Paris.
Nous sommes désormais au pied de la montagne et nous nous sommes collectivement engagés à la gravir suivant le programme ambitieux qu’il nous faut désormais concrétiser, préciser et préserver.
En premier lieu, il faut concrétiser l’objectif central de limitation de la hausse des températures par rapport aux niveaux préindustriels en deçà de 2 degrés, l’optimum étant de 1, 5 degré. Le travail est engagé au niveau international pour proposer une feuille de route à Marrakech. À cette fin, il a été décidé de rechercher l’équilibre entre les émissions liées aux activités humaines et leur absorption par les puits de carbone, avec l’objectif de neutralité des émissions dans la seconde moitié du siècle. Or cela ne signifie pas forcément la fin de l’exploitation des énergies fossiles. La possibilité de compenser pourrait s’avérer un piège…
Pourtant, de nombreuses personnalités scientifiques affirment qu’il faudra que les énergies renouvelables représentent 100 % de notre consommation d’énergie pour rester en deçà des 2 degrés. La traduction concrète de cet objectif appelle donc une réflexion, une réorientation des politiques énergétiques nationales la plus rapide possible et des engagements en progression. En France, la loi de transition énergétique répond à cette ambition ; nous verrons si elle donne tous les résultats attendus.
Malheureusement, dans le monde, d’autres choix sont faits actuellement. Ainsi, le Royaume-Uni développe une stratégie nationale en faveur de l’extraction du gaz de schiste. Aux États-Unis, Donald Trump a annoncé que, s’il était élu, il remettrait en cause la signature de l’accord par son pays, qu’il réactiverait le projet d’oléoduc Keystone XL et qu’il renforcerait l’exploitation déjà massive des gaz de schistes. Total, EDF et Engie se sont positionnés sur les marchés et vont nous vendre du gaz de schiste américain, à moins que… Madame la ministre, nous comptons sur vous !
Par ailleurs, et globalement, les contributions nationales sont insuffisantes. En l’état, la croissance des émissions devrait entraîner une hausse des températures de l’ordre de 3 degrés à l’horizon de 2100. Il faut donc revoir de façon anticipée les engagements nationaux. Les États doivent adopter une politique responsable et transparente, et cesser de mener des politiques contradictoires. Ajoutons que l’exercice ne sera pas simple dans l’Union européenne, qui devra trouver un accord entre des pays très nombreux et très divers.
En deuxième lieu, il faut préciser un certain nombre de dispositions. Là encore, je citerai un exemple. L’accord est fondé sur l’équité et le rappel des responsabilités communes, mais différenciées, des parties. Il reconnaît l’importance du renforcement des capacités d’adaptation pour tous les pays, grâce notamment à des mécanismes de coopération et de transferts de technologies. C’est pourquoi il est nécessaire de préciser la nature et le fléchage des transferts financiers pour y arriver. L’aide publique au développement bénéficiant aux pays les plus pauvres doit donc absolument être renforcée et activée. Convenons qu’aujourd'hui les prêts sont bien plus importants que les dons, pour un niveau global d’aide encore insuffisant.
Nous savons la difficulté qu’il y a à mobiliser les financements publics pour le climat, alors que les subventions publiques aux énergies fossiles sont consolidées. Ainsi, 42 milliards de dollars d’aides publiques internationales ont permis de soutenir l’industrie du charbon entre 2007 et 2015, et cela continue. Il faut donc réorienter ces financements.
En troisième lieu, enfin, l’accord de Paris doit être préservé, dans un monde où, comme le dit un ancien directeur du FMI, et il n’est pas communiste